La structure fiscale française est rendue complexe en raison de l'extrême diversité des prélèvements
existants. Cette complexité est renforcée par la difficulté de leur identification comme l'illustre l'exemple des rémunérations et redevances pour service rendu.
Le terme de « rémunération pour service rendu » a été introduit dans l'ordonnance no 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances à coté de celui de « redevance ». Si cette ordonnance semble distinguer ces deux notions, en précisant que les ressources permanentes de l'État comprennent « les impôt ainsi que le produit des amendes, les
rémunérations de services rendus, redevance. . . », la jurisprudence et la doctrine les assimilent
en l'absence de critère de distinction.
Les rémunérations et redevances pour service rendu sont définies généralement comme un prélèvement à caractère non fiscal « demandé à des usagers en vue de couvrir les charges d'un service public, et qui trouve sa contrepartie directe dans des prestations fournies par le service ou dans l'institution de l'ouvrage ».
Ayant un caractère non fiscal, les redevances pour service rendu ne relèvent pas de la catégorie des « impositions de toutes natures » visée à l'article 34 de la Constitution. Cette exclusion est d'ailleurs nettement affirmée par le Conseil constitutionnel qui, pour définir l'imposition de manière négative, énonce que « constituent des impôts les prélèvements obligatoires qui ne sont pas des taxes parafiscales, ni des cotisations sociales, ni des redevances ».
Cette absence de caractère fiscal entraîne des conséquences importantes sur le régime des redevances. En effet, contrairement à la taxe, qui ne peut être créée que par la loi, la création d'une redevance relève du pouvoir règlementaire. Cette solution, déjà adoptée avant la Constitution de 1958 3, a été consacrée par l'ordonnance du 2 janvier 1959 en son article 5 et rappelée à plusieurs reprises par le Conseil constitutionnel 4.
Toutefois, un risque de confusion de régime existe du fait du rapprochement entre la redevance pour service rendu et la taxe qui entre, selon le Conseil constitutionnel, dans la catégorie des impositions visées à l'article 34 de la Constitution 5. En effet, la taxe peut être définie de manière large comme un prélèvement perçu en contrepartie de l'utilisation d'un service public ou d'un ouvrage public, tout comme la redevance.
Pour distinguer ces deux types de prélèvements, les jurisprudences concordantes du Conseil d'État et du Conseil constitutionnel, se fondent essentiellement sur l'idée selon laquelle la redevance est la contrepartie financière acquitée par l'usager du service public à raison des prestations dont il a bénéficié. Si ce critère, dit de l'équivalence constitue le critère déterminant en jurisprudence, il convient de s'interroger sur son effectivité.
En effet, ce critère, constituant l'un des critères traditionnels d'identification de la redevance pour service rendu (1), est considérablement assoupli par jurisprudence récente qui pose un nouveau principe d'appréciation de l'équivalence (2).
[...] Si la redevance doit être intégralement affecté à un service ou à un ouvrage public, ceux-ci peuvent être accessibles ou en cours de réalisation. S'il faut une contrepartie, celle-ci ne doit plus obligatoirement être directe et immédiate. Ainsi, si la jurisprudence avait déjà admis dans de nombreux cas la fixation d'un montant supérieur au coût du service, l'arrêt du 16 juillet 2007 vient donner une portée générale à cette évolution Les implications de l'extension progressive de la notion de redevance En assouplissant le contenu du principe de l'équivalence financière, la jurisprudence élargit considérablement le champ d'application des règles applicables aux redevances pour service 2. [...]
[...] L A NOUVELLE APPRÉCIATION DU RESPECT DE L' ÉQUIVA LENCE En effet, si dans son considérant de principe, le Conseil d'État confirme que pour être légalement établie [ . ] une redevance pour service rendu doit essentiellement trouver sa contrepartie directe dans la valeur de la prestation ou du service il poursuit en énonçant que si l'objet du paiement que l'administration peut réclamer à ce titre est en principe de couvrir les charges du service public, il n'en résulte pas nécessairement que le montant de la redevance ne puisse exéder le coût de la prestation fournie En d'autres termes, la règle d'équivalence ne se mesure plus à partir du seul coût de revient du service rendu, mais à partir de la valeur économique du service rendu par son bénéficiaire, intégrant ainsi les avantages de toute nature qui lui sont octroyés. [...]
[...] Le fait générateur de la redevance est ainsi constitué par la réalisation du service, et le redevable de celle-ci est l'usager. N'étant payé que par l'usager qui utilise effectivement le service, on peut dire que la redevance présente un caractère facultatif. Toutefois, ce caractère n'exprime pas nécessairement une possibilité de refus des prestations du service. En effet, il peut exister une obligation de recourir au service ou à l'ouvrage public, comme l'illustre l'obligation d'adhérer à une association syndicale autorisée, sans pour autant faire perdre à la contribution son caractère de redevance CE 6 mars 1970, Augé 8. [...]
[...] Ainsi, dans un arrêt du Conseil d'État du 30 septembre l'utilisation de la redevance pour organiser un système de subventions croisées a été condamnée. En effet, en l'espèce, les délibérations du conseil municipal adoptant les tarifs de l'eau ont été jugés illégales dès lors que les augmentations décidées étaient notamment motivées par le souhait qu'une partie des redevances puisse être reversée au budget général de la ville afin de couvrir des charges étrangères à la mission du service des eaux. [...]
[...] Les redevances dont le montant excédaient le coût du service rendu sont jugées illégales Pour fixer le montant du coût du service, l'administration s'est réservée le droit de choisir une méthode de mesure du coût. À titre d'exemple, l'administration peut retenir la méthode du coût marginal, qui consiste à retenir le seul supplément de coût résultant d'une augmentation unitaire de la production, ou celle du coût complet, par laquelle on intègre l'ensemble des coûts fixes et variables. Toutefois, le juge imposait à l'administration de justifier l'existence des dépenses entrant dans le calcul de la redevance. [...]
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