Le choix de la structure pour une entreprise qui veut s'implanter à l'étranger a moins d'intérêt à mesure que s'opère, sous couvert de neutralité fiscale, une assimilation entre filiale et succursale. Le Conseil d'État confirme cette évolution dans cet arrêt du 20 juin 2003.
En l'espèce, la société de droit suisse Interhome AG est mandatée par des propriétaires de résidences secondaires pour assurer la location de leurs biens situés dans plusieurs pays d'Europe, notamment en France. Elle perçoit les loyers pour le compte des mandants et se rémunère en prélevant une commission. Pour promouvoir ces résidences de vacances, elle édite un catalogue dans lequel elle invite les locataires éventuels à entrer en contact avec ses filiales locales. En France, sa filiale Interhome-Gestion SARL, dotée d'un statut d'agent immobilier, a reçu délégation pour conclure les baux avec les preneurs et veiller à leur bonne exécution. En contrepartie, elle reçoit de la société-mère, son unique client, une commission ainsi qu'une subvention d'exploitation.
[...] Mais le Conseil d'État ne renvoie pas l'affaire, il procède à l'analyse des rapports entre les différents intervenants et aboutit au même résultat, en refusant de qualifier la filiale d'établissement stable de la société mère. Le principe d'un possible cumul, filiale et établissement stable d'une société étrangère est affirmé pour la première fois par le Conseil d'État admettre qu'un tel établissement puisse être doté de la personnalité juridique reste créateur d'incertitudes (II). I. La qualification d'établissement stable applicable aux filiales représentants de la société mère. [...]
[...] Le distinguo du Conseil d'État entre activité propre de la société mère et activité accessoire, mais différente de la filiale, confère à la rédaction du contrat conclu entre elles une importance capitale. En effet pour ne pas voir sa filiale qualifiée d'établissement stable, la société mère doit veiller à ne pas déléguer un pouvoir qui va l'engager en son nom. Avec cette subtile nuance, le Conseil d'État fait, en l'espèce, une interprétation restrictive du pouvoir d'engager l'entreprise étrangère, au- delà de cette solution casuistique, la marge de manœuvre du juge dans l'appréciation des activités de chacun est créatrice d'insécurité juridique, d'instabilité de la notion d'établissement stable. [...]
[...] Et en tant qu'établissement stable de la société étrangère, cette dernière est imposée sur les mêmes bénéfices en France en vertu du principe de territorialité. Les résultats de la filiale peuvent donc être imposés deux fois au nom de deux personnes différentes : la filiale française et la société suisse. Se profile un risque de double imposition économique. Au vu de ce risque, deux points génèrent des incertitudes, d'abord la notion d'établissement stable est indéfinissable, au contentieux tout dépend de la qualification retenue par le juge de l'impôt. [...]
[...] Or dans ce montage, les actes du mandataire substitué (la filiale) engagent le mandataire principal (la société suisse), contrairement à ce que soutient le commissaire du gouvernement pour qui la société Interhome AG n'est en aucune façon engagée par le contrat signé par sa filiale avec le locataire. C'est cette filiale qui s'engage elle-même en son nom propre . Cette incohérence juridique peut être imputée à la méthode suivie par le Conseil d'État dans cet arrêt. Dans son visa il ne se réfère au droit interne qu'indirectement. L'article 209 B sert de fondement légal que dans la mesure où il opère un renvoi aux conventions fiscales signées par la France. Ce n'est pourtant pas la méthode classique enseignée dans l'arrêt Schneider Electric. [...]
[...] En principe, il faut d'abord résoudre l'affaire au regard des législations internes des deux États, puis subsidiairement, en cas de conflit de droit interne, appliquer la convention entre ces deux États. En l'espèce, le raisonnement à suivre aurait été similaire, en matière d'impôts sur les bénéfices des entreprises, le droit interne comme le droit international adopte les mêmes critères pour mettre en œuvre le principe de territorialité. Le Conseil d'État à préférer examiner directement l'application de la convention franco-suisse, et expliciter la notion de pouvoir permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise plutôt que de se placer sur le terrain du droit interne en analysant les relations entre les parties d'un point de vue privatiste. [...]
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