L'installation cet hiver de tentes le long du canal St-Martin à Paris par l'association « Les enfants de Don Quichotte » afin d'héberger les SDF, a remis en exergue le débat sur le droit à un logement décent. Ce droit semble en effet indispensable au respect de la dignité humaine. Depuis la loi Quillot de 1982, le droit positif a déclaré l'existence d'un droit au logement qui a été élevé en 1995, au rang d'objectif à valeur constitutionnelle. La protection de la dignité humaine apparaît aujourd'hui comme une préoccupation centrale de notre droit, quelle qu'en soit la branche. Ainsi, lors de l'examen des lois bioéthiques de 1994, le Conseil Constitutionnel a consacré "le principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine", destiné à protéger la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation. Dans le même temps, il a entendu « la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent » comme étant « un objectif à valeur constitutionnel ».
[...] Progressivement la jurisprudence retient des conditions permettant de caractériser le comportement de celui qui soumet une personne à des conditions d'hébergements contraires à la dignité humaine. Toutefois ce critère est encore peu retenu et la jurisprudence n'est pas très fournie. Pourtant les situations d'insalubrité irrémédiables avec interdiction définitive d'habiter sont suffisamment fréquentes pour pouvoir fonder des poursuites, à analyser aussi au regard de la vulnérabilité ou la dépendance des personnes. Parallèlement, les occupants peuvent se porter partie civile et demander des dommages et intérêts pour trouble de jouissance lorsqu'ils ont subi des conditions d'hébergement contraires à la dignité humaine; en ce sens a été jugée l'affaire des îlots insalubres à Marseille. [...]
[...] La catégorie des infractions continues, permet au juge de poursuivre et de condamner dès lors que l'action coupable n'a pas cessé. Cela lui permet alors de retarder le délai de prescription du délit. Dans cette espèce, si la qualification d'infraction instantanée avait été retenue, la solution n'aurait guère été différente du point de vue de la prescription. Le délit se prescrivant en trois ans, l'action introduite par Mr Kanté le 29 mai 1995 devant le tribunal d'Evry aurait été de la même manière valable. [...]
[...] Mme Azzam forme alors un pourvoi en cassation. Elle reproche dans un premier temps à la Cour d'appel d'avoir violé le principe de non rétroactivité de la loi pénale énoncé à l'article 112-1 du Code pénal. Selon le moyen, l'infraction n'était constituée qu'à la date de la signature du bail le 10 août 1993, date antérieure à l'entrée en vigueur du nouveau Code. Dès lors, Madame Azzam ne pouvait pas être déclarée coupable du délit d'hébergement contraire à la dignité humaine. [...]
[...] Lorsque cet élément objectif a été pris en compte, l'infraction, suppose une condition préalable, elle ne se conçoit qu'à l'égard d'une personne vulnérable ou en dépendante. Afin de qualifier ce second élément constitutif, des arguments de faits sont rapportés par une jurisprudence peut abondante. L'arrêt du 11 février 1998 étant novateur en la matière, il va implicitement définir les contours de la notion de vulnérabilité ou de dépendance. Celles-ci sont très similaires et conduisent les personnes à un état d'infériorité. [...]
[...] L'abus comme l'a relevé la Cour de cassation pourrait donc déduire implicitement de la situation de faiblesse de la personne, puisqu' entre la faiblesse et l'abus, la marge est étroite. Le législateur est intervenu face à ces situations délicates dans lesquelles les juges se trouvaient. A savoir interpréter la loi de manière stricte au risque de laisser passer des comportements intolérables, ou bien passer outre le critère de l'abus pour pouvoir incriminer les auteurs d'atteinte à la dignité humaine. La loi de 2003 est alors venue modifier la rédaction de l'article L 225-14 du Code pénal, lequel dispose aujourd'hui que Le fait de soumettre une personne, dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur, à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine est puni de cinq ans d'emprisonnement et de Euros d'amende Cette nouvelle rédaction de 2003 offre la possibilité, de rendre les faits incriminés punissables lorsque la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparemment connus de l'auteur de ces faits. [...]
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