« Rien ne focalise autant l'esprit que la vue permanente d'un concurrent qui peut vous balayer du marché ». Le célèbre industriel américain, Wayne Calloway, légitime ici, sans le vouloir, l'existence des clauses de non concurrence telles qu'on les connaît dans les contrats sociaux contemporains. Néanmoins, avant d'envisager ces clauses à proprement parler, des précisions terminologiques s'imposent.
Le droit commun peut se définir comme un ensemble de règles régissant une catégorie juridique de sujets ou de notions. Ainsi, on peut aussi bien parler de « droit commun des français » pour viser les règles généralement applicables aux relations civiles entre français (issues du code civil et de son application), que de « droit commun des sociétés » lequel rassemble les règles générales appliquées aux sociétés, ou même de « droit commun des clauses de concurrence » pour parler des règles régissant les clauses de non-concurrence dans leur globalité.
La clause est quant à elle un élément complètement différent, c'est une règle de fond que les parties ont insérée dans ''leur loi'', leur contrat, et qu'ils entendent en conséquence respecter. Elle peut prendre diverses formes et dénominations. La plus connue d'entre elles est sûrement la clause résolutoire qui permet à un cocontractant de résoudre rétroactivement le contrat conclu avec son partenaire.
Une clause de non-concurrence a cela de particulier qu'elle s'insère toujours dans un contrat de travail, et peut se définir à ce titre comme l'interdiction faite à un salarié, postérieurement à la rupture de son contrat de travail, d'entrer au service d'une entreprise concurrente ou d'exercer sous quelque forme que ce soit une activité concurrente à celle de son ancien employeur (c'est ici que la citation de M. Calloway prend tout son sens: on ne peut prendre le risque de laisser une élément constitutif d'une société -notamment le savoir- basculer chez un autre employeur).
Présentés et définis ainsi, ces deux termes amènent à une interrogation évidente autant que légitime : les clauses de non-concurrence obéissent-elles à un régime distinct des différentes clauses que l'on peut insérer dans un contrat social ? (...)
[...] Mais il n'en est rien: la contrepartie est due même si l'obligation de non-concurrence n'a plus d'objet: n'y a-t-il pas objectivement déséquilibre entre les intérêts de l'employeur et ceux du salarié ici? De même, dans l'hypothèse d'une cession de société en difficulté, le nouvel employeur est également tenu de verser la contrepartie financière, comme ce fut le cas dans l'affaire portée devant la cour de cassation le 6 Décembre 1994 Cette obligation à la charge de l'employeur va encore plus loin: la chambre sociale de la cour de cassation énonce clairement le 11 janvier 2006 que le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue . [...]
[...] Répondre par l'affirmative est de plus en plus pertinent, notamment depuis un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 12 Juillet 2002 énumérant les conditions de validité de la clause de non concurrence De plus, une jurisprudence constante permet de dégager un véritable régime juridique applicable aux clauses de non-concurrence licites (II). I. L'existence de conditions générales de validité des clauses de non concurrence Il est possible de distinguer dans les quatre conditions de validité dictées par l'arrêt du 12 juillet 2002 deux catégories d'entre elles. [...]
[...] L'employeur doit effectivement subir un préjudice, une perte, du fait du départ d'un salarié dans une entreprise concurrente. C'est totalement justifié en ce sens que la clause de non concurrence ne peut évidemment pas exister là où, par exemple, la concurrence est particulièrement faible: l'équilibre entre la défense desdits intérêts légitimes et la liberté de travail du salarié n'existe plus. La cour de cassation a eu l'occasion de l'affirmer (même implicitement) dans un arrêt de la chambre sociale du 19 novembre 1996, et plus récemment dans un arrêt du 18 juin 2000. [...]
[...] Les conditions tenant au salarié La plus originale des conditions est celle de la prise en compte des spécificités de l'emploi du salarié. Cette condition n'est le pendant que de la validité d'une clause de non-concurrence. Elle exige, par l'intermédiaire de la plus haute juridiction civile réunie en assemblée plénière le 27 juin 2001, de prendre en compte le degré de spécialisation du salarié. En effet, et logiquement, plus le salarié est spécialisé, plus il est difficile pour lui de retrouver un emploi, ce qui conduit à éviter de le tenir par une clause de non-concurrence. [...]
[...] C'est un des principaux apports de la jurisprudence de 2002 citée en introduction. Il est en effet obligatoire pour l'employeur de verser à son ancien salarié tenu par une clause de non-concurrence une indemnité compensatrice de salaire (cassation sociale 28 Novembre 2001) pendant la durée de l'interdiction. Ce qui en fait notamment la seule clause mettant à la charge de l'employeur l'obligation de verser une indemnité, autre que celles prévues en cas de divers licenciements, après la rupture d'un contrat avec un salarié. [...]
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