« Il n'y a ni crime ni délit lorsque l'homicide, les blessures et les coups étaient commandés par la nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d'autrui ». C'est en effet ce qui ressort de la lettre de l'article 328 du Code Pénal de 1810 -correspondant à l'actuel article 122-5 du nouveau Code Pénal- relatif à la cause objective de non-responsabilité qu'est la légitime défense, état dont bénéficie une personne qui commet un acte interdit par la loi pénale en raison de la nécessité de protéger sa personne ou celle d'autrui, voire des biens, contre une agression injuste -actuelle ou imminente- constituant un fait justificatif pour l'agressé si l'intensité de sa riposte est proportionnée à la gravité de l'attaque.
Ainsi aux termes de ces dispositions, la légitime défense semble se résumer à une réaction justifiée commandée par une agression injustifiée, telle qu'en fut victime Mme. Hardy. En effet, alors que cette dernière vaquait à ses occupations dans son domicile, un individu -M. Fremaux- se présente au dit domicile et tente de s'y introduire. Mme. Hardy s'efforce tant bien que mal à le repousser et lui referme finalement la porte de son appartement sur les doigts. M. Fremaux décide donc de porter plainte contre Mme. Hardy, l'assignant par la même occasion devant le tribunal correctionnel en demande de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle régie par l'article 1382 du Code Civil.
C'est dans ces conditions que cette dernière forme un pourvoi devant la chambre criminelle de la Cour de cassation ayant pour objet la question de savoir si les conséquences involontaires résultant d'une riposte volontaire à un comportement fautif sont de nature à pouvoir écarter l'état de légitime défense.
[...] Fremaux, celle- ci n'a pas agi spontanément mais en raison de l'attaque dont elle faisait l'objet ; elle recherchait juste à mettre hors d'état de nuire son assaillant comme le commande la légitime défense. En outre, la doctrine s'est soulevée contre l'amalgame fait par les Hauts Magistrats s'agissant de l'acte de riposte et de ses conséquences. En effet, si l'acte de riposte est bien volontaire, ses conséquences sont quant à elles inattendues par Mme. Hardy. Les juges ont donc motivé leur décision non pas au regard de l'acte lui-même mais par le biais de ses conséquences, ce qui revêt un caractère aléatoire. [...]
[...] Cette constatation du comportement fautif de M. Fremaux n'est étonnement pas remise en cause et sanctionnée par les Hauts Magistrats. En effet, ils avalisent expressément les constatations de la Cour d'Appel de Versailles, mais se contentent de prendre en compte le caractère non intentionnel des blessures infligées par Mme. Hardy à M. Fremaux pour motiver leur décision et de la sorte refuser l'état de légitime défense à cette dernière. Ainsi, cette ellipse volontaire des juges de la chambre criminelle de la Cour de Cassation dans leur solution est un des fondements sur lesquels se sont basés les auteurs pour critiquer avec véhémence ce principe jurisprudentiel d'incompatibilité de la légitime défense avec le caractère involontaire d'une infraction. [...]
[...] La solution de la chambre criminelle du 28 novembre 1991 fut donc l'objet de vives critiques qui ont semblé influer sur la Cour de Cassation, amorçant un revirement de jurisprudence. Vers la reconnaissance par la chambre criminelle de l'état de légitime défense appliqué aux infractions involontaires Pendant longtemps, la chambre criminelle -du fait de l'application sa jurisprudence Cousinet- a refusé de reconnaitre aux infractions non intentionnelles l'état de légitime défense. Cette tendance, appliquée très largement à certains litiges, fut l'objet de vives controverses par la doctrine qui conduisirent à l'amorçage d'un revirement de jurisprudence. [...]
[...] Cependant, cette solution revêt un caractère novateur -par rapport à l'arrêt originel- résidant dans la reconnaissance par les juges du fond du caractère fautif du comportement de M. Fremaux ayant commandé la réaction de la prévenue. Le caractère fautif du comportement de la victime souverainement reconnu par les juges du fond Alors que la jurisprudence Cousinet se bornait à reconnaitre si l'infraction était volontaire ou involontaire, l'arrêt de la chambre criminelle en date du 28 novembre 1991 va plus loin puisqu'il reconnait le pouvoir souverain des juges de la Cour d'Appel de Versailles dans la constatation par celle-ci du caractère fautif du comportement de M. [...]
[...] Hardy, l'assignant par la même occasion devant le tribunal correctionnel en demande de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle régie par l'article 1382 du Code Civil. Les juges de première instance accueillent les prétentions de ce dernier, condamnant ainsi Mme. Hardy pour blessures involontaires ayant entrainé une Incapacité Totale de Travail (I.T.T) inférieure à trois mois. Cette dernière décide d'interjeter appel devant la Cour d'Appel de Versailles au moyen duquel elle invoque la tentative de violation de son domicile par M. Fremaux et sa réaction commandée par la légitime défense. [...]
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