Commentaire d'arrêt, Chambre criminelle, Cour de cassation, 26 mars 2013, perte de chance de vie
La Cour de cassation dans un arrêt du 26 mars 2013 est venue préciser la notion de perte de chance de vie ainsi que confirmer l'importance de l'appréciation souveraine des faits par les juges notamment en matière délictuelle.
Une adolescente de 16 ans est éjectée d'une voiture suite à un accident. Elle décédera au moins une dizaine de minutes plus tard. Sa mère, en qualité d'héritière, poursuit le coupable d'homicide involontaire en réparation intégrale.
Les juges de 1res instances ont condamné l'homme à 10 000 € de dommages et intérêts du fait des souffrances physiques et morales endurées par l'adolescente ainsi que de la conscience de l'imminence de sa mort. L'homme a également été condamné à 201 712,06 € au titre du préjudice de la perte de chance de vie de la victime.
[...] Lucile Priou-Alibert, avocate, résume dans une revue Dalloz la solution à travers cette phrase : Par hypothèse, avant le décès, il n'y a pas perte de chance de vie puisque la vie, aussi fragile soit-elle, subsiste. Mais si on détache de cet arrêt, on remarque que dans le domaine médical, la perte de chance de survie est quant à elle indemnisée. Or, si on suit le même raisonnement que les juges, peut-on admettre de la patrimonialité de la perte de chance de survie, qui rentre donc dans le patrimoine avant le décès, et non pas de la perte de chance de vie qui suit pourtant le même raisonnement. [...]
[...] Cependant, la jurisprudence a consacré une hypothèse assez proche à cette perte de chance de vie qui est l'angoisse d'une mort imminente. Sauf que là, on voit bien la différence d'un point de vue temporel. L'angoisse d'une mort imminente permet d'indemniser la conscience de la victime avant sa mort, il y a donc eu un dommage certain, légitime et personnel. À l'inverse de la perte de chance de vie qui viserait à indemniser un hypothétique futur, tellement hypothétique qu'il n'en est pas certain. [...]
[...] La délimitation du préjudice réparable encadrée par les juges d'appel Les deux demandes de la famille vont donc être délimitées par les juges d'appel et confirmées par la Cour de cassation, que ce soit le pretium doloris ou bien la perte de chance de vie (B.). A. Le pretium doloris limité par l'appréciation souveraine des juges du fond Cet arrêt fait ressortir un des points importants du droit de la responsabilité qui est la place importante laissée à l'appréciation des juges et notamment en ce qu'elle concerne les faits ainsi que les montants de dommages et intérêts correspondant à la réparation de ces mêmes faits. [...]
[...] Cependant la Cour d'appel a débouté leur demande et la Cour de cassation a confirmé le jugement. La question relève ici de l'existence ou non d'une perte de chance de vie. Et plus précisément du moment où cette perte de chance de vie est née. La mère souhaite être indemnisée en qualité d'héritière de sa fille ; or pour cela il faut que la perte de chance de vie de sa fille soit née avant sa mort pour pouvoir être transmissible. [...]
[...] Dès lors aucun préjudice de son propre décès n'a pu naitre et donc la perte de chance de vie n'existe pas. Les juges d'appel ont donc délimité de manière plus stricte que les juges de première instance le préjudice réparable. II. La perte de chance de vie, un concept discuté par la doctrine Le concept de perte de chance de vie est très important dans l'arrêt puisqu'il est très ambigu à la fois en ses liens étroits avec l'angoisse d'une mort imminente mais également avec ses similarités avec la notion classique et surtout médicale de la perte de chance (B.). [...]
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