L'obligation de motivation des décisions de justice impose au juge, autorité indépendante et impartiale investie par une norme juridique du pouvoir de trancher un litige, d'exposer au travers des motifs, les raisons l'ayant conduit à retenir la solution énoncée dans le dispositif ; l'expression « décisions de justice » étant définie comme un « terme général utilisé en procédure pour désigner les actes émanant d'une juridiction collégiale ou d'un magistrat unique».
L'exigence de motivation, aujourd'hui largement consacrée, ne s'imposa que difficilement au cours des siècles. S'il est vrai que la procédure formulaire dans l'ancienne Rome et l'apparition de l'écrit dans la pratique judiciaire au XIIe siècle ont constitué des cadres propices à sa consécration, l'affirmation du pouvoir royal et la souveraineté des juridictions dès le XIVe siècle achevèrent l'édifice.
Malgré l'apparition, au XVIe siècle, d'une hiérarchie au sein des juridictions qui amena la Cour du Roi à réclamer aux Parlements la motivation de leurs sentences, les obstacles politiques et techniques à la consécration de l'obligation ne furent levés qu'à la Révolution. La défiance des révolutionnaires à l'égard de l'institution judiciaire bouleversa le domaine des sources du droit.
Le juge devenu, conformément à la prophétie de Montesquieu, la «bouche de la loi », un « automate dépourvu de pouvoir propre », un instrument de la volonté législative, perdit toute prétention à participer à la production normative.
Ainsi, la loi des 16-24 août 1790 posa une obligation générale de motivation valable pour les décisions civiles et pénales, rendues en première instance et en appel, non pas pour combattre l'arbitraire des juges en les sommant de s'expliquer dans l'intérêt des parties, mais pour imposer le règne de la loi à ceux qui étaient chargés de l'administration de la justice. Dès lors, la motivation se résumait à un strict énoncé de la règle de droit appliquée.
[...] Ainsi, à la clôture des débats, la Cour et le jury se retirent pour délibérer. Le Président, conformément aux articles 349 et suivants du Code, doit rédiger les questions auxquelles la Cour devra répondre. Il est prévu (art CPP) qu'une question distincte soit posée pour chaque fait figurant dans l'acte de mise en accusation, pour chaque circonstance aggravante et cause d'exemption ou d'atténuation de la responsabilité pénale. Ces questions principales peuvent être, au titre des articles 350 et 351 du code, complétées par des questions subsidiaires relatives à des éléments nouveaux apparus au cours des débats ou de faits susceptibles de recevoir une qualification différente. [...]
[...] Pal mai 2009, 134, p N. FRICERO, Motivation des décisions et impartialité du jury d'assises, Procédures, avril 2009, n°116 S. GDJIDARA, La motivation des décisions de justice : Impératifs anciens et exigences nouvelles, LPA 26 mai 2004, n°105, p J. GHESTIN, L'interprétation d'un arrêt de la Cour de cassation, Dalloz R. JOUY BIRMAN, J.M FLORAND, J. REYNAUD, Pour une motivation des arrêts d'assises, LPA 2005, p M. PUECH, Une décision motivée Procédure(s) et Effectivité des Droits, Droit et justice, éd. Bruylant, p F. [...]
[...] Or, l'exigence de motivation, si elle venait à s'imposer, devrait l'être à l'ensemble des décisions rendues ce qui suppose de trouver des modalités applicables à toutes les situations. Par ailleurs, que resterait-il dans certains cas, de cette interrogation si comme le recommande le rapport Léger, la procédure du plaider-coupable venait à voir le jour en matière criminelle? Cette procédure présenterait, certes, des avantages incontestables en terme de gain de temps et participerait ainsi, à la nécessité de désengorger les juridictions. [...]
[...] Toutefois, l'imperatoria brevitas dont paraît bénéficier la Cour de cassation semble antinomique des impératifs de transparence, de persuasion et de compréhension des décisions. Si des motivations exogènes[78], palliatifs à la motivation lapidaire des décisions délivrent, a posteriori, des informations complémentaires sur les intentions de la Cour et l'exacte portée de ses arrêts, certains auteurs s'expriment en faveur d'une motivation plus explicite, incluant les opinions dissidentes ou, au moins, un état de la jurisprudence antérieure[79] dans la décision. Cependant, si les opinions dissidentes entraveraient l'apparence d'unanimité et par conséquent l'autorité de la décision, vouloir imposer d'amples développements juridiques comportant une analyse de la jurisprudence antérieure, argumentant et exposant le pour et le contre, ne peut se concevoir qu'en réduisant les cas d'ouverture à cassation» [80]. [...]
[...] En l'absence de disposition légale expresse, l'obligation de motiver les décisions de justice s'impose au juge en vertu de l'article 455 du Code. Ainsi, la Cour de cassation considère que les jugements rendus par défaut[4] et les décisions rendues sur opposition[5] doivent être motivées. Quelques exceptions, justifiées par la nécessaire discrétion que certaines situations imposent[6] ou par la nécessité de sauvegarder l'intérêt d'une bonne administration de la justice[7] subsistent cependant. De plus, lorsque le juge bénéficie d'un pouvoir discrétionnaire, il est libre de motiver ou non sa décision, étant entendu que ses motifs, quel qu'ils soient peuvent être tenus pour surabondants[8]». [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture