La fin d'une incertitude jurisprudentielle : la chambre civile se rallie à la position de la chambre criminelle (la solution jurisprudentielle antérieure de la chambre criminelle et le rejet de la conception subjective du préjudice). Les victimes réduites à l'état végétatif seront indemnisées dans les mêmes conditions que les autres (la remise en cause de l'appréciation du préjudice personnel à travers la conception et la « dimension éthique » de l'arrêt)
[...] Cette réparation manifeste plutôt qu'une indemnisation, un symbolisme à l'égard du blessé, mais également des tiers souffrant indirectement du préjudice survenu. Pour ces derniers, il paraît souvent choquant que le responsable d'un dommage réduisant le blessé à un état végétatif ne soit pas condamné au paiement d'indemnités. Ainsi, à travers la volonté d'indemnisation du préjudice subi, la Cour de cassation transforme-t-elle cette forme de compensation en une punition des responsables de dommages causant l'inertie de personnes humaines les privant ainsi de leur existence. Cette notion de peine privée aurait alors pour fonction de rasséréner l'entourage de la victime. [...]
[...] La conception objective remet en cause l'appréciation du préjudice personnel En l'espèce, la Cour de cassation énonce que l'état végétatif de la victime n'exclut aucun chef d'indemnisation. L'existence du dommage, quel qu'il soit, doit se constater objectivement, même s'il est de caractère personnel, comme le sont la douleur ou le préjudice d'agrément, notamment. Les partisans de l'indemnisation classique soutiennent que peu importe si la victime n'éprouve pas de préjudice personnel, dès lors que son état permet de constater la réalisation objective d'un dommage . [...]
[...] C'est la raison pour laquelle elle a le droit à une indemnisation du préjudice qu'elle a subi, et ce quel que soit son état. La conception subjective avait été critiquée, notamment en ce qu'elle établissait une discrimination entre les victimes et qu'elle les rabaissait au rang de simples choses. D'après la position formulée par le Comité consultatif national d'éthique le 24 février 1986, une telle conception bafoue la dignité humaine des victimes inconscientes, lesquelles pourtant ont d'autant plus de droit au respect de leur personne qu'elles sont en état de grande fragilité d'après le Comité consultatif national d'éthique. [...]
[...] Le préjudice s'identifie, dès lors, à sa perception par la victime et l'inconscience de celle-ci exclut son existence. C'est la conception qu'avait retenu la cour d'appel de Rouen dans un arrêt rendu le 25 juin 1992. En effet, elle avait exclu la réparation du préjudice personnel car il était impossible d'établir la preuve d'un préjudice certain puisque, selon l'expert, la victime réduite à l ‘état végétatif n'était absolument pas apte a ressentir quoique se soit, qu'il s'agisse d'une douleur, d'un sentiment de diminution du fait de sa disgrâce esthétique ou d'un phénomène de frustration de ne pouvoir assumer les plaisirs comme les soucis de l'existence. [...]
[...] Réparation du préjudice subi par une victime inconsciente. Commentaire d'arrêt I. La fin d'une incertitude jurisprudentielle : la chambre civile se rallie à la position de la chambre criminelle Il conviendra d'étudier dans un premier temps la solution jurisprudentielle antérieure de la chambre criminelle avant d'analyser, dans un second temps, le rejet de la conception subjective du préjudice A. La solution de la chambre criminelle Les deux arrêts rendus par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 22 février 1995 closent le débat que suscite la réparation des dommages subis par les victimes plongées dans un état végétatif. [...]
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