M. Gilbert X, représentant de la SCI Fondation Première, a fourni à son notaire, M. Gérard Y, des documents signés en blanc par ses associés (parmi lesquels se trouvait Georges X, frère de M. Gilbert X). M. Gérard Y a rédigé des procurations aux fins de caution sur ces documents, et a établi le procès-verbal d'une assemblée générale de la SCI Fondation Première datée du 30 octobre 1992, mais qui n'avait jamais eu lieu, autorisant M. Gilbert X à contracter un prêt. Le prêt a été contracté auprès du Comptoir des Entrepreneurs, devenu la société Entenial, et un acte authentique a été dressé par M. Gérard Y le 10 novembre 1992.
Mais le 21 octobre 1997, Georges X, en tant que caution, a été assigné par la société Entenial en paiement d'une certaine somme. Georges X a contesté les documents de caution comme étant des faux, et a porté plainte contre son frère pour faux et usage. Plus tard, Gérard Y a été mis en examen pour chef de faux en écritures authentiques aggravé et usage, et Gilbert X pour faux et usage. Gérard Y étant décédé en cours de procédure, une ordonnance constatant l'extinction de l'action publique a été rendue à son égard, ainsi qu'à l'égard de Gilbert X par l'effet de la prescription, les infractions ayant été commises plus de trois ans avant la plainte de Georges X.
La question soulevée était de savoir si les qualités personnelles de l'auteur d'une infraction, constituant pour lui des circonstances aggravantes, se transmettent à son complice, alors que, étranger à ces qualités personnelles de l'auteur principal.
[...] Il n'est peut-être donc pas tant complice que co-auteur de l'infraction, et dès lors, on tendra à penser qu'il devrait subir une peine au moins équivalente à celle de Gérard si tant est que cela soit possible En l'occurrence, il n'existe pas d'infraction équivalente à celle commise par Gérard c'est pourquoi la Cour de cassation énonce : l'article 441-4 du Code pénal punit de la réclusion criminelle le faux en écritures publiques ou authentiques commis par une personne chargée d'une mission de service public agissant dans l'exercice de sa mission, et que les faits, ayant été commis le 10 novembre 1992, la prescription publique n'était pas acquise à l'égard du complice Cette assimilation peut sembler étrange, elle signifie concrètement que les juges de cassation entendent punir Gilbert X exactement comme si lui-même avait été notaire. Pour mieux comprendre cette requalification, il faut prendre en compte l'attachement de la Cour de cassation à une solution ancienne : les circonstances aggravantes mixtes. [...]
[...] Ainsi, dans le dernier attendu, il montre son attachement à cette solution, malgré les critiques qui lui étaient formulées et malgré l'abandon de ce système par le nouveau Code pénal. Ainsi, les juges de cassation considèrent ici que la qualité d'agent public de Gérard Y s'était transmise à Gilbert et qu'en vertu de cette transposition, Gilbert X devait également encourir une peine criminelle, et donc que l'action publique n'était pas encore éteinte à son égard. Le refus de recourir à une fiction montre l'attachement de la Cour de cassation à une théorie éculée, et sur ce point, la décision est critiquable : une requalification des faits envers Gilbert X était certes nécessaire, mais c'est certainement une autre qualification qu'il aurait fallu retenir, plutôt que de lui attribuer des qualités personnelles propres à l'auteur principal de l'infraction Le rejet de l'article 121-6 montre que, même si le système de l'emprunt de pénalité était lacunaire et parfois difficile à mettre en œuvre, le nouveau système a également ses limites et doit être comblé au moins par la jurisprudence, sinon par un nouveau texte. [...]
[...] Le système de l'emprunt de pénalité voulait que certaines circonstances aggravantes d'une infraction se transmettent au complice, au nombre desquelles on trouvait les circonstances aggravantes que la doctrine a appelées mixtes : circonstances personnelles à l'auteur principal qui touchaient également le complice (par exemple, si l'auteur tuait son père, le complice, qui n'avait pourtant aucun lien familial avec la victime, se trouvait également parricide L'article 121-6 du nouveau Code pénal abandonnait ce système en décidant non pas que le complice serait puni des mêmes peines que l'auteur, mais qu'il serait puni comme si lui-même avait été l'auteur. Le législateur a donc eu recours à une fiction juridique. [...]
[...] Mais le 21 octobre 1997, Georges en tant que caution, a été assigné par la société Entenial en paiement d'une certaine somme. Georges X a contesté les documents de caution comme étant des faux, et a porté plainte contre son frère pour faux et usage. Plus tard, Gérard Y a été mis en examen pour chef de faux en écritures authentiques aggravé et usage, et Gilbert X pour faux et usage. Gérard Y étant décédé en cours de procédure, une ordonnance constatant l'extinction de l'action publique a été rendue à son égard, ainsi qu'à l'égard de Gilbert X par l'effet de la prescription, les infractions ayant été commises plus de trois ans avant la plainte de Georges X. [...]
[...] B L'utilisation des circonstances aggravantes mixtes La Cour de cassation énonce donc dans l'avant-dernier attendu que la qualification retenue par la cour d'appel ne convenait pas, pour en choisir ensuite une autre qui ne semble cependant pas tout à fait satisfaisante. Les juges de cassation auraient pu choisir d'avoir recours à une fiction : Gilbert X aurait commis les actes imputés à Gérard Y s'il avait été notaire, et les juges auraient peut-être pu se baser sur cette idée pour le punir d'une peine équivalente à celle qui était encourue par Gérard Y. Au lieu de cela, ils ont préféré une solution moins évidente : les circonstances aggravantes mixtes. [...]
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