En l'espèce, l'état de santé de l'individu gardé à vue avait, dans un premier temps, été déclaré incompatible avec la mesure dont il faisait l'objet : celle-ci avait alors été prolongée et, à l'occasion d'un second examen médical, l'état de santé de l'individu avait finalement été déclaré compatible. L'individu demandait donc l'annulation des actes de procédure effectués à l'issue du premier examen médical constatant l'incompatibilité de son état de santé avec la poursuite de la garde à vue.
Ainsi, la Chambre criminelle avait à se prononcer sur l'application de l'article 63-3 du Code de procédure pénale au regard des dispositions des articles 171 et 802 de ce même code relatives à la nullité tirée de l'irrégularité d'un acte de procédure : l'incompatibilité constatée de l'état de santé de l'individu gardé à vue avec la poursuite de la mesure peut-elle être une cause de nullité des actes postérieurs ?
[...] En effet, la Cour considérait jusqu'alors que les dispositions de l'article 63-3 nécessitaient la démonstration d'un grief. Il en était ainsi en cas de mise en œuvre tardive de l'examen médical et de retard pris dans l'administration du traitement prescrit par le médecin (Cass.crim décembre 2008). La portée de cette décision est d'autant plus significative que malgré les dispositions contenues dans la circulaire d'application du 1er mars 1993, précisant succinctement que les interrogatoires ne peuvent se poursuivre lorsque le médecin déclare la mesure de garde à vue incompatible avec l'état de santé de la personne, aucune nullité n'était formulée pour sanctionner la méconnaissance d'une formalité relative au droit à l'examen médical. [...]
[...] Pourtant, la Chambre criminelle posait dès 1996 le principe selon lequel les droits mentionnés à l'article 63-1 ont un caractère d'ordre public et énonçait dans un arrêt du 30 avril 1996 que «tout retard injustifié dans la mise en oeuvre de cette obligation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne». Ainsi et en cassant cet arrêt, la Cour rappelle dans un premier temps que seule l'atteinte aux intérêts de la personne constitue un motif suffisant pour prononcer la nullité des actes irréguliers, pour ensuite reconnaître une nouvelle présomption de grief au gardé à vue dans le cadre de la mise en œuvre des droits contenus à l'article 63-1. [...]
[...] Une condition nécessaire mais pas suffisante cependant : la Cour devait en effet se prononcer sur l'existence d'un grief pour justifier la cassation de l'arrêt refusant d'accueillir la requête en annulation du gardé à vue. L'atteinte aux intérêts de la personne avait été écartée en l'espèce par les juges d'appel, position qui ne sera pas suivie par la Cour pour laquelle la poursuite de la garde à vue d'une personne dans des conditions qui sont, selon le constat médical, incompatibles avec son état de santé, porte nécessairement atteinte à ses intérêts Ainsi, la Cour ne se contente pas seulement de caractériser l'atteinte aux intérêts de la personne, elle reconnaît également une nouvelle présomption de grief au gardé à vue en employant l'expression atteinte nécessaire celle-ci découlant de la méconnaissance du certificat médical établi suite à l'exercice du droit prévu à l'article 63- 3 du Code de procédure pénale et concluant à l'inaptitude d'une personne à être gardée à vue dans les locaux de la police. [...]
[...] Aussi, cet arrêt, en plus d'instaurer une nouvelle cause de nullité, marque une volonté affichée de la Cour de renforcer les droits de la personne placée en garde à vue. [...]
[...] Chambre criminelle, Cour de cassation octobre 2009 - les droits de la personne gardée à vue L'article 63-3 du Code de procédure pénale dispose que toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois. Modifié par la loi du 24 août 1993, cet article s'inscrit dans une démarche générale du législateur visant à renforcer les droits de la personne gardée à vue. Cette protection renforcée passe par la notification de ses droits à l'individu, droits énoncés à l'article 63-1 du Code qui revêtent le caractère d'ordre public depuis 1996 et dont le non- respect est sanctionné par la nullité. [...]
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