L'ordonnance du 2 août 2005 instituant le contrat nouvelles embauches est une ordonnance prise sur la base de l'article 38 de la Constitution. Elle a donc une valeur décrétale jusqu'au dépôt du projet de loi de ratification qui lui confère alors valeur législative. Cela explique que le litige qui suit s'inscrit dans un contexte juridique mouvementé où la question était de savoir si les juridictions compétentes étaient judiciaires ou administratives, l'analyse de la conformité des décrets étant du domaine réservé des juridictions administratives depuis l'arrêt Septfonds du Tribunal des Conflits de 1923.
En l'occurrence, le Tribunal des Conflits a estimé, dans un arrêt du 19 mars 2007, que suite à une ratification implicite de l'ordonnance, les juridictions judiciaires étaient tout aussi compétentes pour connaître du litige. C'est alors dans ce contexte qu'intervient la Chambre sociale de la Cour de cassation dans cet arrêt du 1er juillet 2008 (...)
[...] M.Y fait grief à l'arrêt de la Cour d'appel d'avoir statué ainsi. - Il argue, entre autres, que la Cour d'appel n'a pas pris en considération l'article B de la même convention de l'OIT, disposant qu'un préavis n'est pas nécessaire pour mettre fin au contrat de travail pendant une période d'essai ou en fonction d'une période d'ancienneté requise, à condition que la durée de celle-ci soit fixée à l'avance et raisonnable - Il avance également que la Cour d'appel n'a pas apprécié la conformité de l'ordonnance litigieuse par rapport à l'article 2-5 de la convention et que le juge a commis un excès de pouvoir en empiétant sur la fonction législative, pourtant séparée de l'ordre judiciaire, en appréciant d'une manière critique l'ordonnance du 2 août 2005 prise par le gouvernement sur la base de l'article 38 de la Constitution. [...]
[...] Seulement il existe une contradiction évidente avec les règles fixées par le code du travail. En effet, une simple lettre permet de licencier un salarié. Celui-ci n'est en aucun cas informé avant cette lettre de la décision de son employeur et n'a pas le temps de se défendre, ni de rechercher un autre emploi. La Cour de cassation a donc à bon droit estimé que le CNE était contraire à cette première règle en matière de licenciement fixé par le code du travail. [...]
[...] Par conséquent, la décision de la Chambre sociale semble juste. Le juge, estimant que l'ordonnance est contraire à la convention et donc inapplicable, rappelle alors que le licenciement des salariés reste soumis aux règles du code du travail. II. Un licenciement qui reste soumis aux exigences du droit interne La Chambre sociale affirme que le licenciement des salariés doit répondre aux règles d'ordre public du code du travail qui sont la procédure préalable et l'exigence d'une cause réelle et sérieuse La procédure préalable La Cour affirme que le licenciement reste soumis à cette première exigence du code du travail. [...]
[...] Le législateur français avait anticipé cette solution de la Cour de cassation, ayant retiré le CNE par la loi de modernisation du marché du travail du 25 juin 2008. La pression est intervenue avec la décision du Tribunal des Conflits du 19 mars 2007, contrecarrant les plans du gouvernement incarné par les préfets (autorités déconcentrées qui, pour reprendre une formule d'Odilon Barrot, frappent avec le même marteau dont on a raccourcit le manche) qui avaient élevés le conflit en espérant voir le Tribunal des Conflits juger que l'ordonnance avait valeur décrétale, et réserver ainsi son appréciation avec la norme internationale à l'ordre administratif, qui avait estimé antérieurement que le CNE n'était pas contraire à cette convention de l'OIT. [...]
[...] Mais elle refuse de faire jouer l'article 2.2 B puisqu'elle écarte le moyen du pourvoi de M.Y l'invoquant, et affirme donc d'une manière implicite le caractère déraisonnable de la période de deux ans. Comme nous l'avons vu précédemment, avant de se retrouver présentée aux juges judiciaires, la conformité de l'ordonnance à la convention internationale avait été examinée par d'autres juridictions, notamment le Conseil d'Etat. Celui-ci avait jugé, dans son arrêt du 19 octobre 2005, que la période de deux ans constituait un délai raisonnable. Il s'agit ici, comme souvent en droit du travail, d'apprécier une norme par rapport à un double intérêt : celui de l'employé, celui du salarié. [...]
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