Les arrêts rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 11 mai 2004 apportent une précision quant à l'appréciation de l'erreur de droit, consacré à l'article 122-3 du Code pénal, comme moyen d'irresponsabilité pénale, ainsi que sur les conditions requises à l'exercice des droits de la défense.
Les deux affaires, dont il est question, ont des faits quasiment similaires.
Dans la première espèce, une employée soustrait par photocopie des documents appartenant à l'entreprise qui l'emploie, et ce, sans l'autorisation de l'entreprise. La prévenue avait eu accès à ces derniers de par l'exercice de ses fonctions. L'employée avait ensuite utilisé lesdits documents lors d'une instance prud'homale, l'opposant à son employeur, qui déposa une plainte de vol contre la prévenue.
Dans la seconde espèce, une employée soustrait, elle aussi, sans l'autorisation de son employeur, des documents lui appartenant, afin d'assurer sa défense lors du procès l'opposant à son entreprise. L'employée, experte-comptable, avait eu accès aux documents litigieux grâce à ses fonctions au sein de la société. Cette dernière déposa une plainte de vol contre son employée.
[...] À cette question, la Cour de cassation répond d'abord par la négative dans la première espèce, puis changera de point de vue dans la seconde espèce dans laquelle elle admettra la licéité de ladite soustraction de documents. Il est alors intéressant de comparer ces deux arrêts de Cassation afin de déterminer les faits ayant conduit à cette double solution. Ainsi, nous verrons dans une première partie que les chambres refusent de consacrer la divergence de jurisprudence comme fait justificatif de l'erreur sur le droit. [...]
[...] Une jurisprudence constante dans la continuité des arrêts du 11 mai 2004 - La chambre criminelle de la Cour de cassation, le 4 janvier 2001 et le 15 février 2005, rend deux arrêts affirmant que la soustraction de documents appartenant à une société, par l'un de ses salariés, en vue d'établir un moyen de défense de ce dernier dans un procès l'opposant à son employeur, peut être une cause d'irresponsabilité pénale. - Confirmation que l'incertitude juridique ne constitue pas un fait justificatif d'exonération de responsabilité pénale. - Critique : En principe l'erreur de droit est invocable à partir du moment où elle émane d'une autorité administrative ou judiciaire. [...]
[...] Toutefois, la Cour tempère cette décision en reprochant à la Cour d'Appel de ne pas avoir recherché si les documents dont il était question étaient strictement nécessaires à l'exercice des droits de la défense. Dans la seconde espèce, la Cour relaxe la prévenue au motif que celle-ci a apporté la preuve que les documents soustraits avaient été nécessaires à l'exercice de sa défense. A. L'exercice de la défense, fait justificatif de l'irresponsabilité pénale, dégagé par la Cour de cassation - Les deux arrêts semblent admettre que l'exercice des droits de la défense peut être un justificatif d'irresponsabilité pénale. [...]
[...] - La divergence de jurisprudences divergentes entre différentes chambres de la Cour de cassation ne constitue pas une erreur invincible. (Erreur invincible étant une erreur inévitable et excusable.) -Une solution assez sévère, car il peut sembler légitime que la prévenue se soit fondée sur cette divergence de jurisprudence pour invoquer l'erreur. En effet, la Cour d'Appel de Paris, dans son arrêt du 9 novembre 2000, conformément à l'article 6 de la CEDH, considère que la divergence de jurisprudence entre chambres sociale et criminelle rend la règle de droit incertaine et peut donc être une cause d'erreur sur le droit. [...]
[...] La contrariété des décisions de deux chambres de la Cour de cassation ne vaut pas cause d'irresponsabilité pénale, conformément à l'article 122-3 du Code pénal. Dans la première espèce, la prévenue en appelle à l'erreur sur droit afin d'être reconnu pénalement irresponsable du délit de vol qui lui est reproché. Pour invoquer l'erreur sur le droit, celle-ci se fonde sur la divergence de jurisprudence de deux chambres de la Cour de cassation. Or les juges décideront d'écarter cette contradiction de jurisprudence des faits justificatifs de l'erreur sur le droit. [...]
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