L'arrêt Clavaud rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 28 avril 1988 semble illustrer les difficultés de concilier la vie privée des salariés et le recours aux licenciements sur des motifs inhérents à leur vie personnelle. Cette affaire, dans laquelle un salarié avait ouvertement critiqué son entreprise lors de déclarations faites à un journaliste sur ses conditions de travail, a révélé également la difficulté de mettre harmonieusement en relation le libre exercice du droit d'expression et les règles déontologiques classiques d'un salarié au sein de son entreprise. Tout l'enjeu semble résider dans la conciliation entre préservation des droits du salarié, et corrélativement, protection de ceux de son employeur.
En ce sens, nous nous intéresserons spécifiquement aux liens que recouvrent les notions de licenciement et de vie privée des salariés lorsqu'ils sont mis en relation, interposés, et étudiés l'un avec l'autre.
Le licenciement est communément et généralement perçu comme la mesure par laquelle un employeur met fin au contrat de travail qui le lie au salarié. L'on a alors traditionnellement deux formes de licenciement, l'un pour motif économique du fait de motifs extérieurs à la personne du salarié, l'autre pour motif personnel, en raison de motifs inhérents à la personne du salarié, dont on distingue le caractère personnel de ce type de licenciement d'un licenciement purement individuel, dont les motifs peuvent être éminemment économiques et non personnels.
En focalisant notre attention sur les licenciements pour motif personnel, relatifs alors à la vie privée du salarié, définie comme l'ensemble des activités d'une personne qui relève de son intimité, il est des cas où le salarié dont l'objet est de fournir un travail, dirigé et rémunéré par un employeur, peut être parfois licencié pour des motifs éminemment subjectifs qui peuvent alors sembler en contradiction avec la nécessité pour l'employeur de licencier sur des motifs à la fois objectifs et cohérents, ou du moins en lien avec la prestation de travail du salarié.
Tout l'enjeu d'un tel sujet semble pouvoir être perçu à travers les profondes controverses doctrinales qui révèlent la difficulté de saisir les limites que recouvrent la notion de vie privée des salariés, tout comme les divergences d'appréciation sur la possibilité pour l'employeur de licencier sur des motifs sans lien apparent avec la sphère professionnelle.
En ce sens, nous serons amenés à nous poser la question suivante : les licenciements peuvent-ils véritablement être justifiés par des motifs inhérents à la vie privée du salarié ? (...)
[...] Des licenciements conditionnés du fait d'un lien indirect avec la sphère professionnelle Lorsque des licenciements s'appuient sur des motifs qui ne se rattachent pas directement à la vie professionnelle du salarié, la Cour de cassation va chercher à limiter leur recours puisqu'ils paraissent uniquement basés sur des critères subjectifs et personnels. La jurisprudence, qu'il s'agisse de la Chambre sociale ou mixte, va effectivement encadrer de manière stricte les moyens de preuve utilisés par les employeurs pour justifier un licenciement. C'est à la fois perceptible lorsqu'il s'agit de l'exploitation des fichiers appartenant au salarié tout comme celle des caractéristiques personnelles du salarié toutes deux fortement contrôlées du fait de leur caractère éminemment personnel. [...]
[...] Effectivement, l'absence répétée, autrement dit de manière irrégulière et décousue du salarié, peuvent être de nature à bouleverser et perturber le fonctionnement interne de l'entreprise. En ce sens, la jurisprudence ne semble pas chercher à militer en faveur de la préservation de l'emploi du salarié au sein de l'entreprise, comme elle a pu le souligner à de nombreuses reprises évoquant le fait qu'un licenciement motivé peut être avancé lorsque des absences répétées au sein de l'entreprise sont génératrices de troubles évidents. [...]
[...] Dans ces cas parfois extrêmes, la Cour de cassation semble vouloir s'appuyer sur les troubles éventuels que pourraient causer à l'entreprise le maintien du salarié dans l'entreprise. En ce sens, ce sont des motifs personnels, en lien direct avec la stabilité de l'entreprise, sur lesquels s'appuient l'employeur, qu'il s'agisse notamment de la perte du permis de conduire par un chauffeur poids lourd du fait de son état alcoolique lorsqu'il conduisait, dans un arrêt du de la Chambre sociale le 2 décembre 2003, ou encore du fait de la participation d'une salariée à une affaire de vol et trafic de véhicules, dans un arrêt de la Chambre sociale du 25 janvier 2006, susceptibles tous deux de créer un trouble caractérisé au sein de leurs entreprises respectives. [...]
[...] Tout l'enjeu d'un tel sujet semble pouvoir être perçu à travers les profondes controverses doctrinales qui révèlent la difficulté de saisir les limites que recouvrent la notion de vie privée des salariés, tout comme les divergences d'appréciation sur la possibilité pour l'employeur de licencier sur des motifs sans lien apparent avec la sphère professionnelle. En ce sens, nous serons amenés à nous poser la question suivante: les licenciements peuvent-ils véritablement être justifiés par des motifs inhérents à la vie privée du salarié ? Dans la pratique, il est effectivement possible de licencier sur des motifs éminemment personnels. [...]
[...] La Chambre sociale a pu illustrer sa sévérité notamment sur la question de l'orientation liée à la personnalité et aux traits de caractères du salarié. Il n'est pas possible de congédier un salarié pour le seul motif tiré de ses moeurs ou de ses convictions religieuses En ces termes, la Chambre sociale de la Cour de cassation dans son arrêt du 17 avril 1991 n'a souhaité laisser place ni à aucun doute, ni même à aucune ambigüité sur son intransigeance à éradiquer toutes formes de licenciement fondés sur des caractéristiques inhérentes à l'orientation sociétale ou religieuse du salarié. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture