Selon le Vocabulaire Juridique du doyen Cornu, l'expression latine « animus necandi » se compose de deux éléments. Le terme « animus » signifie « âme », « esprit », il est utilisé pour désigner un élément intentionnel permettant de déterminer certaines situations juridiques. Généralement, il est associé à un autre mot qui va qualifier cette intention. Ainsi, par exemple, « l'animus testandi » signifie intention de faire un testament. Associé ici à l'expression « necandi » (du latin : tuer), il désigne l'intention de tuer ou encore l'intention homicide.
Ainsi définie, cette expression renvoie à l'un des deux éléments caractéristiques d'une infraction : l'élément intentionnel. En effet, à défaut de cet élément, l'infraction ne serait pas constituée. Or, selon l'article 121-3 du Code Pénal : « Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ». Cela implique que l'auteur de l'infraction ait conscience que son comportement s'écarte des prescriptions faites par la loi, qu'il constitue une attitude répréhensible. C'est ce que juge la Cour de Cassation, notamment dans un arrêt du 25 mai 1994 dans lequel elle décide que « seule la constatation de la violation en connaissance de cause d'une norme assortie d'une sanction pénale implique l'intention coupable exigée par l'article 121-3 du Code Pénal ».
Cependant, il faut prendre en compte la spécificité de l'expression puisque celle-ci ne nous renvoie pas à n'importe quelle intention mais à « l'intention de tuer ». En effet, certains auteurs qualifient cette intention de dol spécial, c'est-à-dire une intention particulière qui est celle d'atteindre un certain résultat prohibé par la loi. Pour l'animus necandi, ce résultat ce sera la mort d'autrui. Or, il faut constater que le nombre d'incriminations qui exige la présence de ce dol spécial est très limité puisqu'à priori, en effet, seul l'article 221-1 du Code Pénal relatif au meurtre semble l'exiger.
Ce caractère restrictif de l'expression nous amène à nous demander ce qui fait l'originalité de cet élément intentionnel qu'est « l'animus necandi ». Comment le caractérise-t-on ? Comment démontre-t-on son existence ?
Son originalité se rencontre dans l'analyse de son contenu, de la notion même de l'élément « animus necandi » (I). Elle se manifeste également par les spécificités de son régime (II).
[...] Les deux notions se recoupent quelque peu mais il ne faut pas les confondre. Une autre difficulté s'est rencontrée, il s'agissait de savoir à quel stade de l'exécution de l'infraction dont-on se placer pour apprécier l'existence de l'intention homicide. Faut-il qu'elle soit concomitante à l'acte ? Peut- elle être antérieure à l'acte ? L'enjeu ici sera de distinguer l'intention homicide de la préméditation. Celle-ci désigne un dessein réfléchi, formé avant l'action, de commettre un crime ou un délit déterminé (article 132- 72 du Code Pénal). [...]
[...] Cette hypothèse peut rejoindre celle de l'euthanasie. Comme pour les mobiles, le consentement de la victime n'a aucune incidence sur l'existence de l'intention homicide. Selon certains, ce consentement n'est pas incompatible avec le fait que l'auteur ait agi avec l'intention de donner la mort. Traditionnellement, cette solution s'appliquait en matière de duels. Aujourd'hui, elle vaut surtout en matière de suicide. Tous ces éléments montrent l'originalité de l'animus necandi, ils en font un élément à part. [...]
[...] La victime a contacté le virus par la suite. La Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel pour absence de motifs, elle considère que la seule connaissance du pouvoir mortel de la substance administrée ne suffit pas à caractériser l'intention homicide Par conséquent, la Cour exige une intention de tuer alors que le texte d'incrimination n'en fait aucunement mention. En cela, l'arrêt est critiquable parce qu'il dénature totalement l'infraction de l'empoisonnement. De plus, cet arrêt a eu semble-t-il des répercutions dans l'affaire dite du sang contaminé Cette affaire médiatique mettait en cause les responsables du Centre des transfusions sanguines ainsi que des médecins et des hommes politiques (poursuivis séparément devant la Cour de Justice de la République qui le 9 mars 1999 a condamné l'un d'eux et relaxé les deux autres), des hémophiles ayant contracté le virus du SIDA suite à des transfusions lors d'opérations chirurgicales. [...]
[...] Ainsi, les juges vont recourir à un système de présomptions de fait. Par exemple, le fait d'utiliser une arme à feu contre une partie vitale du corps suffit à caractériser l'intention de tuer, de même que le fait de porter un coup de marteau sur le crâne de la victime (CCass, Crim janvier 1993) ou encore le fait de tirer cinq coups de carabine sur les occupants d'un fourgon en visant le pare-brise du véhicule (CCass, Crim mai 1989). On constate dans ces exemples que ces circonstances de fait portent sur l'emploi d'une arme et sur certaines parties du corps. [...]
[...] Néanmoins, les spécificités du régime de l'animus necandi demeurent. II- Les spécificités du régime de l'animus necandi Ces spécificités sont relatives à la preuve de l'animus necandi mais également au fait que dès lors que l'animus necandi est retenu par les juges, les faits justificatifs tendant à renverser son existence sont pour la plupart d'entre eux inefficaces L'administration de la preuve de l‘animus necandi L'animus necandi est une notion abstraite puisqu'elle n'est pas définie par le texte d'incrimination. De plus, c'est une notion assez subjective puisque cet élément psychologique est interne à l'auteur de l'acte. [...]
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