La place de la vie personnelle au travail

Extraits

[...] L'employeur est guidé par la nécessité de rentabiliser son entreprise, et pour cela, il use de son pouvoir disciplinaire qui lui est reconnu. En effet, l'employeur édicte des règles disciplinaires de manière unilatérale dans le règlement intérieur de l'entreprise et par le biais des Chartes qui sont des documents définissant solennellement des droits et des devoirs. Ces documents sont pourvus d'un effet obligatoire et doivent donc être respectés par les salariés à condition d'avoir fait l'objet d'une information complète auprès d'eux. C'est lorsque les règles ainsi édictées touchent à la vie personnelle du salarié que nait le conflit d'intérêt. [...]

[...] Le pouvoir disciplinaire de l'employeur est donc limité. Les juges ont dans cette optique déclarée nulles différentes clauses restreignant la liberté et le droit au respect de l'intimité de la vie personnelle dont voici quelques exemples : Ont été déclarées nulles : - les clauses interdisant toute conversation étrangère au service : Conseil d'Etat, 25/01/1989 - les clauses interdisant le mariage entre salariés d'une même entreprise : CE, 10/06/1982 - Les clauses obligeant le port d'une blouse blanche dans l'entreprise alors que l'activité ne le rend pas nécessaire : Cour de Cassation, Chambre sociale, 18/02/1998 Ces clauses montrent une ingérence du pouvoir disciplinaire dans la vie personnelle du salarié, ingérence non tolérée par le juge de l'excès de pouvoir ni par le juge judiciaire. [...]

[...] RIVERO Les notions de vie personnelle et de pouvoir disciplinaire, dans le contexte de la vie professionnelle, recouvrent des intérêts disconvergents du salarié et de l'employeur. Les rapports de travail entre ces deux agents sont essentiellement caractérisés par l'existence entre eux d'un lien de subordination, lequel procure à l'employeur un pouvoir disciplinaire qui va venir encadrer le comportement de ses salariés. Ce pouvoir unilatéral engendre une inégalité dans les rapports entre salariés et employeur, quoi que cette puissance patronale n'ait cessé de s'affaiblir depuis le début du XIXème siècle. [...]

[...] Dans certains arrêts, la chambre sociale précise, souvent, de manière incidente, que le fait imputé au salarié ne constitue pas une violation d'une obligation du contrat de travail. Ainsi, dans le cas d'un salarié qui, se trouvant en arrêt de maladie, avait adressé une carte postale à l'employeur depuis un lieu de vacance et avait été licencié pour ce fait, la Cour a rappelé que le fait reproché ne constituant pas un manquement aux obligations résultant du contrat de travail, il ne peut justifier un licenciement (Soc juin 1998, Bull. [...]

[...] Bien que la vie personnelle s'exerce principalement en dehors du lieu et temps de travail, elle existe aussi inévitablement dans la sphère professionnelle. Ce terme est utilisé par J. RIVERO selon qui la vie personnelle est la sphère de chaque personne dans laquelle nul ne peut s'immiscer sans y être convié Le problème est qu'à partir du moment où la vie personnelle du salarié est susceptible d'imprégner sa vie professionnelle, par exemple du simple fait de converser avec un collègue de ses loisirs, la question qui se pose est celle de savoir si l'autorité de l'employeur, à comprendre, son pouvoir disciplinaire, est susceptible ou non de s'exercer dans ce domaine, et auquel cas dans quelles mesures ? [...]