Alors même que la chambre de l'instruction avait fait l'objet de critiques à la suite de l'affaire dite d'Outreau, plusieurs magistrats entendus par la commission d'enquête parlementaire avaient insisté sur la nécessité de renforcer l'autorité et la place de cette institution. Cette volonté était donc le signe que la chambre de l'instruction se devait de garder une place importante dans la justice pénale française et que par conséquent son utilité n'avait pas disparu.
La chambre de l'instruction constitue la juridiction d'instruction du second degré. Section de la Cour d'appel, elle se compose d'un président et deux conseillers. Son président, nommé par décret après avis du CSM, est en principe exclusivement attaché à cette fonction. Quant aux fonctions du Ministère public, elles sont exercées par le Procureur général ou l'un de ses avocats généraux ou substituts.
S'interroger sur l'utilité de la chambre de l'instruction impose d'effectuer un retour en arrière : en effet, la chambre de l'instruction telle qu'on la connaît aujourd'hui est le fruit d'une longue évolution qui a vu se succéder plusieurs juridictions. Mais le changement le plus significatif s'est surtout produit avec la loi du 15 juin 2000 renforçant la présomption d'innocence et les droits des victimes. Le législateur ne s'est cette fois-ci pas contenté de l'appeler « chambre de l'instruction », mais a opéré une transformation essentielle de ses fonctions. En donnant au juge d'instruction le pouvoir de rendre des ordonnances de mise en accusation et en instaurant un appel en matière criminelle, le législateur a en effet mis à mal le monopole de la mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises dont jouissait traditionnellement la chambre d'accusation.
Or c'est précisément cette suppression du deuxième degré d'instruction obligatoire en matière criminelle qui pose la question de l'utilité de la chambre de l'instruction, autrement dit de sa place au sein du système pénal actuel. Si la chambre de l'instruction semble avoir été utile dans le passé en raison de ce rôle incontournable qui était le sien lors de l'instruction, elle semblerait, avec l'instauration d'un appel en matière criminelle, vouée à être cantonnée à un rôle subsidiaire. Or ce pessimisme semble en contradiction avec la volonté largement partagée de donner à cette juridiction toute la place qui devrait précisément être la sienne. Si la chambre de l'instruction reste donc une juridiction utile, encore faut-il se demander comment elle a su conserver cette place importante au sein du système pénal.
[...] De même, la procédure devant la chambre de l'instruction, jadis écrite, secrète et non contradictoire, s'est adaptée. D'abord à travers l'extension de la publicité des débats : la loi du 5 mars 2007 a fait de la publicité le principe pour les majeurs, sauf demande contraire. La chambre de l'instruction a aussi tenté de tirer les leçons de l'affaire d'Outreau, où on lui avait reproché de n'être qu'une chambre d'enregistrement La chambre de l'instruction joue désormais un rôle essentiel dans le renforcement de la collégialité de l'instruction puisqu'elle peut désormais imposer la co-saisine de plusieurs juges d'instruction à la demande des parties, même si le juge d'instruction initialement saisi s'y oppose. [...]
[...] Pour ce faire, la Chambre de l'instruction se trouvait dotée d'un large pouvoir de révision, lui permettant de revoir l'affaire dans sa totalité. Or à l'heure actuelle, cette deuxième instruction par la chambre de l'instruction n'est que facultative, et cette juridiction ne connaît de l'information diligentée par le juge d'instruction que si elle est saisie du dossier. Mais il est vrai que la chambre de l'instruction peut à cette occasion en profiter pour examiner la façon dont l'instruction a été conduite. Son pouvoir d'évocation lui permet d'ailleurs de faire l'examen complet du dossier (comme un véritable juge d'instruction). [...]
[...] Si la chambre de l'instruction reste donc une juridiction utile, encore faut- il se demander comment elle a su conserver cette place importante au sein du système pénal. Nous verrons ainsi que la chambre de l'instruction demeure tout d'abord une institution utile en raison des larges pouvoirs qui lui sont attribués, signe qu'elle semble avoir été finalement peu fragilisée par la loi du 15 juin 2000 Enfin, il faut voir que si son utilité a perduré, c'est aussi parce que la chambre de l'instruction a su faire preuve d'une importante faculté adaptation face aux nouvelles exigences qui s'imposaient à elle (II). [...]
[...] S'agissant enfin de la détention provisoire, la chambre de l'instruction a renforcé son contrôle avec la loi de 2007. Désormais, chaque dossier en cours où une détention provisoire a été ordonnée pourra être examiné publiquement et contradictoirement par la chambre de l'instruction tous les 6 mois (art. 221-3 CPP). Lors de cette véritable révision du dossier, portant sur l'état d'avancement et la poursuite de l'information, la chambre, saisie par son président, pourra ordonner des remises en liberté, annuler des actes, évoquer le dossier, prescrire au juge d'effectuer certains actes Dès lors, quand bien même certains estimeraient encore ces réformes insuffisantes, il n'en demeure pas moins que la chambre de l'instruction continue de garder, à travers l'accroissement de ses pouvoirs, une utilité au sein d'un système, d'autant plus que l'effectivité de son contrôle n'a cessé d'être encouragée. [...]
[...] S'agissant du contrôle des actes de l'instruction, la chambre de l'instruction dispose d'un pouvoir d'annulation en cas d'irrégularités commises au cours de l'instruction. A ce titre, elle contrôle aussi bien la régularité en droit des actes accomplis que la conduite de l'instruction elle-même, autrement dit l'opportunité en fait des actes d'instruction. Dans le premier cas, la chambre de l'instruction va par exemple vérifier si un interrogatoire a été effectué conformément aux règles légales, et elle pourra provoquer ainsi la nullité des actes litigieux, qui ne peut être demandée que dans des cas limités et sous certaines conditions. [...]
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