Le champ d'application de la TVA est défini dans l'article 256 du CGI. Il concerne les livraisons de biens et les prestations de services à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel. Cette définition tend ainsi à s'interroger sur les limites du champ d'application de la TVA à savoir si le versement d'une indemnité constitue une opération entrant dans le champ de la TVA.
Par un contrat signé le 17 avril 1985, la société LTIS, devenue Polyclad Europe, dont le siège est à Nantes, s'est engagée à fournir à la société IBM Deutschland, dont le siège est à Stuttgart, des circuits imprimés conformes aux spécifications fixées par son client. Il était prévu que IBM commanderait 1000 unités par jour ouvrable, soit sur la période de deux ans que couvrait le contrat de 460 000 unités. Le contrat précisait toutefois que, dans l'hypothèse où IBM cesserait ses achats, il verserait à LTIS une indemnité dont le montant était fixé par les stipulations du contrat, le maximum fixé à 6,1 millions de francs étant stipulé pour l'hypothèse où aucun article ne serait livré. Cet événement s'étant réalisé, avant toute commande, la société IBM Deutschland a versé à la requérante l'indemnité conventionnelle, diminuée de la valeur des équipements dont la société LTIS pouvait conserver l'usage, soit une somme de 5 000 000 francs versée au cours de 1986.
A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a indiqué à la société LTIS qu'elle entendait soumettre à la TVA l'indemnité ainsi perçue. Les rappels de la TVA correspondants ont été mis en recouvrement le 5 mars 1990.
Les conclusions en décharge de la société ayant été rejetées par le Tribunal administratif de Nantes puis par la Cour d'appel de la même ville, la société Polyclad Europe a formé une requête aux fins de réduction du complément de taxes sur la valeur ajoutée. A titre principal, elle soutient que l'indemnité versée par IBM a le caractère de dommages et intérêts pour en déduire qu'elle ne constitue la rémunération d'aucune livraison de biens ni d'aucune prestation de services fournies par le créancier du débiteur. A titre subsidiaire, elle défendait que l'indemnité devait suivre le sort fiscal du chiffre d'affaires à l'exportation dont le contrat était l'objet, elle demandait ainsi le bénéfice de l'exonération prévue au I de l'article 262 du CGI qui exonérait de TVA les exportations de biens meubles corporels et les prestations de services qui leur sont directement liées.
En l'espèce, le Conseil d'Etat a rejeté les demandes de la requérante. Nous nous attacherons essentiellement à la requête principale de la société Polyclad Europe. En effet, concernant la requête subsidiaire, le Conseil d'Etat a considéré qu'en l'absence de toute exportation, aucune prestation de services concourant à la réalisation matérielle d'une livraison de biens à un acheteur établi à l'étranger n'était intervenue et a donc débouté la requérante.
Une indemnité de résiliation d'un contrat n'ayant reçu aucune exécution doit-elle être soumise à la TVA ?
Mots clés: non-imposition, indemnités, TVA, jurisprudence, CJCE, CE, décision, exonération, commentaire d'arrêt, TD, fiche
[...] Les conclusions en décharge de la société ayant été rejetées par le Tribunal administratif de Nantes puis par la Cour d'appel de la même ville, la société Polyclad Europe a formé une requête aux fins de réduction du complément de taxes sur la valeur ajoutée. A titre principal, elle soutient que l'indemnité versée par IBM a le caractère de dommages et intérêts pour en déduire qu'elle ne constitue la rémunération d'aucune livraison de biens ni d'aucune prestation de services fournie par le créancier du débiteur. [...]
[...] En l'espèce, le Conseil d'Etat a rejeté les demandes de la requérante. Nous nous attacherons essentiellement à la requête principale de la société Polyclad Europe. En effet, concernant la requête subsidiaire, le Conseil d'Etat a considéré qu'en l'absence de toute exportation, aucune prestation de services concourant à la réalisation matérielle d'une livraison de biens à un acheteur établi à l'étranger n'était intervenue et a donc débouté la requérante. Une indemnité de résiliation d'un contrat n'ayant reçu aucune exécution doit-elle être soumise à TVA ? [...]
[...] Selon la solution retenue dans l'affaire Polyclad, toute indemnité de résiliation prévue au contrat devrait être imposable à la TVA, puisque par essence tout contrat se définit par des engagements réciproques, équilibrés, auxquels la résiliation généralement accompagnée d'une indemnité destinée à couvrir les préjudices subis à cette occasion met fin. Monsieur Renaud Jouffroy, dans sa note concernant l'arrêt Polyclad, critique cependant cette solution qu'il ne considère pas pleinement satisfaisante. En effet, la notion de prestation de service suppose la volonté du prestataire de fournir un service. Or, lorsqu'une résiliation de contrat est décidée par une des parties, la résiliation empêche l'exécution contractuelle et aucun service n'est réellement rendu. [...]
[...] Le Conseil d'Etat pour aboutir à une telle solution s'est donc posé la question de savoir si l'indemnité versée devait être regardée comme la rémunération d'un service rendu ou comme la réparation d'un préjudice. En l'espèce, le contrat conclu entre la société Polyclad Europe et la société IBM comportait l'obligation pour la société Polyclad Europe de se doter des investissements nécessaires pour fournir à sa cliente les composants dont elle avait besoin. La société IBM ne s'était cependant pas pour autant engagée à acheter une quantité minimale de produits. [...]
[...] Cette nouvelle jurisprudence amorcée implicitement par la décision du Conseil d'Etat du 29 juillet 1998, SNC Géfiroute constitue une nouvelle solution (II). II La portée de la décision Polyclad Europe adoptée par le Conseil d'Etat La décision rendue en l'espèce rompt avec la jurisprudence antérieure et semble se conformer au droit européen Cette solution a donc une portée non négligeable concernant le sort de toute indemnité de résiliation prévue au contrat La solution adoptée dans l'arrêt Polyclad Europe : un abandon définitif de la jurisprudence Sicli En l'espèce, cette décision est novatrice puisque le Conseil d'Etat semble abandonner la jurisprudence dégagée par l'arrêt CE, Sicli En application de cette jurisprudence, les sommes compensant des préjudices commerciaux courants et correspondant à des aléas normaux, inhérents à la profession exercée par la société étaient soumises à la TVA. [...]
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