Juge, principe de légalité, délits, crimes, article 34 de la Constitution, article 111-3 du Code pénal, non-rétroactivité de la loi pénale, application de la loi, interprétation de la loi, légalité criminelle, article 8 de la DDHC
Selon Portalis, "en matière criminelle, où il n'y a qu'un texte formel et préexistant qui puisse fonder l'action du juge, il faut des lois précises et point de jurisprudence". En ce jour de l'an IX, à la veille de l'adoption du Code civil, son rédacteur faisait allusion au grand principe régissant la loi pénale, le principe de légalité criminelle. Du latin Nullum crimen, nulla poena sine lege, il trouve son origine dans le célèbre "Traité Des délits et des peines" de Cesare Beccaria. Seules les lois peuvent fixer les peines correspondant aux délits et aux crimes. Ce principe de légalité des délits et des peines a été codifié à de nombreuses reprises.
[...] Ainsi, le revirement de jurisprudence défavorable au condamné, mais prévisible raisonnablement est rétroactif. Voilà donc encore une exception à la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, mais, pour autant, qui ne viole pas le caractère prévisible de la loi pénale. Donc, de ce fait, le juge ne va pas à l'encontre du principe de légalité, il l'atténue et le remet en cause. Portalis, Discours préliminaire sur le projet de Code civil, an IX C. Beccaria, Traité Des délits et des peines R. [...]
[...] Si ce principe a autant de popularité à travers le monde, c'est en partie grâce à son apport. En effet, il caractérise la loi pénale en obligeant le législateur à la rendre claire et précise, intelligible, prévisible raisonnablement et accessible. En outre, l'usage de ce principe se justifie par le fait qu'il sauvegarde des intérêts publics, politiques en limitant les pouvoirs des autorités de poursuite et de jugement et en fixant les délais. Et, par-dessus tout, la certitude de la sanction pénale renforce son caractère intimidant et profite donc à la société, se sentant protégée par la vue d'une punition du prévenu. [...]
[...] Néanmoins, ce principe inébranlable connait des failles. En effet, si le principe affirme que la loi doit être claire et précise, il reste impossible d'atteindre une précision absolue. Il suffit de regarder autour de nous pour s'en rendre compte. Chaque article de droit pénal connait des interprétations de sa substance. Si la loi était véritablement claire, le juge resterait simplement bouche de la loi et ne ferait pas parler de lui. Mais c'est bien le contraire qui apparait justement, il tient un rôle fondamental dans la compréhension de la loi pénale obscure. [...]
[...] En ce qui concerne un revirement de jurisprudence favorable au condamné, son application ne pose point de problème[24]. Par contre, la réponse donnée par la Cour européenne diverge selon que le revirement de jurisprudence est prévisible ou non. Mais qu'entend-elle par prévisibilité ? Prévisibilité synchronique, à un moment donné, ou diachronique de la jurisprudence, perceptible au fur et à mesure ? À la lueur de quelques décisions[25], il semblerait qu'elle retienne finalement la prévisibilité diachronique en affirmant que le juge doit vérifier si l'interprétation judiciaire de la loi pénale se bornait à poursuivre une tendance perceptible dans l'évolution de la jurisprudence des tribunaux. [...]
[...] Par ce biais, le juge rappelle également le lien avec le principe de légalité, car ces décisions sont rendues au visa des articles 111-3 et 111-4. Le juge constitutionnel confirmera ce lien[8] : seule la loi a le droit de limiter les libertés individuelles, elle doit donc définir avec précision les éléments constitutifs de l'infraction en termes clairs et précis. Quant au juge des droits de l'Homme, il suivra un raisonnement similaire dans l'affaire Kokkinakis[9] sur le fondement de l'article 7 CEDH : l'interprétation et l'application de la loi dépendent du texte. [...]
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