Arrêt de rejet rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation le 4 février 1985 relatif à l'infraction d'abus de biens sociaux dans un groupe de sociétés.
En l'espèce des dirigeants de plusieurs sociétés est poursuivi pour abus de biens sociaux pour avoir utilisé des fonds provenant de certaines de ces sociétés afin d'assurer la trésorerie des autres sociétés.
La Cour d'appel confirmant le jugement de première instance condamne le dirigeant pour délit d'abus de biens sociaux, car d'une part il n'existait aucun lien véritable entre les sociétés, d'autre part car les sociétés dont les fonds ont financé la trésorerie des autres n'avaient pas les capacités financières d'effectuer ces avances, ensuite parce qu'il n'existait aucune structure permettant de caractériser l'existence d'un groupe entre les sociétés et enfin car les financements ne traduisent pas le mise en oeuvre d'une politique financière et économique globale.
Un pourvoi en cassation est formé par les dirigeants au motif que les opération de financement étaient justifiées par l'existence d'un groupe structuré réunissant l'ensemble des sociétés et que l'existence de ce groupe empêche la qualification d'abus de biens sociaux pour ces opérations.
[...] L'intérêt de groupe est considéré par la Cour de cassation comme un fait justificatif de l'abus de biens sociaux mais celle-ci précise et limite cette possibilité de justifier cette infraction en se fondant aussi sur cette notion d'intérêt de groupe (II). I. Une justification du délit d'abus de biens sociaux par l'intérêt de groupe. Dans cet arrêt du 4 février 1985 la Chambre Criminelle de la Cour de cassation consacre la possibilité pour un dirigeant de sociétés d'échapper à sa responsabilité pénale pour délit d'abus de biens sociaux s'il existe un intérêt de groupe. [...]
[...] Quant à l'interdiction de rupture de l'équilibre des engagements, la Cour de cassation en fait dans cet arrêt une deuxième condition distincte de l'exigence de celle de contrepartie. La différence entre ces deux notions n'est pas évidente, la Cour de cassation n'apporte pas d'avantage de précision dans sa jurisprudence postérieure, elle élimine même cette difficulté en se référant plutôt uniquement à la contrepartie comme dans un arrêt de la Chambre criminelle du 19 décembre 2001 et déduisant soit de l'absence de celle-ci une absence d'équilibre soit de la présence réelle de celle-ci un équilibre des engagements. [...]
[...] La Chambre Criminelle de la Cour de cassation précise dans cet arrêt que le concours financier apporté par une société, à une autre du même groupe ne doit pas excéder les possibilités financières de celle qui en supporte la charge il ne doit pas dépasser un certain seuil d'atteinte à l'intérêt social de celle-ci. Cette obligation de proportion entre les capacités financières de la société sacrifiée et l'aide qu'elle apporte à une société du même groupe implique qu'elle soit capable de financer par elle-même cette aide au jour où elle l'accorde, le concours ne sera licite que s'il ne dépasse pas un certain seuil de possibilité de la société assistante. [...]
[...] L'intérêt de groupe se détache largement de l'intérêt personnel des dirigeants du groupe, les actions n'entrainant que la satisfaction de l'intérêt personne des dirigeants ne sont donc pas susceptibles de permettre à ces derniers d'échapper à une condamnation pour abus de biens sociaux. La reconnaissance de l'intérêt de groupe comme justification du délit d'abus de biens sociaux n'est donc possible que s'il existe réellement un groupe de sociétés et si la politique de chacune des sociétés permet l'accomplissement d'une politique commune. De plus toutes les opérations ne permettent pas selon la Cour de cassation d'échapper à une condamnation pour abus de biens sociaux, en effet les opérations litigieuses ne doivent pas être contraires à l'intérêt de groupe. II. [...]
[...] La Cour de cassation pour reconnaitre l'existence d'un groupe de sociétés, reprend implicitement le raisonnement des juges du fond ; elle se fonde notamment sur la structuration et le fait que le groupe doit reposer sur des bases non artificielles, ainsi il ne suffit pas pour une société de prendre des participations dans le capital d'une autre pour qu'elles forment un groupe, un simple jeu d'écriture ne permettant pas de constituer un véritable groupe de société. La base du groupe, c'est-à-dire les liens entre les sociétés membres de celui-ci, doit être réelle. Ainsi les activités doivent être conciliables et avoir une utilité d'ensemble pour le groupe par exemple, à défaut de quoi le groupe n'est qu'une fiction ne permettant pas la reconnaissance d'un intérêt de groupe justifiant l'abus de biens sociaux des dirigeant. Cet élément de reconnaissance permettra par la suite au groupe d'avoir une politique commune et un intérêt commun. [...]
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