La société a toujours abordé la question de la « folie » sous deux angles : s'en protéger car elle fait peur, mais également l'accompagner car le « fou » appartient à l'Humanité. Aujourd'hui, diverses études révèlent que le nombre de malades mentaux augmente dans les prisons françaises. D'une part, la prison génère des troubles psychiques et d'autre part la société incarcère de plus en plus de personnes souffrant de graves troubles. C'est ce deuxième aspect qui sera abordé dans ce dossier de presse thématique. Ce phénomène s'explique par les changements entrepris depuis plusieurs années qui traitent tout malade mental comme un individu dangereux doit la société doit se protéger plutôt que comme un être humain qui doit être soigné. Ces difficultés ont conduit à une sorte de pénalisation de la maladie mentale : des expertises psychiatriques de plus en plus remises en question et un manque de prise en charge des malades mentaux par la psychiatrie générale. Toute une population de malades mentaux se retrouve donc sans soins continus et souvent à la rue ; certains finissent alors par « commettre le délit ou le crime qu'on se devait de leur éviter de commettre » (De Beaurepaire, 2009) et se retrouvent parfois en prison. Afin de traiter ce thème, nous l'aborderons sous l'angle de la modification du système pénal français qui tendrait vers le « populisme pénal » où la victime est au premier plan avec alors une remise en question de l'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.
[...] Non, répondent unanimement, pour une fois les psychiatres. Toutes les études montrent que, proportionnellement, la population générale commet plus de crimes. Les malades mentaux, au contraire, sont le plus souvent victimes de la violence, sociale, économique, physique parfois. Ils présentent en moyenne une espérance de vie inférieure de dix ans à celle de la population, du fait de leur vulnérabilité (agressions, maladies, accidents . Enfermer les malades pour les protéger ? Bien sûr, la violence pénètre l'hôpital. Nous y sommes de plus en plus confrontés, estime Mme Claire Garnier, la secrétaire du syndicat CGT de l'hôpital Paul-Guiraud de Villejuif (Val-de-Marne), en raison du manque de personnel il y a parfois moins de deux infirmiers pour vingt malades et du manque de formation des jeunes infirmières, à qui l'on n'a pas appris à gérer les situations tendues. [...]
[...] La drogue entre dans l'enceinte de l'établissement, des gens de l'extérieur viennent pour en vendre aux patients. C'est l'hôpital qui doit aujourd'hui se protéger de la société. M. Graindorge envisage donc d'instaurer un contrôle d'accès, à l'aide de cartes magnétiques et d'une protection individuelle avec bip pour les agents. Afin de protéger les malades du monde extérieur, on va donc de nouveau les enfermer. Pour M. Patrick Chaltiel, psychiatre à Bondy et animateur d'un observatoire de la violence à l'hôpital de Ville-Evrard, dans la région parisienne, lorsqu'il y a violence, le plus souvent, elle n'est pas due à la maladie, mais elle vient en réaction à une situation d'abandon, d'errance, de solitude, de manque de logement et de rejet dont sont victimes les malades mentaux ; la violence peut naître du sentiment de révolte que n'importe quel citoyen pourrait ressentir dans une telle situation De surcroît, explique la sociologue Anne Lovell, les représentations de la maladie mentale n'ont pas évolué depuis cinquante ans Une enquête menée en France entre 1999 et 2003 montre que, si le dépressif est considéré comme accessible aux soins et à la guérison par des personnes, seulement pensent que l'on peut guérir un fou et un malade mental L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a donc fait de la lutte contre la stigmatisation l'un des axes de sa politique de santé mentale. [...]
[...] La distinction entre la prison et l'hôpital psychiatrique résulte de ce principe d'irresponsabilité pénale des aliénés mentaux Ce dernier se formalise en 1810 avec l'article 64 du Code pénal. Ainsi : Il n'y a ni crime, ni délit lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l'action ou lorsqu'il a été contraint par une force à laquelle il n'a pu résister La personne déclarée démente bénéficiait alors d'un non-lieu psychiatrique Il existait alors avec cet ancien Code pénal une réelle division entre les responsables incarcérés et les irresponsables internés. [...]
[...] C'est avec cette sectorisation que va se définir une politique de santé mentale territorialisée. Jusque-là les malades mentaux n'étaient plus vraiment visibles aux yeux de la société. On avait réussi à faire en sorte que la maladie mentale soit prise en compte par l'ensemble de la société [ ] et non seulement par le médecin et son équipe »11. Il apparaît aujourd'hui difficile d'aborder la construction sociale des malades mentaux dangereux sans aborder de manière significative le rôle des médias. [...]
[...] Concernant l'article du Monde diplomatique, le ton est davantage militant, son auteur étant un écrivain et journaliste habitué à traiter du sujet de la maladie mentale. Afin de commenter les quatre articles sélectionnés, nous allons procéder comme suit : nous verrons les facteurs explicatifs du nombre croissant de malades mentaux incarcérés pour ensuite développer les raisons de cette volonté de les juger. On doit l'enfermer, bien sûr, mais dans un hôpital psychiatrique Ces cas de malades mentaux délinquants envoyés en prison s'expliquent par deux phénomènes. [...]
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