principe de la légalité, juge pénal, acteur créateur de droit, Marc Ansel, juriste Portalis, Cesare Beccaria, Déclaration des droits de l'homme, législation, loi, Code civil, peines planchers, application de la loi par analogie, principe de séparation des pouvoirs, supériorité de la loi pénale sur la jurisprudence pénale, interprétation de la loi pénale, individualisation des peines
"La science du législateur consiste à trouver dans chaque matière les principes les plus favorables au bien commun ; la science du magistrat est de mettre ces principes en action, de les ramifier, de les étendre, par une application sage et raisonnée, aux hypothèses privées d'étudier l'esprit de la loi quand la lettre ne suffit pas". Par ces lignes, le juriste Portalis, lors de son discours préliminaire sur le projet de Code civil en 1801, défend le rôle actif et interprétatif du juge, qui intervient pour appliquer et adapter la loi, tel que voulu par le législateur. Si cette vision est aujourd'hui celle qui prévaut, durant longtemps le rôle du juge a été cantonné à celui d'un simple exécutant de la loi par une application stricte du principe de légalité.
Ce principe est posé en 1764 par Cesare Beccaria : la loi, règle normative générale et impersonnelle édictée par législateur, doit expressément prévoir la sanction, la peine, pour chaque infraction, soit chaque comportement qu'elle prohibe. Ainsi il n'y a "Pas de crime, pas de peine sans loi", et Beccaria estime que le droit, en l'occurrence pénal, ne peut jouer un rôle dissuasif que par l'instauration d'un système de peine fixe qui ne laisse aucune marge d'appréciation au juge pénal, contrairement au système mis en place sous Louis XIV qui donnait au juge un pouvoir de modulation, l'arbitraire, synonyme selon l'auteur d'inégalité et de laxisme.
[...] En effet, sa jurisprudence n'est pas une norme générale et impersonnelle et il reste soumis à une loi pénale qu'il doit respecter et appliquer. Ainsi bien que de nombreuses libertés lui aient été apportées depuis le système des peines fixes, il est des normes qu'il doit appliquer dans la détermination des peines pénales, par exemple la nécessaire motivation des sanctions qu'il prononce ainsi que le respect du plafond des peines. Par ailleurs, la loi pénale est également supérieure par sa pérennité dans le temps. [...]
[...] Cependant, cette méthode peut conduire à un certain fondamentalisme littéral et serait aussi un danger pour le justiciable : en cas d'obscurité de la loi ou même de vide législatif, le magistrat se retrouverait incapable de rendre une décision. Par application, dans l'arrêt Bailly du 8 mars 1830, un décret prévoyait que les voyageurs ne pouvaient pas descendre lorsque « le train est complètement arrêté » : une interprétation littérale du texte aurait donc donné raison à l'individu qui saute du train en marche, alors même qu'il est évident que l'intention du législateur était d'éviter un tel comportement. [...]
[...] Il en résulte un droit particulièrement pérenne, alors même que le juge pénal ne fait pas de la constance de sa jurisprudence un caractère important puisqu'il va même jusqu'à affirmer que « nul ne peut se prévaloir d'un droit acquis à une jurisprudence figée » (1re chambre civile octobre 2001). Ainsi une solution de jurisprudence pénale n'est pas acquise et peut être facilement sujette à un revirement de jurisprudence, ce qui en fait une source de droit instable et changeante. Le juge pénal est donc un acteur encadré de sa propre initiative par le refus d'une application de la loi par analogie, mais aussi encadré par une loi pénale qui s'avère supérieure à sa jurisprudence. Il n'en demeure pas moins un acteur puissant. [...]
[...] Au regard du principe de la légalité tel qu'admis au XVIIIe siècle, il est possible alors de se demander : le juge pénal est-il devenu un acteur créateur de droit ? Si l'on se réfère au principe de séparation des pouvoirs tel qu'appliqué aujourd'hui et selon lequel les pouvoirs exécutifs et législatifs sont séparés, il est évident que la réponse est négative. Il ne faut cependant pas négliger les avancées en matière de libertés laissées au juge dans l'application de sanctions pénales, qui forcent à admettre une nuance. [...]
[...] La reconnaissance d'un rôle d'individualisation de la sanction pénale Au fil des années, le juge a eu un rôle croissant dans l'individualisation des peines. La principale de toutes les innovations a donc été la suppression des peines-planchers et donc par voie de conséquence des circonstances atténuantes par le Code pénal de 1994 : le juge est libre d'attribuer la peine qu'il veut dans la limite du maximum fixé, c'est la manifestation d'une politique d'individualisation de la peine. Cependant de manière plus récente on a encore une accentuation des politiques d'individualisation et donc du rôle du juge pénal dans la fixation de la peine. [...]
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