Arrêt de cassation du 17 octobre 2018, chambre criminelle, délai de prescription, amnésie traumatique, ordre public, intérêt général, action publique, action civile, viol sur mineur, expertise psychologique, force majeure, articles 9 1 et 9 3 du Code pénal, article 593 du Code pénal, principe d'égalité des armes, article préliminaire du Code pénal, article 2 du Code pénal, article 5 du Code pénal, article 112 1 du Code pénal, principe de non-rétroactivité des lois, arrêt de cassation du 7 novembre 2014, article 9 1 du Code pénal
« La liberté prise comme un absolu peut conduire soit à l'anarchie le plus complète, soit à la loi du plus fort, c'est-à-dire à la barbarie », si l'on en croit la pensée de l'Abbé Pierre.
Une analogie peut être réalisée entre cette expression et l'organisation de la société dans les temps plus archaïques, avant que l'État n'intervienne. La puissance souveraine s'est dans un premier temps intéressée à sanctionner les infractions pénales troublant l'ordre public et portant atteinte à l'intérêt général par le biais de l'action publique. Progressivement, l'État a su s'introduire dans la justice privée antérieurement régie par le cercle vicieux de la vengeance, afin d'assurer la paix au sein de la société. Une procédure s'est dès lors ouverte à la victime qui souhaite obtenir par des dommages et intérêts en réparation du préjudice pénal subi?; l'action civile.
[...] Ce texte constitue une exception du principe suscité de non-rétroactivité des lois puisqu'il octroie la possibilité aux juges d'appliquer un article de loi promulgué ultérieurement à la commission des faits à condition que la peine correspondante à cet article soit moins sévère que celle prévue par l'article qui aurait à l'origine du s'appliquer. En l'espèce, la chambre criminelle aurait pu choisir d'appliquer l'article 9-1 du Code de procédure pénale en vigueur dès 2017 à la place de l'article 7 du même Code dans sa version applicable en 1982. [...]
[...] S'il en avait été ainsi, le délai de prescription du crime aurait été de trente ans et non pas de dix, ce qui aurait permis à M.X de pouvoir intenter une action publique sans qu'il ne soit trop tard. En ce sens, nous pouvons penser que le moyen du requérant consistant en la violation du principe de l'égalité des armes par la Cour d'appel est tout à fait admissible et que les Cours auraient pu prendre en compte. Il est en effet étonnant que les juges du fond, puis du droit, s'accordent unanimement à ne pas aider au mieux, par la différente application possible des dispositions législatives, le requérant victime du potentiel crime qui restera alors impuni. [...]
[...] La solution défavorable au justiciable critiquable tant socialement que juridiquement Le 17 octobre 2018, la chambre criminelle rend un arrêt de rejet du pourvoi au motif que le délai de prescription est achevé, empêchant donc la recevabilité de l'action publique de M.X malgré son amnésie traumatique, ce dernier n'étant pas un "obstacle de fait insurmontable et assimilable à la force majeure". Cette solution est surprenante et critiquable quant à deux points. D'une part, nous pouvons estimer que les magistrats du droit auraient aisément pu opter pour la solution inverse en considérant que l'amnésie, qui par définition empêche la victime de se souvenir des faits, ne permet pas à celle-ci d'engager une action judiciaire contre le coupable de l'infraction. [...]
[...] C'est pourquoi les magistrats de la chambre criminelle stipulent que « Attendu qu'en l'état des énonciations, desquelles il résulte l'absence de nécessité d'autres investigations, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen ; d'où il suit que les moyens doivent être écartés. ». Afin d'étudier cette décision qui mérite pour le moins quelques explications, il convient de s'intéresser dans un premier temps à l'évocation implicite de deux principes indispensables à la résolution du litige avant d'étudier l'affirmation critiquable de la solution proposée par la Cour de cassation (II). [...]
[...] M.X affirme que l'amnésie l'empêchait de pouvoir agir avant, ce qui en fait donc un élément suffisant pour suspendre la prescription de l'action publique, sa demande initiale étant donc recevable. Les moyens invoqués sont toutefois écartés par la Chambre criminelle de la Cour de cassation qui rejette le pourvoi étant en adéquation avec les arguments de la Cour d'appel, ce qu'elle ne manque pas de stipuler dans un arrêt en date du 17 octobre 2018. Afin d'apporter une réponse à ce pourvoi, les juges du droit ont dû s'interroger comme suit : le délai de prescription de l'action publique peut-il être suspendu par une amnésie traumatique de la partie civile l'empêchant d'avoir conscience des faits pour lesquels elle engage une procédure juridique plus de dix ans après ? [...]
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