L'abus de droit a fait l'objet de nombreux arrêts, le dernier en date est venu préciser son champ d'application.
Une SA « Janfin » acquiert des titres de diverses sociétés. Elle redistribue les sommes perçues. Après la perception de ces dividendes, les titres sont revendus et la revente fait ressortir une moins-value égale à la perception des dividendes hors avoir fiscal, ce dernier permettant de régler la totalité de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'année 1995.
L'administration lors d'un contrôle en 1997, considère que ces opérations d'achat et de revente des titres caractérisent un abus de droit, sur le fondement de l'article L.64 du Livre des Procédures Fiscales, le but exclusif de l'opération étant le bénéfice du crédit d'impôt.
La société, suite à un jugement défavorable du tribunal administratif de Paris, interjette appel devant la cour d'appel administrative de Paris, laquelle rejette sa demande (arrêt du 7 juillet 2003) de décharge des impositions supplémentaires dues en application de l'article susvisé.
La société se pourvoit alors en cassation devant le Conseil d'Etat. Elle soutient en effet, que l'administration a commis une erreur de droit en se fondant sur l'article L.64 LPF : la société ne rentre pas dans le champ d'application de cet article, l'utilisation de l'avoir fiscal pour payer l'impôt ne déguisant ni la réalisation ni le transfert de bénéfices ou de revenus.
La question de droit soulevée est alors la suivante: l'administration peut-elle se fonder sur l'article L64 LPF pour révéler l'abus de droit d'un acte n'entrant pas dans le champ d'application dudit article ?
[...] Il existe une différence d'approche entre le Conseil d'Etat et la Cour de cassation. La Cour de Cassation a fait sienne la théorie du but exclusivement fiscal dans un arrêt de 1988. Cependant, la Cour de Cassation admet moins facilement que le Conseil d'Etat la théorie. Ainsi, dans un arrêt Com juillet 96, RMC France : bien qu'ayant une finalité uniquement fiscale, il n'existe pas d'abus de droit dans le fait de transformer une SARL en SA, il s'agit d'un montage autorisé avec une multitude d'effets juridiques et il est donc impossible pour l'administration de considérer que le seul but était fiscal. [...]
[...] Mais l'arrêt est formel, le principe général de lutte contre la fraude à la loi s'applique. Le Conseil d'Etat estime, que pour déterminer s'il y a fraude à la loi, il faut d'abord rechercher si le contribuable avait un but exclusivement fiscal (reprise de la formulation de l'arrêt du 10 juin 1981), rechercher ensuite le second critère de la fraude à la loi se cumulant avec le 1er : le fait pour le contribuable d'avoir recherché l'application littérale d'un texte fiscal à l'encontre des objectifs poursuivis par les auteurs du texte. [...]
[...] La CJCE a retenu le critère de la contrariété entre l'application d'un texte et l'objectif général poursuivi par le législateur. Le Commissaire du gouvernement a suggéré au Conseil d'Etat de suivre la CJCE. Désormais, l'administration fiscale peut donc toujours poursuivre des actes ayant un but exclusivement fiscal, que ces actes réduisent l'assiette de l'impôt ou non. On pourrait songer à une réforme de l'art L 64 LPF pour que le droit soit dans la loi et non jurisprudentiel. [...]
[...] La théorie de l'abus de droit permet d'écarter des actes dissimulant la portée véritable d'un contrat. Cela signifie que l'administration peut écarter les simulations (contrats déguisés) ainsi que les actes fictifs, ceux dont le contribuable prétend qu'ils existent alors que ce n'est pas le cas. Ces principes sont rappelés par l'arrêt Gamon du 23 février 1979. La définition est étroite car il faut une activité frauduleuse du contribuable. C'est parce que la définition est stricte que les sanctions sont rudes du montant des droits éludés) L'élargissement jurisprudentiel de la notion légale de l'abus de droit La jurisprudence a étendu le domaine de la théorie de l'abus de droit. [...]
[...] D'un point de vue financier, la société ayant acheté et revendu n'a en réalité rien dépensé: opération neutre du point de vue de la trésorerie. D'un point de vue fiscal cependant, l'opération n'est pas neutre: suite à la revente, la société réalise une moins-value, laquelle est imputée sur les plus-values de même nature. Il y a donc une perte déductible qui permet de faire des économies d'impôt. Cet intérêt n'a pas été contesté par l'administration fiscale. La société a également reçu un avoir fiscal qui est un crédit d'impôts. Cela signifie qu'il peut être imputé sur l'impôt dû par son bénéficiaire. [...]
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