Arrêt n°14-85 879 du 20 juin 2017, abus de confiance, délit non intentionnel, construction immobilière, infraction d'escroquerie, article 314-1 du Code pénal, article 121-1 du Code pénal, inexécution contractuelle, remise à titre précaire, responsabilité pénale du chef dirigeant, irresponsabilité pénale, responsabilité personnelle, responsabilité de la personne morale
En l'espèce, plusieurs personnes d'origine comorienne résidant à Marseille avaient conclu, avec une société de construction constituée aux Comores par un dirigeant de nationalité française, des contrats dont l'objet était la construction de maisons individuelles dans cet archipel. L'opération était censée être financée selon une pratique locale s'apparentant à la tontine, au moyen du versement, par chaque souscripteur, d'un acompte puis de mensualités. Il était au demeurant prévu que l'ordre d'exécution des travaux devait être arrêté par décision du groupe ou par tirage au sort.
Les choses ne se sont toutefois pas passées comme prévu. Estimant que les constructions promises n'avaient été que partiellement réalisées et que la société de construction n'avait pas, par conséquent, tenu ses engagements, les clients ont déposé une plainte du chef d'escroquerie contre le dirigeant. Renvoyé devant le tribunal correctionnel au terme d'une information judiciaire pour travail dissimulé et abus de confiance, celui-ci fut reconnu coupable de ces chefs en première instance et, en cause d'appel, fut condamné à douze mois d'emprisonnement assortis du sursis avec mise à l'épreuve ainsi qu'à une interdiction de diriger, de gérer ou de contrôler une entreprise commerciale ou industrielle d'une durée de cinq ans.
[...] De même, la Cour réaffirme, que le dirigeant d'une société peut être responsable à titre personnel ; peu importe que cette infraction soit ou non réalisée dans le cadre sociétaire. Nous verrons donc, dans un premier temps, l'admission du délit d'abus de confiance en cas d'inexécution contractuelle Puis dans un second temps, l'admission d'une responsabilité pénale personnelle pour des actes juridiques conclus par la personne morale (II). L'admission du délit d'abus de confiance en cas d'inexécution contractuelle La Cour admet le délit d'abus de confiance en cas d'inexécution contractuelle, en élargissant pour cela, la notion de remise à titre précaire Néanmoins, cet élargissement reste contestable L'élargissement de la notion de remise à titre précaire des biens vers le contrat Les liens qui unissent le délit d'abus de confiance à la matière contractuelle sont complexes, et surtout ancien. [...]
[...] En effet, s'agissant de la condition de détournement, la Cour se contente de constater que le dirigeant « a disposé d'une partie des fonds perçus à des fins autres que l'exécution des obligations contractuelles qu'il avait souscrites ». Cela n'est sans doute pas suffisant. En effet, le détournement devrait s'apprécie selon la réalisation d'un acte positif ou négatif nécessairement distinct d'une simple inexécution contractuelle. Cependant, en plus d'élargir la notion de remise à titre précaire, la Cour de cassation admet une responsabilité pénale personnelle concernant les actes juridiques conclus par la personne morale. [...]
[...] Mais, que faut-il entendre par organe ou représentant de la personne morale ? Les organes de la personne morale sont généralement désignés par la loi ou les statuts. Ils détiennent les pouvoirs pour agir au nom de la personne morale et en assurer la gestion et la direction. Les représentants ne sont pas nominativement désignés mais ils agissent pour le compte de la personne morale et sont reconnus comme tels aux yeux des tiers. Il s'agit d'une notion factuelle. Dès lors, on aurait pu penser qu'en l'espèce, la personne morale puisse être responsable du fait de son dirigeant ; puisque sa qualité de dirigeant ne fait pas de doute. [...]
[...] Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle juin 2017, 14-85.879 - Le dirigeant peut-il invoquer l'absence d'intention pour échapper à l'incrimination d'abus de confiance ? « L'abus de confiance c'est le fait pour une personne de détourner au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a accepté, à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage quelconque » Article 341-1 du Code pénal Cet article pose les éléments constitutifs du délit d'abus de confiance. [...]
[...] Il semble que peu à peu, la jurisprudence ait permis d'élargir le centre de gravité du délit d'abus de confiance des biens vers le contrat. Cette évolution s'est faite dans un premier temps au sein de l'article 314-1 du Code pénal car la haute juridiction a autorité que l'objet de l'abus de confiance puisse être dématérialisée (à propos de l'utilisation d'informations pour détourner une clientèle - Cass.crim novembre 2011). Dans un second temps, la Cour de cassation a transformé la condition tenant à la remise. [...]
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