Un médecin ne prenant pas les mesures nécessaires permettant d'éviter un dommage à un de ses patients commet une faute caractérisée s'il expose ce patient à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer. Tel est l'apport de l'arrêt que nous avons à étudier, rendu le 23 février 2010 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.
Une patiente entre en clinique pour y subir une gastroplastie. Lors de l'intervention, le chirurgien procède, en plus de l'opération prévue, à l'ablation de la vésicule biliaire qui présentait un calcul. Suite à cette intervention, la patiente s'est plainte d'importantes douleurs abdominales et dorsales malgré le traitement à base de morphine qui lui était administré. Ces douleurs ont même conduit le chirurgien à demander l'avis d'un rhumatologue qui a ordonné des analyses dont le chirurgien n'a pas pris la peine de prendre connaissance. Malgré ces douleurs persistantes, la patiente a été autorisée à réintégrer son domicile 7 jours après l'opération. Le soir même, son médecin traitant a été appelé. Il a constaté un ictère et ordonné de nouvelles analyses biologiques. Le lendemain, dans la nuit, la patiente est décédée, semble-t-il, d'un choc septique.
Suite à une plainte de l'époux de la victime, le chirurgien a été présenté devant un Tribunal correctionnel pour homicide involontaire. Les juges du premier degré ont tout d'abord établi que la cause du décès de la patiente était vraisemblablement un choc septique, hypothèse soutenue par trois des quatre experts mandatés. Le Tribunal correctionnel a ensuite estimé que le prévenu avait commis une faute d'imprudence en laissant sortir sa patiente de la clinique alors qu'elle se plaignait d'importantes douleurs inexpliquées et que cette imprudence a été la cause du décès. Il a enfin estimé que, suite à ces conclusions, le prévenu devait être condamné.
Appel a été interjeté par le prévenu devant la Cour d'appel de Besançon afin d'obtenir l'annulation de la décision du Tribunal correctionnel et d'être reconnu non coupable d'homicide involontaire. La Cour d'appel estime que la grave négligence commise par le prévenu est en relation effective avec le décès puisqu'elle n'a pas permis de soigner à temps l'infection dont la patiente était atteinte et ce, même si la cause exacte et précise du décès n'est pas connue. Par conséquent, la Cour d'appel a décidé de condamner le prévenu à 18 mois d'emprisonnement avec sursis pour homicide involontaire. (...)
[...] Suite à une plainte de l'époux de la victime, le chirurgien a été présenté devant un Tribunal correctionnel pour homicide involontaire. Les juges du premier degré ont tout d'abord établi que la cause du décès de la patiente était vraisemblablement un choc septique, hypothèse soutenue par trois des quatre experts mandatés. Le Tribunal correctionnel a ensuite estimé que le prévenu avait commis une faute d'imprudence en laissant sortir sa patiente de la clinique alors qu'elle se plaignait d'importantes douleurs inexpliquées et que cette imprudence a été la cause du décès. [...]
[...] En effet, trois des quatre experts mandatés ont conclu à un décès par choc septique qui aurait pu être évité si le médecin avait pris la peine de regarder les résultats de sa patiente. Des éléments précédents, le Tribunal correctionnel déduit que la faute du médecin est en relation directe avec le décès de la patiente. Il détermine que le médecin a ainsi commis une faute simple d'imprudence. L'imprudence est la méconnaissance des règles de prudence. Autrement dit, il y a une prise de risques ou un défaut de précaution. [...]
[...] Cette dernière a été découverte par la Cour de cassation dans les agissements du médecin. Dès lors, rien ne l'empêchait de condamner le médecin, aboutissant ainsi au même résultat que les juges du fond mais avec un raisonnement différent. [...]
[...] Pour répondre à cette question, nous verrons tout d'abord que les juges du fond considèrent que le lien de causalité entre les actions du médecin et le dommage de la patiente est direct Nous verrons ensuite que pour la Cour de cassation, ce lien de causalité est indirect (II). I. Un lien de causalité direct pour les juges du fond. De façon assez similaire, le Tribunal correctionnel retient une faute d'imprudence comme cause du décès alors que la Cour d'appel retient une grave négligence en relation effective avec le décès A. [...]
[...] Cette perte de chance ayant elle-même conduit au décès, il y a donc bien un lien de causalité indirect mais néanmoins certain entre la faute du médecin et le décès de la patiente. En retenant un lien de causalité indirect, il suffisait ensuite à la Cour de cassation de découvrir une faute caractérisée dans les agissements du médecin, comme le suggérait la deuxième branche du pourvoir, pour que l'élément moral de l'homicide involontaire soit constitué. Ce faisant, la Cour de cassation a donc réussi à retourner les arguments du prévenu, présentés dans le moyen au pourvoi, contre lui-même. [...]
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