Par l'arrêt rapporté, la chambre criminelle de la Cour de cassation tranche, le 25 octobre 2000, une question relative au vol d'objets laissés dans une sépulture. En l'espèce, des fossoyeurs (employés d'un cimetière) avaient pour tâche, dans le cadre de leur mission de service public, de déblayer, grâce à une pelleteuse, les terrains communs sur lesquels se situaient des emplacements en fin de concession et des fosses communes afin de libérer ces emplacements. À cette occasion, le fatras extirpé était trié tandis que la terre était conservée et les ossements, débris et autres restes, détruits. Mais les prévenus, le plus souvent la veille de cette opération, dépassaient leurs fonctions puisqu'ils éventraient les cercueils, fouillaient et s'appropriaient les bijoux ou les prothèses dentaires en or des défunts, récupérés parmi les débris provenant du déblayage de concessions abandonnées et de fosses communes, afin de les conserver à titre personnel. Saisie de cette affaire, la Cour d'appel, par son arrêt du 16 février 2000 condamna ces individus, poursuivis sous la double qualification de vol et recel et violation de sépulture, à des peines d'emprisonnement aux motifs que : « que l'inhumation des défunts avec leurs bijoux et leurs prothèses dentaires démontre la volonté de leurs proches de ne pas les déposséder de ces objets dont ils étaient propriétaires ; qu'en l'absence de famille, aucun élément ne permet de présumer une renonciation des défunts à leur droit de propriété sur ces objets ; qu'en conséquence ceux-ci ne peuvent être considérés comme abandonnés, et sont dès lors toujours susceptibles d'être l'objet d'une soustraction frauduleuse au détriment des défunts, de leurs proches ou du domaine public.. » Celle-ci considérait alors que le défunt demeurait propriétaire de ces biens et, à propos des défunts décédés sans famille, qu'il était interdit de tenir ces biens comme des choses abandonnées.
[...] autrement dit, elle juge les prévenus responsables d'un délit de violation de sépulture. En effet, la Cour de cassation assimile le comportement des fossoyeurs à une forme d'atteinte au respect dû au mort : la violation de sépulture est visée à l'article 225-17, alinéa 2 du Code pénal, article restant muet sur la teneur des actes matériels constitutifs de violation. En dépit de ce silence dans la loi sur ce point (d'élément matériel), d'autres décisions nous éclairent sur cela jugeant le fait d'ouvrir un tombeau (CA Douai déc : Juris-Data 051444) ou de desceller une dalle mortuaire (Tribunal correctionnel de Villefranche mars 1949 : Gaz. [...]
[...] De plus, la Cour d'appel était parvenue à démontrer que les fossoyeurs avaient agi avec préméditation puisqu'ils recevaient une fiche de travail pour chaque exhumation. En conséquence, ceux-ci étaient libres pour décider du moment de leur opération consistant à ouvrir les tombeaux. D'ailleurs, ces derniers effectuaient cette ouverture généralement la veille de leur mission, ce qui leur laissait un temps nécessaire pour descendre dans les tombes et ainsi procéder à une recherche d'objets ''précieux''. Les actes des fossoyeurs étaient donc obligatoirement volontaires et leur réalisation ne pouvait que porter atteinte au respect dû aux morts. [...]
[...] La matérialité du délit se trouve dès lors caractérisée en présence de toute action physique ou toute voie de fait portant atteinte à une sépulture. Cela montre, en outre, la volonté répressive du juge pénal. En l'espèce, les fossoyeurs avaient sauté sur les cercueils puis les ont forcés avec un instrument pour y prendre les bijoux et les dents en or, ce qui était incontestablement constitutif de violation de sépulture, l'élément matériel étant suffisamment démontré. Concernant l'élément moral/psychologique, celui-ci, bien que n'étant pas non plus précisément défini par la loi, était lui aussi réuni, l'accomplissement de l'acte matériel impliquant obligatoirement un outrage au tombeau ou au monument, et donc l'intention délictueuse. [...]
[...] Dans cet arrêt, la question était de savoir si les proches, qui ont déposé les objets dans les caveaux, avaient la volonté de s'en déposséder et d'en déposséder le défunt. La question de l'identité du propriétaire de ces objets reste alors entière. On peut penser que ces objets laissés dans les caveaux sont en situation d'indivision entre les héritiers du défunt, ce qui semble cohérent avec les règles de droit pénal et de droit civil selon lesquelles le vol est punissable quand celui-ci s'effectue aux dépens d'une indivision et la sépulture, bien qu'étant hors du commerce, devient, suite au décès des défunts, un bien de famille appartenant indivisément aux membres de la famille et à leurs descendants. [...]
[...] Par son arrêt, la chambre criminelle de la cour de cassation dispose : Caractérise l'élément intentionnel des délits ( ) d'atteintes à l'intégrité des cadavres l'accomplissement volontaire d'un acte portant directement atteinte au respect dû aux morts. autrement dit, elle juge les prévenus responsables d'un délit d'atteinte à l'intégrité des cadavres. La cour d'appel avait d'ailleurs estimé que les prétendues trouvailles des prévenus ont nécessairement exigé de leur part une action libératrice des objets modifiant la structure des cadavres dont l'intégrité s'est trouvée, dès lors, atteinte ce qui caractérise indubitablement l'existence de l'élément matériel du délit d'atteinte à l'intégrité des cadavres, bien que celui-ci n'étant pas défini précisément par la loi, dans la mesure où, pour s'emparer des objets de valeur déposés sur les dépouilles mortelles, les prévenus avaient inévitablement dû modifier l'état initial de ces dernières. [...]
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