En l'espèce, le 9 février 2003, une femme se blesse en tombant de sa terrasse. Elle est admise en urgence à l'hôpital Saint-Roch le lendemain. Plus tard, alors que le processus vital de la patiente est enclenché, le médecin sénior titulaire de ce service s'est absenté sur autorisation de son supérieur hiérarchique pour des raisons de santé. Le règlement intérieur imposait pourtant la présence d'un médecin sénior dans chaque service et l'accueil par ce médecin de chaque nouveau patient. C'est donc un interne qui se charge de la patiente. Celui-ci ne fera pas appel à un médecin sénior dont la présence a été constatée par lui à proximité. La patiente décède des conséquences d'un hémopneumothorax le 12 février 2003.
Le procureur de la République a attaqué le Centre hospitalier universitaire et des membres de l'hôpital pour les voir condamner pour homicide involontaire. Le tribunal correctionnel a estimé que les conditions pour qualifier l'infraction définie à l'article 221-6 du Code pénal n'étaient pas réunies en l'espèce, notamment concernant l'hôpital qui ne pouvait être condamné comme personne morale tant qu'une personne physique agissant comme organe ou représentant pour son compte n'avait pas été condamnée. Le procureur de la République et les parties civiles ont interjeté appel de ce jugement. La Cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé cette décision dans un arrêt du 8 décembre 2008 déclarant le Centre hospitalier universitaire coupable d'homicide involontaire. L'hôpital forme alors un pourvoi en cassation.
L'arrêt attaqué affirme tout d'abord que la culpabilité d'une personne morale n'est pas subordonnée à la condamnation de personnes physiques agissant pour son compte comme organe ou représentant. Ainsi, peu importe la condamnation ou non des membres de l'hôpital. Par ailleurs, la Cour d'appel affirme l'existence d'une défaillance manifeste du service de l'accueil de l'hôpital. Cette erreur consiste en l'absence de médecin sénior dans le service alors que le règlement intérieur impose la présence d'un médecin sénior dans chaque service et l'accueil de chaque patient par un médecin sénior. L'absence de médecin sénior aurait empêché de prendre les mesures appropriées pour sauver la vie de la patiente à son arrivée mais surtout à sa sortie du service des radiographies alors que son processus vital était enclenché. (...)
[...] En effet, cette indépendance dans la responsabilité de la personne morale pose problème. A travers la responsabilité pénale des personnes morales, sont sanctionnés les agissements de représentants ou organes qui agissent pour le compte de la personne morale. C'est oublier que la personne morale est nécessairement dirigée par des personnes physiques et c'est donner une volonté propre à la personne morale, volonté qu'elle ne peut avoir. C'est l'indépendance de la responsabilité qui pose en fait problème puisque la personne morale ne sera que ce qu'en feront les personnes physiques qui la dirige. [...]
[...] Le constat de l'indépendance de la responsabilité pénale des personnes morales amène avec lui les limites de la mise en œuvre de cette responsabilité. II- La complexe qualification de l'infraction Le manquement au règlement intérieur aurait été la cause de la mort de la patiente Pourtant ce sont bien des personnes physiques qui ont été à la base de ce manquement, de même que les blessures de la patiente ne sont pas imputables à l'hôpital Un lien de causalité certain mais indirect La conclusion de la Cour d'appel, que la Cour de cassation adopte, est que la défaillance manifeste dans l'organisation du service est la cause indirecte et certaine du décès. [...]
[...] Celui-ci impose la séniorisation de chaque service. Le fonctionnement normal de l'hôpital n'est donc pas remis en cause c'est l'application du règlement intérieur par les membres du personnel qui l'est. Ainsi, les responsables de l'homicide involontaire (si homicide involontaire il y sont des personnes physiques qui ont agi pour leurs intérêts (moins de charge de travail par exemple) et non pour le compte de l'hôpital qu'ils ne servaient nullement. L'application du droit écrit faite par la Cour de cassation semble, sous d'autres aspects encore, discutable. [...]
[...] L'indifférence de la condamnation de personnes physiques La Cour de cassation rappelle et suit la position de la Cour d'appel par rapport à la décision prise en première instance. Les juges du second degré avaient affirmé que la condamnation de personnes physiques agissant pour son compte comme organe ou représentant n'était pas une condition préalable à la déclaration de culpabilité de la personne morale. Sur ce point, l'article 121-2 du Code pénal dispose d'ailleurs que la responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques. [...]
[...] Dans un arrêt du 2 décembre 1997, la Chambre criminelle avait rappelé que la personne morale était pénalement responsable si l'infraction avait été commise pour son compte et par ses organes ou représentants. Il n'y a ici aucune trace d'une condition réclamant la condamnation desdits organes ou représentants. Dans un arrêt du 12 décembre 2000, la Chambre criminelle de la Cour de cassation écarte la condition selon laquelle l'organe ou le représentant devrait être condamné. La responsabilité pénale des personnes morales ne connaît ainsi que deux conditions à la mise en œuvre de sa responsabilité. [...]
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