L'arrêt Pessino c/ France de la Cour européenne des droits de l'Homme datant du 10 octobre 2006 relance le débat relatif à la rétroactivité des revirements de jurisprudence en droit français. En effet, traditionnellement, et comme l'a énoncé Portalis en 1810 « en matière criminelle, il faut des lois précises, point de jurisprudence ». En théorie, la jurisprudence ne faut qu'interpréter la loi et n'est pas source du droit. Cependant, en pratique, comme nous le montre cet arrêt, le juge se permet parfois de faire rétroagir ses revirements de jurisprudence. En l'espèce, il s'agissait d'une société qui, malgré un sursis à exécution de son permis de construire émis par le juge administratif, avait poursuivi les travaux de construction d'un immeuble. La Cour de cassation avait qualifié ces faits de délits, car ils constituaient une infraction pénale. Le requérant, gérant de la société, a allégué devant la Cour européenne des droits de l'Homme que les faits qui lui étaient reprochés ne « constituaient pas une infraction pénale au moment de leur commission et que seul un revirement de jurisprudence opéré par la Cour de cassation leur avait rétroactivement conféré le caractère de délit ».
[...] Royaume-Uni du 22 novembre 1995 par lesquels la Cour européenne des droits de l'Homme avait approuvé la rétroactivité de la qualification pénale de viol et tentative de viol de deux hommes sur leurs épouses car cette qualification était prévisible et ne violait pas le principe de la légalité pénale. [...]
[...] En l'espèce, la Cour européenne des droits de l'Homme expose que l'article 7 de la Convention a été violé car le droit pénal français n'incriminait pas la construction sur le fondement d'un permis ayant fait l'objet d'une décision de sursis à exécution En effet, la Cour de cassation devait, selon elle, s'assurer qu'il existait bien une loi incriminant ce comportement au moment où l'accusé à commis l'acte. Il faut que l'incrimination soit définie de manière claire et précise en plus d'être préalable à l'acte. [...]
[...] En effet, selon la Cour européenne des droits de l'Homme, il était difficile, voire impossible pour le requérant de prévoir le revirement de la Cour de cassation et donc de savoir qu'au moment où il les a commis, ses actes pouvaient entrainer une sanction pénale Ainsi, le juge, au nom de la sécurité juridique, ne peut appliquer son revirement de jurisprudence à des faits commis antérieurement à ce revirement. Cependant, il est clair que si ce revirement de jurisprudence est prévisible, il peut s'appliquer rétroactivement comme le manifestent les arrêts S.W. et C.R. [...]
[...] Le principe absolu de la légalité pénale ou la nécessité d'une prévisibilité au nom de la sécurité juridique Le principe de la légalité pénale exige que l'individu doive savoir quels actes peuvent engager sa responsabilité pénale. Ainsi, il doit exister une prévisibilité normative mais également une prévisibilité jurisprudentielle La prévisibilité normative ou l'exigence d'une loi préalable Le principe de la légalité pénale impose l'existence préalable d'une loi définissant et punissant l'infraction. Il est illustré par l'adage nullum crimem, nulla poena, sine lege Son but est d'assurer la sécurité juridique et de supprimer l'arbitraire. [...]
[...] Cette extension de l'interprétation par le juge français au-delà de la lettre du texte est sanctionnée par la Cour européenne des droits de l'Homme. Le principe de non rétroactivité des revirements de jurisprudence, corollaire du principe de la légalité pénale Le principe de non rétroactivité est déjà imposé pour les lois pénales nouvelles plus sévères ; étant inspiré par la lutte contre l'arbitraire et pas la sécurité juridique, ce principe de non rétroactivité devait légitimement s'appliquer aussi aux revirements de jurisprudence plus sévères. [...]
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