« La vie est dans l'article 221-6, à travers son antithèse la mort, plus expressive que n'en serait l'affirmation positive. Mais elle est aussi positivement dans la rubrique des atteintes à la vie qui est spéciale à son article pratiquement unique, elle lui donne un sens, elle fait corps avec lui ». Ainsi le Doyen Carbonnier, consulté par la Cour de cassation avant son arrêt de 2001 (Ass. Plénière, 29 juin 2001) avait-il estimé que l'incrimination d'homicide involontaire pouvait et devait être étendue à l'enfant simplement conçu.
Or, en l'espèce, une femme (Mme X) enceinte de vingt-deux semaines est décédée dans un accident de la circulation impliquant un automobiliste ayant fait usage de stupéfiants. Ce dernier a alors été poursuivi pour homicide involontaire sur la personne de Mme X ainsi que sur l'enfant à naître, celui-ci ayant également succombé à l'accident.
La question posée à la Cour de cassation consiste à se demander si la qualification d'homicide involontaire peut-être retenue en cas de mort accidentelle de l'enfant à naître.
[...] Chambre criminelle de la Cour de cassation juin 2006 - le statut juridique de l'enfant à naître La vie est dans l'article 221-6, à travers son antithèse la mort, plus expressive que n'en serait l'affirmation positive. Mais elle est aussi positivement dans la rubrique des atteintes à la vie qui est spéciale à son article pratiquement unique, elle lui donne un sens, elle fait corps avec lui Ainsi le Doyen Carbonnier, consulté par la Cour de cassation avant son arrêt de 2001 (Ass. [...]
[...] France), n'a pas estimé que le refus de retenir la qualification d'homicide involontaire en cas de décès accidentel du fœtus était contraire au droit à la vie, protégé par l'article 2 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales. En l'absence de consensus au niveau européen, elle a ainsi décidé que le point de départ de la vie protégée relevait de l'appréciation des Etats, lesquels peuvent alors exclure ou non l'enfant à naître de cette protection. Rien n'imposait donc à la Chambre criminelle, en l'espèce, de faire évoluer sa jurisprudence et son interprétation de l'article 221-6 du Code pénal. [...]
[...] Dès lors, l'homicide involontaire devrait être retenu chaque fois que la victime était en vie au moment de l'atteinte, ce qui est le cas d'un enfant in utero. En adoptant une position contraire, la Cour de cassation semble opérer une confusion entre la notion d'être humain et celle de personne, laquelle renvoie au droit civil et suppose que l'intéressé soit né vivant et viable. Or, l'article précité ne se limite pas à une protection de la personne: l'homicide involontaire est incriminé parce qu'il porte atteinte à la vie, et non à la personnalité juridique. [...]
[...] Néanmoins, ces textes n'ont pas pour objet d'assurer une protection de la vie d'autrui, mais relèvent de considérations sanitaires. En outre, aucun d'entre eux ne concerne l'interruption involontaire de grossesse. Cette solution aboutit alors à l'absence de protection de la vie de l'enfant à naître lorsque son décès est provoqué accidentellement, et donc à l'impunité de conducteurs étant sous l'emprise de stupéfiants ou d'un état alcoolique et de médecins négligents. Une solution insatisfaisante La situation actuelle est fâcheuse, dans la mesure où l'on aboutira à des solutions différentes dans des affaires semblables. [...]
[...] La persistance des plaignants à exercer des recours ainsi que les décisions contraires rendues par certaines juridictions du fond, malgré la position claire et constante de la Chambre criminelle, font état d'une certaine insatisfaction et d'un sentiment d'espoir/aspiration quant à une évolution. Toutefois, en se référant aux textes particuliers sur le fœtus ou l'embryon et au principe d'interprétation stricte de la loi pénale, la Cour semble laisser au législateur le soin de se prononcer, lui suggérant ainsi la création d'une incrimination spécifique protégeant la vie de l'enfant à naître. Il s'agit notamment de la solution adoptée par l'Espagne et l'Italie, où les atteintes au fœtus sont pénalement sanctionnées au titre d'un délit particulier. [...]
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