Selon Jean-Jacques Rousseau, « le droit pénal est moins une espèce particulière de loi, que la sanction de toutes les autres ». Cette analyse peut juridiquement être discutée. En effet elle réduit le droit pénal à un « gendarme du Droit » selon l'expression de Messieurs Merle et Vitu et annihile donc toute idée d'indépendance du droit pénal vis-à-vis des autres disciplines juridiques, toute idée d'autonomie.
La discipline juridique qui organise la répression des auteurs d'infractions ne serait donc pas une discipline à part entière du droit mais une matière transversale qui supplée les insuffisances des autres. Cela supposerait que le droit pénal ne se suffise pas à lui-même, qu'il n'ait pas d'existence en dehors des autres matières juridiques et qu'il n'obéisse à aucun principe ou logique propre.
En définitive, la question de l'autonomie du droit pénal revient à se demander si le droit pénal est un droit autonome vis-à-vis des autres disciplines juridiques, c'est-à-dire dépendant de celles-ci ou s'il se suffit à lui-même.
[...] Ainsi est considéré comme voleur l'individu qui prend un objet dans un commerce et l'emporte sans avoir payé. Le juge pénal ne tient pas compte de certaines décisions civiles parfois. En matière d'abandon de famille, la jurisprudence considère que le père qui cesse, pendant deux mois, de verser une pension alimentaire ultérieurement suspendue par le juge civil de manière rétroactive commet un abandon de famille (Crim 2002). Enfin le juge pénal est parfois indifférent à l'égard de la nullité, de l'irrégularité d'un acte ou d'une qualité nécessaire à l'existence de l'infraction. [...]
[...] Cependant à la différence de la plupart des autres disciplines juridiques, les obligations instaurées par le droit pénal le sont sous une forme négative. L'existence d'une obligation est déduite de la répression de l'abstention ; alors que les autres disciplines juridiques créent des obligations ou des interdictions selon une présentation positive. De plus ces valeurs particulières sont protégées par des sanctions propres consistant en des peines ou des mesures de sûreté. Tout d'abord leur objectif à savoir la rétribution, l'intimidation et la réadaptation pour les peines où pour les mesures de sûreté la prévention, la réadaptation et la surveillance se distinguent des sanctions civiles, fiscales ou administratives dont l'objectif est l'indemnisation de la victime. [...]
[...] C'est le juge pénal qui se livre à cette opération. Interprète-t-il les concepts étrangers à sa discipline dans le sens que leur attribue celle-ci, se livrant ainsi à une interprétation stricte, ou bien adopte-t-il sa propre interprétation ? De manière évidente, la jurisprudence montre que c'est une interprétation extensive qui est retenue. Tout d'abord le juge pénal rejette certaines définitions traditionnelles adoptées dans ces disciplines. Par exemple, la qualité de fonctionnaire public, qui peut être un élément ou une circonstance aggravante d'une infraction a été étendue par un notaire et un conseiller municipal par un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 1893, ce qui lui confère un sens beaucoup plus large que celui du droit administratif. [...]
[...] C'est le second aspect de l'autonomie du droit pénal, une indépendance technique davantage voilée. II. L'autonomie technique du droit pénal, une autonomie déguisée Alors que le droit pénal se suffit à lui-même, il est présent dans chaque branche du droit pour les renforcer. Son intervention a lieu à travers l'interprétation de concepts propres à d'autres disciplines et à travers la garantie qu'il offre aux règles extrapénales du fait de ses sanctions A. Un droit interprétatif des concepts extrapénaux Dans la mesure où il s'immisce dans des disciplines extrapénales, le droit pénal doit être concilié avec des concepts extrapénaux. [...]
[...] Une discipline juridique originale Le droit pénal emprunte aux disciplines du droit privé comme à celles du droit public. Dans la mesure où il régit les rapports entre particuliers, en organisant la protection des libertés individuelles, il se rapproche du droit privé. L'éventuelle présence d'une victime qu'il tend à protéger pourrait laisser penser qu'il s'inscrit dans le droit privé. De plus les mêmes magistrats composent les juridictions civiles et pénales. En effet ce sont les juridictions judiciaires qui sont compétentes en matière pénale dans la mesure où le juge pénal est garant des libertés individuelles. [...]
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