« Infans conceptus pro nato habetur quoties de commodis ejus agitur » : l'enfant conçu est tenu pour déjà né lorsqu'il en va de ses intérêts.
Certes, cet adage, considéré comme un principe général du droit, permet de faire remonter rétroactivement la date de constitution de certains droits, en faveur de la personne, à la date de sa conception. Mais le plus souvent, celui-ci est subordonné à la naissance : c'est le cas pour l'homicide involontaire.
Cette question de l'homicide sur un fœtus engendre de grandes controverses faute d'un régime juridique précis du fœtus. Dès lors, le principe d'interprétation stricte de la loi pénale prévu par celui de légalité des délits et des peines n'est pas évident à respecter lorsque la volonté du législateur n'est elle-même pas clairement définie.
Le 10 octobre 2003 a lieu un accident de circulation entre les véhicules respectifs de Kévin Germon et de Florinda Salinas-Badas. Cette dernière décède, alors qu'elle était enceinte de 22 semaines. Le Ministère Public cite M. G à comparaître devant le tribunal correctionnel pour homicide involontaire sur la personne de Florinda S.B. et usage de produits stupéfiants ; M. X, mari de la victime, pour homicide involontaire sur enfant à naître.
M.G est condamné pour homicide involontaire sur F. S.B, mais est relaxé pour l'infraction commise sur l'enfant à naître.
[...] En l'espèce, au cours d'un accident de la circulation, une conductrice enceinte de 22 semaines a été tuée sur le coup ainsi que son enfant à naître. A la suite d'une demande de condamnation de l'auteur de l'accident pour homicide involontaire sur l'enfant à naître, la Cour d'appel, suivie par la Cour de cassation, rappelle un principe clamé de nombreuses fois dans la jurisprudence : l'incrimination d'homicide involontaire ne peut concerner l'enfant en voie de naître et ne peut donc s'appliquer qu'au cas de l'enfant né vivant. [...]
[...] Mais en ce qui concerne l'embryon, le droit à la vie est extrêmement précaire. D'ailleurs, l'article 16 du Code civil est très ambigu dans ses termes : comment interprète-t-on le commencement de la vie ? Pour l'embryon conçu in vivo, le droit français organise une protection très relative de la vie de cet embryon. Son droit à la vie est un droit suspensif, il est soumis à certaines conditions. Aujourd'hui le droit français tend à considérer embryon et fœtus comme un être humain potentiel : depuis 1975, comme nous le préciserons ultérieurement, le droit français prévoit que la grossesse de la mère peut être interrompue en cas de nécessité, le délai légal étant de 12 semaines d'aménorrhée. [...]
[...] Les enfants non viables peuvent être des enfants atteints de malformations gravissimes les empêchant de survivre ou des enfants qui naissent trop avant terme. Ils vont mourir très vite après l'accouchement. Ils n'accèdent pas à la personnalité juridique, et donc pas à la qualité d'héritier. Un enfant né vivant et viable accède à la personnalité juridique et donc à la qualité d'héritier, même s'il meurt après quatre jours. Mais le droit prend aussi en compte le vivant avant la naissance : il s'agit de l'enfant conçu, à naître. [...]
[...] Il s'agit de rappeler au juge que face à la loi pénale, sa liberté est limitée, il doit l'appliquer de la manière la plus stricte possible, il ne faut pas qu'il en fasse une interprétation trop large qui aboutirait à une sanction outre mesure. Permettre au juge de faire une interprétation trop souple de la loi pénale, c'est lui rendre la liberté d'édicter lui-même des dispositions répressives, au-delà du cadre de la loi. Cela ne signifie pas que le juge ne doit rien interpréter, qu'il est totalement lié par les mots. Il peut y avoir des textes obscurs qu'il faudra interpréter. [...]
[...] du chef d'homicide involontaire sur enfant à naître : ni l'intention du législateur ni le droit normatif interne et conventionnel n'autorise à exclure l'enfant à naître du droit au respect de l'être humain dès le commencement de sa vie, et par conséquent, de la protection pénale due à son intégrité physique. Avec les lois bioéthiques du 29 juillet 1994, la dignité humaine est apparue comme le ressort des droits de la personnalité. Le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat se sont également prononcés. D'après le Conseil constitutionnel, le 27 juillet 1994, "la dignité des personnes est au cœur de l'ordonnancement juridique français", c'est "un principe de valeur constitutionnelle". L'art.16 du Code civil fait référence à cette dignité humaine. [...]
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