Afin de garantir le bon fonctionnement des sociétés, il est essentiel de préserver la sécurité juridique. Cela se traduit pour chaque citoyen, par le fait qu'il soit en mesure de prévoir de manière précise et à l'avance, les conséquences de ses actes par rapport aux règles de droit qui s'imposent à lui. Ayant connaissance de ces règles, il sera à même de s'épanouir pleinement dans la société en prenant la mesure de tous les droits et devoirs qui lui sont accordés.
On comprend dès lors que la sécurité juridique est un principe essentiel qu'il convient de faire prévaloir. Elle implique effectivement que la norme juridique soit claire et prévisible afin de garantir une stabilité. De fait, les normes rétroactives, par les ambiguïtés qu'elles introduisent, font peser une menace sur cette stabilité. Ces dernières années, le législateur français a eu recours à plusieurs reprises à des dispositions rétroactives qui ont eu pour effet de faire naître chez les citoyens un sentiment d'insécurité.
En matière fiscale, la rétroactivité des normes prend deux aspects relativement différents.
Le premier se traduit par l'application de la loi de finances de l'année en cours à l'impôt sur les sociétés et à l'impôt sur le revenu. Brièvement et concrètement, le fait générateur de l'impôt est fixé, pour l'impôt sur le revenu, à l'expiration de l'année civile, et pour l'impôt sur les sociétés, à la clôture de l'exercice, qui s'opère en général le 31 décembre. Il en résulte que la loi de finances pour l'année 2007, votée à la fin du mois de décembre 2006, s'appliquera en principe aux revenus et aux bénéfices réalisés pendant l'année 2006. Le contribuable peut donc être gêné de ne pas savoir exactement à quel taux les opérations auxquelles il se livre seront taxées.
Le second aspect, sur lequel il convient de s'attarder concerne les mesures de validation votées chaque année par le Parlement. Les lois de validation font depuis plusieurs années l'objet d'un débat nourri. Presque toutes les lois de finances comportent des dispositions de validation. Ces mesures sont deux types :
Les dispositions de validation à proprement parler par lesquelles le législateur valide pour le passé des impositions qui, si leur légalité venait à être contestée devant les juges, feraient l'objet d'une décision de décharge, soit du fait de leur absence de base juridique, soit en raison des irrégularités ayant affecté la procédure d'imposition. Il a ainsi été nécessaire, au début de l'année 2002, de valider la perception de l'impôt foncier sur les propriétés bâties en Polynésie française, qui, en raison d'un incident juridique, était dépourvue de base textuelle solide.
En définitive, les lois de validation confèrent un caractère régulier à un acte administratif qui lui est irrégulier.
Les dispositions interprétatives par lesquelles le législateur précise le sens qu'il fallait donner à un texte, en général pour faire échec à une interprétation contraire de la jurisprudence.
Dans les deux cas, la loi agit de manière rétroactive : elle modifie la règle applicable dans le passé. Le problème est donc que la rétroactivité remet en cause une situation établie et de fait, vient insinuer une instabilité qui contribue à fragiliser notre système juridique et donc la confiance des citoyens en l'État de droit.
Par le biais de la rétroactivité, on assiste aussi à une ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges. La rétroactivité de la loi fait ainsi peser une menace sur l'équilibre des pouvoirs.
Ainsi, ces dernières années, le recours fréquent à des dispositions fiscales rétroactives a fait naître un sentiment d'insécurité juridique chez nos concitoyens. En droit français, cette sécurité juridique n'est pas garantie. L'article 2 du code civil prévoit certes que " La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif ". Mais cette disposition n'a qu'une valeur législative qui s'impose au juge et non au législateur. La jurisprudence de la Cour de cassation et celle du Conseil d'État se montre particulièrement vigilante dans l'interprétation du droit. Le Conseil constitutionnel lui-même s'est efforcé de fixer des limites à la rétroactivité en matière fiscale : « la rétroactivité du droit ne se présume pas et les lois rétroactives sont d'interprétation stricte ». Pour autant, aucune norme constitutionnelle ne fait référence au principe de non rétroactivité.
La rétroactivité fiscale semble donc être une exception française supplémentaire, au moment où la concurrence fiscale fait rage et où se pose de manière accrue la question de l'attractivité de notre territoire. Cependant, la rétroactivité des lois fiscales n'est pas applicable sans aucune restriction par le législateur. En effet, sous la pression de nos voisins européens et plus particulièrement des juridictions européennes, la rétroactivité a été largement encadrée. C'est pourquoi dans un premier temps, nous nous intéresserons dans le détail aux raisons de la condamnation des lois fiscales rétroactives (I), puis nous verrons que progressivement les juridictions françaises ont encadré les lois fiscales rétroactives (II).
[...] Les dispositions interprétatives par lesquelles le législateur précise le sens qu'il fallait donner à un texte, en général pour faire échec à une interprétation contraire de la jurisprudence. Dans les deux cas, la loi agit de manière rétroactive : elle modifie la règle applicable dans le passé. Le problème est donc que la rétroactivité remet en cause une situation établie et de fait, vient insinuer une instabilité qui contribue à fragiliser notre système juridique et donc la confiance des citoyens en l'État de droit. [...]
[...] La situation des contribuables est également précaire en ce sens que la loi fiscale rétroactive entraîne nécessairement une rupture du principe de l'égalité devant l'impôt. En effet, la rétroactivité se heurte au principe de l'autorité de la chose jugée selon le Conseil Constitutionnel (DC 80-119 du 22 juillet 1980) : la loi rétroactive n'a pas vocation à remettre en cause une situation juridique ayant acquis l'autorité de la chose jugée. Cette autorité de la chose jugée est la force reconnue à une décision de justice. [...]
[...] De plus, on peut constater que si la France continue a prendre des lois fiscales rétroactives elle le fait de façon limitée. En effet, le Gouvernement français a pris l'engagement dans le cadre du programme d'ensemble Trente mesures pour améliorer les relations entre les contribuables et l'administration fiscale de ne plus recourir, en matière fiscale, à des mesures dont la portée rétroactive pénaliserait le contribuable de bonne foi. De plus, le recours aux lois de validation est strictement limité aux cas où l'intérêt général l'exige et lorsque la mesure apparaît proportionnée aux enjeux. [...]
[...] La condamnation de la loi fiscale rétroactive Afin de garantir le bon fonctionnement des sociétés, il est essentiel de préserver la sécurité juridique. Cela se traduit pour chaque citoyen, par le fait qu'il soit en mesure de prévoir de manière précise et à l'avance, les conséquences de ses actes par rapport aux règles de droit qui s'imposent à lui. Ayant connaissance de ces règles, il sera à même de s'épanouir pleinement dans la société en prenant la mesure de tous les droits et devoirs qui lui sont accordés. [...]
[...] Aussi peut-on se demander au travers de l'évolution récente si les lois fiscales rétroactives ne sont pas sans avenir. B D'une restriction conforme à la jurisprudence européenne vers une disparition ? Si dans le passé, le Conseil d'Etat admettait seulement de se référer à la sécurité juridique en tant que principe de droit européen, il a introduit dans l'ordre juridique national le principe de sécurité juridique en tant que norme de référence du contrôle de légalité par son arrêt du 24 mars 2006, KPMG. [...]
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