Incriminée à l'article 432-10 du Code pénal parmi les « manquements au devoir de probité », la concussion semble une infraction dotée de prime abord d'une portée limitée et ne devrait pas faire l'objet d'un contentieux très nourri. Néanmoins, de par un arrêt en date du 7 mai 2002, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a eu l'opportunité de préciser les contours de l'élément matériel du délit de concussion.
En l'espèce, les ayants droit d'un exploitant forestier, à la suite de son décès, avait requis à titre contentieux l'administration fiscale un dégrèvement d'imposition sur le revenu concernant les années 1980 à 1983. Ceux-ci se fondaient sur une décision rendue par une Cour d'appel correctionnelle du 28 juin 1994 ayant reconnu que la base de calcul du bénéfice imposable avait été surévaluée par le trésor public.
Sans doute excédés par la mauvaise foi déployée par l'administration suite à l'opposition d'une fin de non-recevoir de leur demande le 17 octobre 1994, les ayants cause décidèrent de mettre en mouvement l'action publique en citant directement le directeur des services fiscaux devant le tribunal correctionnel du chef de concussion. Appel avait été relevé du jugement rendu au premier degré.
[...] Elle fait fit de tous les arguments invoqués à l'appui de sa requête pour reprendre quasi in extenso les termes de l'arrêt rendu au second degré : le rejet d'une demande tendant au dégrèvement d'office d'impôts n'étant pas un acte consistant à recevoir, exiger, ou ordonner de percevoir ; [ ] d'où il suit que le moyen doit être écarté Notons que la Cour de cassation ne prend pas partie sur le point de savoir si l'impôt était indu ou non par le truchement d'un obier dictum, ce dans le but de conférer une portée plus importante à son attendu et fixer la jurisprudence ultérieure. Elle évite ainsi de manière astucieuse l'épineuse question de la compétence en matière fiscale, laquelle revient normalement de droit aux juges de l'ordre administration, et non à leurs homologues de l'ordre judiciaire. Elle ne départage pas les parties en présence sur ce point. La publication au bulletin accrédite d'autant plus la démarche solennelle déployée par la chambre criminelle, sans doute soucieuse d'asseoir durablement leur jurisprudence. [...]
[...] Nonobstant cette habileté, il convient de se demander si le refus ne revient pas, ne serait-ce qu'implicitement, au maintien de l'impôt, et donc à en exiger le paiement. b/une position objectivé : le non-dégrèvement équivaut au maintien de l'impôt Le principe retenu apparait sévère, et empreint d'un certain laxisme. En effet, les juges du quai de l'horloge semblent s'émanciper de la réalité de la situation, et manquer de pragmatisme pour jouer sur les mots : Certes, refuser de revoir le barème d'une imposition visiblement surévaluée ne correspond pas ipso facto à recevoir, exiger ou ordonner de percevoir un impôt indu ou excéder ce qui est dû. [...]
[...] Pour autant, si cette solution prise isolément apparait échapper à la critique, le contexte jurisprudentiel qui entoure la décision eut été propice à un élargissement du champ de l'élément matériel de ladite infraction a/Une interprétation stricte de la loi pénale : le respect de l'article 111- 4du code pénal comme frein a la répression Le principe retenu n'apparait pas choquant en soi, tant il se rattache à un principe phare de notre droit pénal : celui de l'interprétation stricte de la loi pénale, corolaire du principe de légalité posé notamment à l'article 111-4 de notre code pénal, qui dispose que La loi pénale est d'interprétation stricte Il est possible d'en trouver trace dans des textes de valeur supérieure dans la hiérarchie des normes telle que théorisée par Hans Kelsen, telle que l'article VII et VIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Il eut été critiquable de voir la chambre criminelle de procéder à une extension de l'élément matériel du délit de concussion, sous le couvert d'une attitude répressive. Il ne revient pas en effet au juge d'étendre des lois, votées par le parlement. [...]
[...] On ne peut que se féliciter d'une telle rigueur, clé de voute de notre droit pénal. Cette solution se justifie d'ailleurs pas la mauvaise foi émanant la partie civile, laquelle est par ailleurs condamnée à verser des dommages-intérêts à l'administration pour citation directe abusive en application de l'article 472 du code de procédure pénale. Néanmoins, si cette solution prise isolément apparait incontestable, elle n'en présente pas moins certaines limites, notamment lorsqu'on a là comparé à d'autres arrêts rendus en matière de concussion, mais également lorsque l'on pousse l'analogie à d'autres infractions. [...]
[...] Il est tout d'abord intéressant de relever que la concussion recouvre des réalités distinctes. L'alinéa deux de l'article relatif à ce délit vise le cas où il est accordé une exonération ou une franchise d'impôt en violation des textes légaux ou règlementaires. Étrangement, le refus d'accorder un dégrèvement n'entre pas dans le champ rationne matériau de la concussion, chose étonnante postulant un manque de parallélisme des formes puisque dans un cas accorder est visé, tandis que le refus d'accorder n'en relève pas. [...]
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