La question qui se pose tout particulièrement devant le conseil consiste donc à savoir quels sont les éléments de l'actif d'une entreprise, et ainsi si un immeuble en fait partie. Or, le Conseil a dégagé, par un arrêt du 13 juillet 1955, le principe selon lequel un élément affecté par nature à l'exploitation commerciale doit être regardé comme faisant partie de l'actif commercial et donc du patrimoine de l'entreprise. En l'espèce, l'immeuble litigieux est affecté à l'exploitation de l'entreprise et devrait donc faire nécessairement partie de l'actif de l'entreprise. Ce n'est pourtant pas la solution retenue par le CE. Ainsi, le CE opère ici un revirement par rapport à la jurisprudence dégagée en 1955, en retenant une solution nouvelle, qui s'est imposée depuis en droit positif. La solution ainsi dégagée, d'inspiration libérale, a vite posé un problème de limites et, partant, a prêté le flanc à la critique, dans son principe même
[...] Enfin, le dernier fondement de la jurisprudence de 1955 nuance les deux précédents. Ce fondement repose sur la distinction entre les biens affectés par nature à l'exploitation et les autres ; dans le premier cas, l'inscription au bilan est de droit et le contribuable aurait compétence liée, dans le second cas, l'exploitant bénéficie d'une liberté totale : il peut alors s'abstenir de les figurer au bilan de son entreprise pour les gérer à titre purement civil. La reconnaissance de cette liberté par le CE pour les biens non affectés à l'exploitation trouve sa justification dans la volonté du Conseil d'éviter des complications pratiques, par exemple être contraint de faire une discrimination arbitraire entre les étages d'un même immeuble, dont les 1 recevraient une affectation professionnelle et les autres seraient utilisés civilement, de telle sorte que les premiers rentreraient dans les postes actifs du bilan et pas les seconds. [...]
[...] Le CE s'y est prononcé favorablement dans l'arrêt du 17 mars 1976. Le commissaire du gouvernement Lobry avait explicité cette solution dans ses conclusions sous cet arrêt : tout exploitant individuel a la possibilité d'apporter à son entreprise tout bien mobilier ou immobilier de son choix, fût-il sans aucun rapport avec l'activité de celle-ci, dès lors qu'il estime que cet apport à l'actif du bilan est de nature à renforcer le crédit de son entreprise auprès des tiers - En second lieu, la question s'est posée de savoir si l'exploitant individuel a la liberté d'inscrire ou non à son bilan un bien nécessaire au fonctionnement de l'entreprise. [...]
[...] En l'espèce, une personne, M.L, exploitait à titre individuel un fond de commerce dans un immeuble lui appartenant. Il fonda ensuite, avec son gendre, une SNC et y apporta le fond de commerce ; l'ensemble immobilier restait lui bien personnel de M.L qui le loua à la société. Le litige est né de la décision de l'administration fiscale, approuvée par les premiers juges, d'imposer la plus-value enregistrée, à l'instant de la cessation de l'exploitation personnelle, sur l'ensemble immobilier. Cette décision de l'administration trouvait son fondement à la fois dans l'article 38 et dans la jurisprudence du CE en la matière : selon l'article, le bénéfice imposable comprend notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, en cours comme en fin d'exploitation La jurisprudence a quant à elle admis que toute opération ayant pour effet de transférer un élément d'actif dans le patrimoine d'autrui ou même simplement de le faire disparaître du patrimoine de l'entreprise est assimilée à une cession au sens de l'article 38. [...]
[...] Patrimoine personnel et patrimoine de l'entreprise n'auraient donc de personnel ou d'entreprise que le nom. En outre, comme le montre le professeur Bienvenu, il semble également critiquable de laisser à l'exploitant toute liberté d'inscrire ou non un bien à son bilan mais, une fois qu'il est inscrit, d'imposer une éventuelle plus-value sur ce bien lors de son retrait, en tant qu'opération de cession. Il s'agit là d'une restriction à la liberté reconnue à l'exploitant, sans réelle cohérence : si l'exploitant a la liberté de déterminer la composition de ses deux patrimoines, pourquoi les évolutions de cette répartition seraient-elles assimilées à des opérations de cession ? [...]
[...] Schmetz) du réalisme du droit fiscal, celui-ci divisant traditionnellement l'action d'un même contribuable en ses différentes composantes, dans la mesure où les régimes applicables sont différents. Elle fait de l'entreprise individuelle un nouveau sujet de droit La généralisation de cette règle a conduit à s'interroger sur la consistance du patrimoine professionnel de l'exploitant individuel Dans le cas où existe un bilan, un problème particulier se pose : en effet, comme ni droit comptable ni le droit fiscal n'imposent de modèle uniforme, une difficulté est apparue quant à la composition du bilan pour déterminer le bénéfice imposable. C'est l'objet de l'arrêt qui nous intéresse ici. [...]
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