Le Conseil constitutionnel a acquis depuis 30 ans une position éminente dans le paysage juridique et politique français. En peu de temps, une tradition, des habitudes s'effondraient, obligeant chacun à repenser le système juridique et politique pour intégrer le jeu de ce nouvel acteur. Incontestablement, le Conseil constitutionnel n'est pas aujourd'hui ce qu'il devait être pour ses fondateurs; très exactement même, il est la figure inversée de leur intention : le gardien de la Constitution et des droits et libertés des citoyens plus que l'arbitre des conflits de compétences entre les grands organes de l'Etat.
La Constitution de 1958 a consacré dans son titre 7 une institution chargée de veiller, entre autres, à la conformité constitutionnelle des lois votées par le Parlement. Cette institution c'est le Conseil constitutionnel.
[...] Cette posture est susceptible de donner naissance à un conflit entre les juridictions répressives procédant à un tel contrôle et le Conseil constitutionnel. Le cas s'étant déjà produit sur la question de l'appartenance des magistrats du ministère public à l'autorité judiciaire ; le Conseil constitutionnel dans une QPC du 30 juillet 2010 conclut à la conformité au droit à la sûreté tel que garanti par l'art de la Constitution du contrôle par le Procureur de la République des 48 premières heures de garde à vue, au motif que l'autorité judiciaire comprend à la fois les magistrats du siège et les magistrats du parquet la chambre criminelle de la Cour de cassation le 15 décembre 2010 adopte une position inverse en concluant à l'inconventionalité au regard du droit à la sûreté tel que garanti par l'art CESDH du même dispositif législatif En pareille hypothèse, c'est la décision rendue par la Cour de cassation qui prime de facto sur la position dégagée par le Conseil constitutionnel, ce qui constitue une violation, non seulement du principe de la séparation des pouvoirs telle que définie par la Constitution, mais aussi de la hiérarchie des normes. [...]
[...] En vertu de ce principe, le juge répressif peut opérer un contrôle de conventionnalité des lois pénales. Ainsi le juge peut contrôler la conformité des lois à la CESDH depuis l'arrêt de la chambre mixte du 24 mai 1975 Société des cafés Jacques Vabre. Les mécanismes issus de la hiérarchie des normes permettent ainsi au juge répressif d'écarter l'application de dispositions pénales de droit interne (loi ou règlement), qui ne satisferaient pas aux exigences de la CESDH. Mais également, par 4 arrêts rendus en assemblée plénière le 15 avril 2011, la Cour de cassation a consacré la règle de l'autorité absolue à valeur supra législative de la chose interprétée par la CEDH. [...]
[...] Si le Conseil constitutionnel juge que la disposition législative porte atteinte aux droits et libertés, il prononce son abrogation et cette disposition disparaît de l'ordonnancement juridique. La décision produit alors un effet erga omnes. La chambre criminelle de la Cour de cassation joue ici pleinement le jeu de la question prioritaire de constitutionnalité. Des pans entiers du droit pénal de forme et de droit pénal de fond ont pu être soumis au contrôle à postériori du Conseil constitutionnel (l'exemple de la garde à vue, de l'inceste ou encore du harcèlement sexuel). [...]
[...] Sur ce fondement, il n'hésite pas à déclarer inconstitutionnelles et par suite à abroger, les incriminations pénales qui ne seraient pas rédigées en termes suffisamment clairs et précis, violant ainsi l'impératif de sécurité juridique. Prenons l'exemple de la QPC du 16 septembre 2011 pour la qualification pénale d'inceste ou encore la QPC du 4 mai 2012 pour la qualification de harcèlement sexuel. L'influence du Conseil constitutionnel s'exerce également quant à la répression pénale. La répression pénale qui touche aussi bien la peine que la mesure de sûreté. Ainsi, le Conseil constitutionnel exerce un contrôle rigoureux sur chacune de ces catégories de sanctions pénales. [...]
[...] Ce contrôle a priori exercé par le Conseil constitutionnel est désormais très fréquent lorsqu'il s'agit des lois pénales. En effet, la plupart des lois réformant le droit pénal de forme ou le droit pénal de fond sont soumises à son contrôle. Cela s'explique principalement du fait qu'elles mettent en cause des droits, principes ou libertés constitutionnellement garantis. Par exemple, la loi LOPSI II du 14 mars 2011 a donné lieu à une importante décision du Conseil constitutionnel du 11 mars 2011 dans laquelle le Conseil reconnaît comme non constitutionnels l'élargissement de l'application des peines planchers aux mineurs primodélinquants, la comparution immédiate devant le tribunal des enfants, ou encore la pénalisation des parents en cas de non-respect d'une décision de couvre-feu individuelle. [...]
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