Le droit du travail fait en sorte que le contrat de travail perdure dans sa force obligatoire malgré les changements qui peuvent affecter la personne de l'employeur. C'est le principe de conflit entre le droit commun des obligations et le contrat de travail. Le contrat de travail conclu intuitu personae, a une force obligatoire qui s'impose entre les parties, mais la modification qui atteint l'employeur devrait entrainer une rupture du contrat. Le droit du travail a opté pour une solution différente pour lutter contre la précarité de l'emploi et accepte la substitution forcée d'un contractant à un autre. Une cession forcée de contrat qui se fait de plein droit, sans exigence formelle supplémentaire pour obtenir une situation juridique stable.
Ce principe du transfert des contrats de travail est posé depuis le 10 juillet 1928 par une loi qui a transposée la règle du droit allemand en France, repris en droit communautaire dans une directive de 1977. La primauté du droit communautaire a conduit à réorienter l'interprétation française de l'article L 1224-1 du code du travail reprenant les principes de la directive du 14 février 1977 ; « lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. »
Cet article organise la cession légale forcée du contrat, au bénéfice du repreneur de l'activité, conformément à quatre conditions relativement vagues susceptibles d'interprétations diverses. En l'occurrence, la jurisprudence communautaire et française l'ont fait de manière souple, conduisant à donner une portée plus large du transfert du contrat de travail via l'article L 1224-1. La modification dans la situation juridique de l'employeur envisagée par le législateur était une situation exceptionnelle comme le montre son champ d'application (succession, vente, fusion etc.) imposant le retour à la norme, puisque le maintien du contrat de travail s'impose malgré le transfert de l'entreprise. (...)
[...] Le salarié peut donc échapper à son obligation de travailler pour un employeur non librement choisi. Le droit d'opposition est individuel et rend la règle de transfert inapplicable à celui qui l'exerce. Toutefois la chambre sociale refuse de reconnaître un tel droit au salarié. Arrêt Auchan : le changement qui résulte de l'article précité s'impose tant aux employeurs successifs qu'aux salariés, une solution critiquée notamment par Alain Supiot les salariés ne sont pas à vendre». C'est le principe de l'automaticité du transfert qui pose problème, puisque la cession légale forcée du contrat opère même sans acceptation du salarié. [...]
[...] Si le salarié refuse le principe même du transfert, il devra écrire à l'employeur une lettre, et sera assimilé à un démissionnaire on prive le salarié des indemnités de rupture. Il peut écrire au repreneur, de ce fait il a accepté le principe, et alors il sera licencié pour insubordination, il bénéficiera ainsi des allocations de chômage. Même s'il passe au service d'un nouvel employeur avec l'entité dans laquelle il occupe un emploi, le salarié reste un libre. Rien ne l'empêche de démissionner de son emploi s'il ne supporte pas de travailler pour celui qui est devenu, par l'effet ex lege, son nouvel employeur. [...]
[...] De tous les états membres de l'UE, l'Allemagne est le seul à avoir adopté des dispositions spécifiques pour régir l'avenir du contrat de travail du salarié qui s'oppose à son transfert. Le code du travail français ignore ce droit d'opposition et l'exercice de ce droit tend à l'inapplicabilité de l'article L 1224-1. Elle ne relève que du droit commun des contrats, et donc du régime de cession du contrat en droit civil. Toutefois par la liberté offerte par la CJCE et la directive, le droit allemand ainsi que celui français sont en adéquation avec le droit communautaire, puisque ce dernier ne prévoit rien pour le droit d'opposition. [...]
[...] En France on en vient à se demander s'il ne faudrait pas aussi une intervention législative. Si un droit d'opposition est consacré cela permettra la mise en place d'un système cohérent, évitant les contours du droit d'opposition. Dès lors, il appartiendra à la loi, qui détient la mesure de l'ordre public, d'instaurer un droit d'option en faveur des salariés et de mettre en œuvre son mode d'expression et ses conséquences. C'est d'ailleurs d'une intervention législative qu'est issu le régime du droit allemand. [...]
[...] En 1928, quand on a consacré le transfert des contrats de travail, le législateur la fait dans une volonté de protection du salarié or il s'avère que le transfert automatique n'est plus toujours bénéfique au salarié. Le refus de reconnaître un droit d'opposition au salarié de son transfert opérant automatiquement et impérativement. - La chambre sociale refuse le droit d'opposition. La CJCE estime que le transfert porte sur un ensemble de droits et d'obligations pour le salarié, notamment l'obligation de se soumettre au cessionnaire qui serait contraire à la dignité et la liberté du travail. [...]
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