Commentaire de l'arrêt rendu le 29 janvier 2003 par la Cour de cassation : les établissements distincts

Extraits

[...] Le critère est donc assoupli par la jurisprudence qui n'exige que la présence d'un représentant de l'employeur, peu important l'étendue de ses pouvoirs. L'abandon de l'exigence d'un pouvoir décisionnel du représentant de l'employeur rend plus souple l'appréciation de la jurisprudence, ce qui s'explique par la volonté d'accroître l'implantation des institutions représentatives du personnel. B ) La volonté d'accroître l'implantation des institutions représentatives du personnel. L'absence de définition légale de l'établissement distinct est un enjeu pour la jurisprudence. Si les juges adoptent une position large, la reconnaissance et la présence d'établissements distincts au sein de l'entreprise sera facile. [...]

[...] Lorsque l'entreprise a une structure complexe et est composée de plus d'un établissement, l'employeur peut être tenté de procéder à un certain découpage de celle-ci afin d'éviter la présence de représentants du personnel en faisant en sorte de ne jamais atteindre les seuils légaux. C'est pourquoi deux techniques conduisant à la reconnaissance d'unité de représentations distinctes sont apparues : l'unité économique et sociale et l'établissement distinct. L'établissement distinct n'ayant pas reçu de définition légale, des difficultés se posent pour la jurisprudence afin de dégager ses critères de reconnaissance. C'est ce qu'illustre un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 29 janvier 2003. [...]

[...] Historiquement la première définition que la jurisprudence donne à la notion d'établissement distinct est fonctionnelle, son acception variant selon la finalité qui lui est assignée. Dans les années 1970 la Cour de cassation envisage que l'établissement puisse avoir des contours différents selon qu'il s'agit de la mise en place d'un comité d'établissement, de l'élection de délégués du personnel, de la désignation des délégués syndicaux. Elle fait du concept une notion très modulable : son existence est admise par les juges chaque fois qu'elle se révèle nécessaire pour l'accomplissement de la mission d'une institution représentative du personnel. [...]

[...] L'abandon de l'exigence du pouvoir décisionnel ci-dessus évoqué facilite la reconnaissance de l'établissement distinct en ce que la présence d'un représentant de l'employeur suffit. A cela s'ajoute le retour de la jurisprudence à une définition fonctionnelle et relative de la notion d'établissement distinct, aux lieux et place de la définition conceptuelle et unique de la notion. En multipliant les définitions, les hypothèses de reconnaissance de l'établissement distinct augmentent. L'intérêt d'une telle reconnaissance de l'établissement distinct est de multiplier les unités de représentation et ainsi favoriser l'implantation des institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, afin d'assurer une représentation effective et efficace des salariés. [...]

[...] Lors du renouvellement des mandats expirant le 29 mars 2001, la société propose un protocole d'accord préélectoral organisant l'élection des délégués du personnel au sein d'un établissement unique. Le syndicat FO demande que soient reconnus quatre établissements distincts pour l'élection des délégués du personnel de la société. Le Tribunal d'instance de Rouen, dans un jugement en date du 30 mars 2001, déboute le syndicat de sa demande au motif que chaque région est composée d'un groupe de salariés ayant des intérêts communs et travaillant sous une direction unique. [...]