La légalité du Contrat Nouvelles Embauches (CNE) est depuis sa création remise en question. La contestation de sa légalité au regard de textes internationaux signés et publiés par la France se poursuit devant plusieurs juridictions françaises.
Petit rappel des faits : l'ordonnance du 2 août 2005 institue un nouveau type de contrat de travail, le CNE. Le CNE est un contrat utilisable uniquement par les TPE (Très Petites Entreprises), c'est-à-dire des entreprises de moins de 20 salariés. Cette ordonnance institue un droit dérogatoire au droit commun en matière de licenciement. Le contrat de travail peut donc être rompu dans des conditions dérogatoires : éviction de la cause réelle et sérieuse de licenciement, de l'indication de la motivation de la lettre de licenciement, de l'entretien préalable et des règles relatives à la démission. Ainsi un licenciement est donc possible sans indication de motif au cours des deux premières années au sein de l'entreprise.
Un recours en annulation a été formé par les organisations syndicales devant le Conseil d'Etat, recours rejeté par ce dernier (arrêt du 19 octobre 2005), tout comme celui formé devant le Conseil Constitutionnel par les parlementaires (22 juillet 2005). Une convention de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) n°158 du 20 juin 1982 relative au licenciement, comprend des dispositions concernant la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur. La Cour de cassation, dans un arrêt du 29 mars 2006, estime que des dispositions de cette convention sont « d'application directe » entre les parties et devant les juridictions. Le conseil de prud'homme de Longjumeau, dans un jugement du 28 avril 2006 estime quant à lui que l'ordonnance du 2 août 2005 instituant le CNE doit être privée d'effet juridique au regard de la convention n°158 de l'OIT qui prévoit notamment qu' « un travailleur ne devra pas être licencié sans qu'il existe un motif valable de licenciement lié à l'aptitude ou à la conduite du travailleur, ou fondé sur les nécessité de fonctionnement de l'entreprise, de l'établissement ou du service », et qu'il « aura le droit de recourir contre cette mesure devant un (…) tribunal de travail ».
Françoise FAVENNEC-HERY, professeur à l'Université de Paris II (Panthéon – Assas) nous offre un commentaire de ce jugement dans La semaine sociale Lamy en date du 12 juin 2006. Elle ne semble pas soutenir la thèse du Conseil de prud'homme de Longjumeau qui écarte l'ordonnance du 2 août 2005 au profit de la convention n°158 de l'OIT. En étudiant son argumentation, nous verrons que son approche est contestable.
Mme FAVENNEC critique tout d'abord la réaction du conseil de prud'homme de Longjumeau qui a, selon elle, dépassé ses compétences en exerçant un contrôle de conventionalité. Nous verrons dans un premier temps pourquoi cet argument ne peut être retenu (I). De plus, elle s'interroge sur le contenu de l'ordonnance instituant le CNE. Cette ordonnance est, pour Mme FAVENNEC, conforme à la convention n°158 de l'OIT, puisqu'elle entrerait dans le régime dérogatoire pour lequel ne s'appliqueraient pas les dispositions contraignantes de cette convention. Nous verrons que, là encore, cet argument peut être réfuté (II).
[...] Les exclure du champ d'application de la convention n°158 revient donc à leur supprimer d'autres protections juridiques. L'article 2 point 5 de la convention dispose en effet de la taille de l'entreprise mais n'apporte aucune précision supplémentaire. Il ne s'agit donc ici pas forcément des entreprises de 20 salariés au plus. L'article dispose également de problèmes particuliers Il n'est pas sûr aujourd'hui que les très petites entreprises justifient de plus de problèmes particuliers revêtant une certaine importance eu égard aux conditions d'emploi particulières des travailleurs intéressé, à la taille de l'entreprise qui les emploie ou à sa nature que d'autres entreprises d'une taille plus importante. [...]
[...] "Le CNE conforme aux conventions internationales La légalité du Contrat Nouvelles Embauches (CNE) est depuis sa création remise en question. La contestation de sa légalité au regard de textes internationaux signés et publiés par la France se poursuit devant plusieurs juridictions françaises. Petit rappel des faits : l'ordonnance du 2 août 2005 institue un nouveau type de contrat de travail, le CNE. Le CNE est un contrat utilisable uniquement par les TPE (Très Petites Entreprises), c'est-à-dire des entreprises de moins de 20 salariés. [...]
[...] Elle se contente d'évoquer les arguments retenus par le conseil de prud'homme de Longjumeau en faveur d'un caractère déraisonnable de cette période. Elle critique ensuite cette position en évoquant une confusion effectuée par le conseil de prud'homme entre les notions de période d'essai et période de consolidation (cf. II.B), mais n'expose finalement pas réellement sur son point de vue sur la raison de ce délai. Le caractère raisonnable de ce délai étant complètement un élément subjectif, il convient de le comparer à d'autres délais français en la matière afin de l'apprécier au plus près. [...]
[...] Nous verrons que cela peut être contesté. B. Sur les dérogations au champ d'application prévues par la convention n°158 de l'OIT La convention n°158 de l'OIT ne prévoit pas de champ d'application général. Elle exclut donc de son champ d'application les travailleurs effectuant une période d'essai ou n'ayant pas la période d'ancienneté requise (article 2b). Selon Mme FAVENNEC, le conseil de prud'homme a effectué une confusion entre la période d'essai et la période de consolidation de l'emploi qui a pour objectif, non de tester les capacités du salarié, mais d'apprécier l'aptitude économique de l'entreprise à assurer cet emploi. [...]
[...] Nous conclurons que, contrairement à l'argumentation de Mme FAVENNEC, nous pouvons dire que l'ordonnance du 2 août 2005 instituant le CNE ne peut être exclu du champ d'application de la convention n°158 de l'OIT selon tous les arguments précités. Cette ordonnance n'entrant pas dans le régime dérogatoire de la convention, toutes les dispositions de cette dernière doivent donc lui être appliquées. Certaines de ses dispositions ne sont donc pas conformes à la convention n°158 et le conseil de prud'homme de Longjumeau a donc eu raison de les écarter. [...]
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