Le juge communautaire est donc saisit dans le prolongement d'arrêts précédents où il avait jugé que l'importation et la vente à titre onéreux de stupéfiants strictement prohibés par les Etats membres ne pouvaient être imposés à la TVA car il n'existe aucun circuit économique et commercial de ce type de marchandises. Le commerce de stupéfiant (CJCE, 1984, Einberger – CJCE, 1988, Happy Family) comme celui des amphétamines (CJCE, 1988, Mol) ou l'importation de fausse monnaie (CJCE, 1990, Witzemann) ne sont donc pas assujettis à la TVA au mépris du principe de neutralité fiscale. L'arrêt commenté va-t-il s'orienter vers le même chemin en extrayant ce commerce du champ d'application matériel de la TVA ? Plus juridiquement, la mise à disposition d'un emplacement où la vente de stupéfiants est tolérée constitue-t-elle une prestation de service imposable à la TVA, ou à l'inverse est-elle une exception au principe de neutralité fiscal puisque l'opération est pénalement réprimandée ?
La CJCE opte pour une application de la 6e directive à cette opération. En effet, selon elle, la location de la table est une prestation de service entrant dans le champ d'application de la TVA ; peu importe que la location soit pénalement répréhensible. Le critère dominant est l'existence d'une concurrence dans le secteur concerné et cette solution est dominée par l'affirmation antérieure du principe de neutralité en droit fiscal. C'est donc une décision qui s'inscrit dans la lignée de sa jurisprudence en soumettant les opérations illicites concurrentielles à la TVA
Il sera donc nécessaire dans un premier temps d'examiner la qualification que donne la Cour à l'opération ; à savoir une activité économique concurrentielle (I). Puis il sera opportun de rappeler le principe de neutralité fiscale par la non-incidence du caractère répréhensible de l'opération (II).
[...] C'est donc une jurisprudence novatrice posant de ce point de vue, un principe général. Cependant, la jurisprudence communautaire ajoute à cette notion d'activité économique celle du circuit économique (Arrêt EINBERGER, CJCE février 1984) afin de soumettre l'opération à la TVA Une activité concurrentielle, élément cardinal de l'imposition La jurisprudence antérieure n'hésite pas à analyser le secteur commercial dans lequel se situe l'opération afin d'en dégager le principe fondamental à l'assujettissement qui est l'existence d'une concurrence licite. Aux Pays-Bas, ce type de commerce où on peut consommer des drogues douces est sujet à une réglementation stricte et une autorisation préalable. [...]
[...] Ainsi l'activité susceptible d'être imposée n'est pas la vente de stupéfiant mais la mise à disposition d'un emplacement où la vente de produits illégaux est pratiquée. Même si le fait de fournir les moyens, l'information et la possibilité de commettre le délit de vente de stupéfiant est réprimandée par la complicité par la loi nationale, cette distinction entre auteur et complice ne peut s'opérer quant à la qualification de l'opération selon l'Avocat général M.NIAL FENELLY. Dès lors le juge va suivre les prétentions du Gouvernement néerlandais : la défenderesse ne vent pas de stupéfiants mais perçoit simplement des redevances sur la location d'une table mise à disposition des fournisseurs attirés. [...]
[...] Cette jurisprudence communautaire apparaît conforme au modèle français. Le juge fiscal français, s'appuyant quant à lui sur la théorie du réalisme fiscal, n'hésite pas à imposer une opération illicite comme l'exploitation d'une maison de tolérance (Arrêt CE décembre 1924, Dufour) Par conséquent, la concurrence potentielle commande l'égalité fiscale, peu importe son caractère répréhensible du moment qu'il n'est pas universel à la communauté. Cependant, ce principe souffre d'exceptions qui apparaissent discutables en ses effets Une jurisprudence etablie sur un dilemme moral Tant le principe de neutralité que son exception apparaissent contestable au fond et par leurs effets. [...]
[...] C'est sur la qualification d'opération économique de la location de la table que le juge doit statuer. L'élément économique est celui qui fait défaut à première apparence en l'espèce. En effet la location d'une table comme moyen de commercialiser des produits stupéfiants n'apparaît pas entrer dans une telle catégorie. Cependant, il est nécessaire de distinguer les opérations en cause : celles effectuées par l'exploitant de l'établissement qui entrent totalement dans la qualification d'opération économique et celles du fournisseur attiré qui peuvent poser problème. [...]
[...] La non-incidence du caractère répréhensif de l'opération : Rappel et perspective du principe de neutralité fiscale L'arrêt Coffeeshop Siberië se situe dans la ligne droite des précédents arrêts rendus en la matière. Le principe de neutralité fiscale est maintenu alors qu'il peu apparaître quelque peu contestable 1 Le maintient d'un principe fondamental en la matière Le principe selon lequel le juge fiscal ne doit pas traiter de façon différente les activités licites et illicites est retenu depuis longtemps par la Cour de Luxembourg et il conduit à soumettre à l'impôt des activités même illicites. [...]
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