La doctrine s'est interrogée récemment sur le point de savoir s'il peut y avoir abus de confiance lorsque le détournement porte sur des fonds dont la propriété a été transférée à l'auteur des faits. La Cour de cassation s'est prononcée par un arrêt de la Chambre criminelle du 14 février 2007.
En l'espèce, une banque avait consenti à l'une de ses clientes un prêt immobilier, le contrat prévoyant que les fonds devaient être affectés à la construction de deux villas sur un terrain dont l'emprunteuse disposait en vertu d'un bail emphytéotique. Suite au non-paiement de plusieurs mensualités, la déchéance du terme fut prononcée, et une saisie immobilière initiée par la banque révéla que l'emprunteuse n'avait pas respecté la destination des fonds prêtés, en utilisant une partie à des fins personnelles.
La Cour d'appel, dans un arrêt infirmatif, condamne l'emprunteuse pour abus de confiance, au motif que celle-ci a détourné les fonds prêtés en ne respectant pas la destination prévue contractuellement par les parties, l'abus de confiance étant corroboré par l'utilisation de manœuvres frauduleuses telles l'établissement par l'architecte de situations de travaux mensongères.
Le fait de ne pas respecter l'affectation contractuellement prévue de fonds prêtés peut-il constituer un abus de confiance ?
[...] Cour de cassation, Chambre criminelle février 2007 : peut-il y avoir abus de confiance lorsque le détournement porte sur des fonds dont la propriété a été transférée à l'auteur des faits ? La doctrine s'est interrogée récemment sur le point de savoir s'il peut y avoir abus de confiance lorsque le détournement porte sur des fonds dont la propriété a été transférée à l'auteur des faits. La Cour de cassation s'est prononcée par un arrêt de la Chambre criminelle du 14 février 2007. [...]
[...] Dès lors, le refus de restituer réalisera un détournement constitutif du délit d'abus de confiance s'il traduit la volonté de l'emprunteur de porter atteinte aux droits du créancier de l'obligation de restitution. [...]
[...] La condition d'affectation du bien, inapte à caractériser la précarité de la remise Dans l'arrêt du 14 février 2007, la remise de la propriété des fonds était faite dans le cadre d'un contrat qui prévoyait que les fonds devaient être affectés à une utilisation particulière. Or, l'article 314-1 du Code pénal prévoit que l'abus de confiance est constitué notamment lorsque la remise des fonds est faite dans le but d'en faire un usage déterminé Cette circonstance ne suffit cependant pas à caractériser l'existence d'un abus de confiance, car les charges d'utilisation n'impliquent pas le caractère précaire de la remise, précarité qui est déterminante ainsi que cela a été vu précédemment. [...]
[...] Le Code pénal de 1992 a supprimé cette liste de contrats, l'abus de confiance pouvant désormais prendre naissance dans le cadre de n'importe quel contrat, voire n'avoir même aucun fondement contractuel. L'article 314- 1 du Code pénal dispose en effet que l'abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé La nécessité d'une remise précaire se déduit donc à présent de la finalité de la remise, celle-ci emportant obligation de rendre, représenter ou faire un usage déterminé de la chose. [...]
[...] Le prêteur abandonne sa qualité de propriétaire des fonds contre celle, plus faible, de créancier de leur restitution, celle-ci se faisant non pas en nature mais en équivalent. Or, si la libre disposition des fonds par l'emprunteur exclut tout détournement par usage abusif, y compris lorsque les fonds ont reçu une affectation déterminée, en revanche, elle n'exclut pas l'hypothèse du détournement par défaut de restitution. Le délit d'abus de confiance n'exige pas, en effet, une volonté d'appropriation du bien par le bénéficiaire de la remise mais seulement la volonté de nier les droits d'autrui sur celui-ci. [...]
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