Malgré ces dispositions législatives, l'exercice du droit de grève compromet en réalité l'effectivité de la continuité des services publics, ce qui crée un fort mécontentement auprès des usagers. L'illustration de cette affirmation concerne notamment le service public des transports terrestres de voyageurs qui se compose de la SNCF et de la RATP . Le mécontentement du fait des grèves dans ces services est tel que pour en atténuer les effets, beaucoup d'usagers aimeraient l'instauration d'un service minimum comme il en existe chez certains de nos voisins européens. Promesse de Jacques CHIRAC lors de la campagne présidentielle de 2002, présentée comme l'une des mesures phares de son second mandat, la démarche gouvernementale débuta en septembre 2003 par l'étude des différentes expériences menées en Europe notamment en Italie, en Belgique ou en Autriche. Le sujet fut remis à l'ordre du jour par des députés à l'occasion d'un débat public à l'Assemblée Nationale le 9 décembre 2003 à propos de la quinzième proposition de loi déposée depuis 1980 sur la conciliation entre la continuité du service public des transports et le droit de grève. Puis, le Président de la République invita le 7 janvier 2004 les partenaires sociaux et le gouvernement à trouver une solution acceptable par toutes les parties. A cette occasion, une commission sur la continuité du service public dans les transports des voyageurs fut créée le 12 février 2004. Présidée par M. Dieudonné Mandelkern et composée de neuf membres, elle avait pour mission de rendre compte au Ministre des Transports Gilles de ROBIEN, des conditions juridiques et techniques de la mise en place d'un service garanti dans le secteur des transports terrestres de voyageurs. Une première période de concertation s'ouvrit le 18 mars 2004 dont l'objectif était de conclure sous six mois des accords collectifs de prévention des conflits inspirés par l'alarme sociale existante à la RATP. La commission Mandelkern remis au Ministre son rapport le 21 juillet 2004 dans lequel l'adoption d'une loi est préconisée. En septembre 2004, le Ministre entama une série de concertations avec l'ensemble des parties concernées à savoir : les syndicats, les autorités organisatrices des transports et les usagers, afin de connaître leurs réactions vis-à-vis des propositions faites par le rapport Mandelkern.
Le droit de grève et la continuité des services publics sont deux principes de même nature : ils ont une valeur constitutionnelle. La difficulté réside dans leur conciliation. Ainsi, en pratique, lorsque le droit de grève est mis en œuvre dans le service public des transports, c'est au détriment du respect du principe de la continuité du service public. Une telle situation de fait n'est pas justifiable puisque étant des principes de même rang, il n'y a pas de raison pour que l'exercice du droit de grève prime sur le principe de continuité. Il convient donc de s'interroger sur la réalité de leur conciliation. Sommes-nous face à des principes inconciliables? Juridiquement, la conciliation de ces principes est possible. Elle apparaît même nécessaire au regard du droit des usagers. De ce fait, dans quelle mesure cette conciliation peut-elle être assurée ? Par quels moyens est-il possible de garantir l'effectivité de la continuité du service public des transports aux usagers en période de grève?
Il convient donc de s'interroger sur les raisons de l'absence d'une conciliation entre le droit de grève et le principe de continuité dans le service public des transports (I) pour ensuite étudier les différentes opportunités offertes au gouvernement en la matière à savoir : la conciliation du droit de grève et de la continuité du service public des transports par l'intervention du législateur (II) ou par le dialogue social (III).
[...] En rappelant la compétence du législateur, le Conseil Constitutionnel condamne de ce fait la jurisprudence Dehaene, donc la compétence du pouvoir réglementaire en matière de réglementation du droit de grève Les caractéristiques d'une loi instaurant un service minimum dans le service public des transports La Commission Mandelkern préconise dans son rapport sur la continuité du service public dans les transports terrestres de voyageurs l'adoption d'une loi instaurant un service minimum. Cette solution est conforme à la Constitution puisque la continuité du service public nécessite une réglementation du droit de grève. Le législateur n'ayant jamais mis en œuvre sa compétence en la matière, c'est le Conseil Constitutionnel qui est venu préciser les caractéristiques d'une telle réglementation. [...]
[...] Ainsi, des services publics tels que la police, les hôpitaux, la distribution de l'eau, du gaz, et de l'électricité impliquent un fonctionnement permanent ; alors que pour d'autres la continuité postule un accès normal au service. Il ne faut pas non plus perdre de vue que nul n'a de droit acquis au maintien d'un service public. Ainsi la continuité du service public suppose la vie du service, elle ne le garantit nullement contre la mort Deux fondements à ce principe peuvent être dégagés. [...]
[...] Au regard des résultats très satisfaisants de cette procédure, un avenant au protocole a été signé le 15 mars dernier afin d'instaurer une meilleure prévisibilité à la RATP en cas de grève. Le 28 octobre 2004, un accord, qualifié d'historique, sur l'amélioration du dialogue social et la prévention des conflits à la SNCF a été signé par sept organisations syndicales représentant au total 80% des voix aux élections professionnelles. Cet accord a pour but de remplacer la confrontation habituelle dans l'entreprise par la recherche de compromis. [...]
[...] L'un des objectifs de cet accord, partagés par la direction et par les syndicats est d'ailleurs d'éviter l'instauration d'un système de service minimum. Cinq mois après la signature de l'accord demandes de concertation immédiate ont été déposées. Seuls 15% de ces demandes ont débouché sur un préavis de grèves et de grèves effectives La volonté d'améliorer le dialogue social au sein du service public des transports Le 20 janvier dernier, interrogé sur l'utilité d'une loi instaurant un service minimum dans les transports, le Premier ministre a déclaré que celui-ci devrait être atteint par le dialogue social. [...]
[...] La police, la justice, l'armée obéissent à des règles propres de fonctionnement qui justifient le statut particulier auquel les personnels sont soumis. L'obligation de continuité du service y est considérée comme allant de soi et acceptée comme telle tant par les personnels que par le public. Il n'est pas possible de parler de conciliation dans ces exemples puisque les agents de ces services publics ont été privés par le législateur de l'exercice du droit de grève au nom de l'intérêt général. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture