« Nullum crimen nulla pœna sine lege .» Par cet adage latin, la formulation traditionnelle du principe de la légalité des poursuites pénales est posée : les juges ne peuvent retenir l'existence d'une infraction ni prononcer une peine sans s'appuyer sur une loi.
Dans un cas (un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 4 janvier 2006), la cour d'appel de Fort-de-France, le 24 février 2005, déclare Hugues C coupable d'agressions sexuelles aggravées commises durant les années 1987/1988, 1990/1991 et 1993/1994, et le condamne à l'interdiction définitive « d'exercer des fonctions rémunérées ou bénévoles le mettant en relation avec des mineurs ».
De là est formé un pourvoi en cassation par M.X, pour violation des articles 112-1 et 222-45, 3 du Code pénal.
Dans l'autre (un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 24 janvier 2006), il s'agit de la Cour d'Assises qui prononce à l'encontre de Chantal Y et Gilbert Z les peines de 3 mois d'emprisonnement avec sursis et de 10000 euros chacun. La cour d'appel confirme cet arrêt concernant la peine de 3 mois d'emprisonnement pour Chantal Y, en prenant en compte son absence d'antécédent judiciaire et sa personnalité.
Elle infirme l'arrêt de la Cour d'Assises concernant le montant de l'amende de Mme Y, qu'elle porte à la somme de 15000 euros.
Elle déclare Gilbert Z coupable d'exercice illégal de la profession d'agent sportif et le condamne à huit mois d'emprisonnement avec sursis (car elle estime que ses manœuvres sont à l'origine de toute la procédure), au paiement d'une amende de 15000 euros, et à l'interdiction d'exercer la profession d'agent de joueur pendant une durée de trois ans, avec sursis.
Au final, c'est la même question qui se pose pour les juges, celle de savoir la façon dont se manifeste le principe de légalité.
[...] Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date. Toutefois, les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes. Ainsi, en matière délictuelle[] on applique la loi en vigueur au jour du procès, c'est le principe d'application immédiate. Le refus de toute rétroactivité en droit pénal est une exigence fondamentale des systèmes libéraux. [...]
[...] La loi nouvelle doit se contenter de saisir les faits commis après son entrée en vigueur. Cette non-rétroactivité figure d'ailleurs en bonne place dans la Déclaration des Droits de l'Homme, dont l'article 8 précise que nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit Le principe de non-rétroactivité pénale, découlant du principe de légalité, a vocation à s'appliquer à toutes les nouvelles lois. Il n'est cependant impératif que pour les lois défavorables à l'accusé : ainsi, il y a application rétroactive des lois plus douces. [...]
[...] Au final, c'est la même question qui se pose pour les juges, celle de savoir la façon dont se manifeste le principe de légalité. Dans l'arrêt du 4 janvier 2006, la chambre criminelle de la Cour de cassation casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel, concernant uniquement la disposition ayant condamné Hugues X à l'interdiction d'exercer, à titre définitif, une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. Pour ce faire, elle avance que la Cour d'appel a bel et bien méconnu les articles cités dans les moyens, et en particulier le principe énoncé dans l'article 112-1 du Code pénal, selon lequel Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. [...]
[...] A propos des délits, le juge ne peut poursuivre un comportement qui n'est pas interdit par la loi. Ainsi, l'alinéa 1er de l'article 111-3 du Code pénal prévoit que nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi [ ] A l'inverse, le principe de la légalité n'impose pas au juge de poursuivre tous les forfaits accomplis et révélés. Le caractère automatique des poursuites a très vite été abandonné au profit du principe de l'opportunité des poursuites. [...]
[...] C'est cette dernière peine qui va poser problème au juge de la Cour de cassation : celui-ci casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel concernant la disposition d'interdiction professionnelle, au motif que le fait de prononcer d'autres peines ou mesures que celles prévues par la loi constitue un excès de pouvoir. Et c'est ce qu'a fait la Cour d'appel puisqu'elle a prononcé une interdiction d'exercer la profession d'agent sportif, peine complémentaire non prévue par l'article 15-2 de la loi du 16 juillet 1984. [...]
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