Le droit de la négociation collective a connu un essor, en France, depuis 1936, dans le but de régir les conditions de travail en améliorant le minimum légal. Il existe des conventions collectives, régissant l'ensemble des conditions de travail et des accords collectifs, ne visant qu'un point déterminé, comme le temps de travail, par exemple. Le droit français connaît, traditionnellement, trois niveaux de négociation : le niveau interprofessionnel, le niveau de la branche er le niveau de l'entreprise, avec le système de hiérarchie des normes, un accord de niveau inférieur, ne pouvant déroger, en principe, à l'accord qui lui est supérieur, que dans le sens plus favorable au salarié. La négociation au niveau de l'entreprise est perçue par les lois Auroux de 1982 comme l'unité fondamentale de négociation, la loi mettant en place, dans l'entreprise, l'obligation de négocier, sous certaines conditions. Mais aujourd'hui, selon le ministère des Affaires sociales, 55% des salariés travaillent dans des groupes de sociétés. Le groupe n'est-il pas devenu un échelon de négociation à part entière ? Une chose est certaine, le groupe est devenu une réalité économique, financière et sociologique .
La pratique a développé la signature de conventions de groupe afin d'harmoniser les statuts des salariés des sociétés du groupe afin d'organiser une délégation syndicale dans le groupe. Mais le problème posé par ces accords de groupe est leur manque de sécurité juridique, le droit français les ignorant, alors qu'il existe une ébauche de prise en compte du groupe par le droit du travail : on peut penser à l'institution du comité de groupe ou à la pris en compte de la notion de groupe pour les reclassements en matière de licenciement économique. La Cour de cassation a reconnu la validité des accords de groupe dans l'arrêt Axa rendu par la chambre sociale le 30 avril 2003 en fixant quelques bornes : leur conclusion n'est possible que pour des sujets d'intérêt commun aux personnels des différentes entreprises concernées et ils ne doivent pas se substituer à la négociation d'entreprise. Ces accords ont été consacré par la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social du 4 mai 2004 (dite loi Fillon) qui leur a élaboré un régime juridique à l'article L 132-19-1 du code du travail (articles L 2232-30 et suivant du nouveau code du travail qui feront l'objet d'une section IV intitulé conventions et accords de groupe). La loi Fillon : un nouvel échelon de négociation collective accompagné d'une meilleure sécurité juridique ? La loi Fillon a apporté une clarification importante à certains points du régime juridique de l'accord de groupe. Elle donne des règles concernant la conclusion de l'accord en précisant les parties compétentes et les conditions de validité, il en est de même quant aux effets de l'accord qui améliorent la sécurité juridique par rapport au régime prétorien. Le régime consacré est un régime autonome par rapport aux autres niveaux de négociation (I), mais la loi qui renvoie au régime des accords d'entreprise soulève le problème d'insécurité juridique à cause des incertitudes qui subsistent, notamment à l'égard des accords dérogatoires. Cela est dû au fait que ce régime est encore au stade d'ébauche, le législateur ayant opéré un renvoi vers le régime des accords d'entreprise (II).
[...] L'autonomie du régime à l'égard des autres niveaux de branches 1. Les parties à la négociation Selon l'article L 132-19-1 du Code du travail la convention de groupe est négociée du côté patronal par l'employeur de l'entreprise dominante ou par un ou plusieurs employeurs des entreprises concernées par la convention. Selon M. Antonmattei[3], une précision s'impose s'agissant de l'employeur de l'entreprise dominante. L'entreprise dominante n'a pas d'employeur, de sorte qu'il faut probablement lire le représentant de l'entreprise ou l'employeur dominant. [...]
[...] Le second changement paraît utile en pratique, en levant l'interdiction de l'arrêt Axa de substituer la négociation de groupe à la négociation d'entreprise. Cela permettrait-il, ainsi, de dispenser de négociation annuelle obligatoire les entreprises ayant déjà traité les thèmes au niveau du groupe ? La prudence pousse à la négative, car le législateur n'a pas modifié les textes relatifs à la négociation annuelle obligatoire. Ainsi, la loi Fillon a donné des bases juridiques à l'accord de groupe, cependant, par sa défaillance technique, le législateur n'a créé qu'un régime à l'état d'ébauche. [...]
[...] L'arrêt Axa donne un statut autonome à l'accord du groupe, mais la Cour de cassation ne lui donne pas de fondement légal et ne censure pas la cour d'appel qui a fait référence à l'article L 132-2 du Code du travail. Elle valide l'instauration d'une représentation syndicale de groupe, même en l'absence d'unanimité des syndicats et rend cette règle opposable à un syndicat non signataire en lui imposant de respecter la procédure conventionnelle pour pouvoir participer aux négociations L'absence de pertinence du système de renvoi Selon l'article L 132-19-1 du Code du travail, la convention de groupe emporte les mêmes effets que la convention d'entreprise. [...]
[...] La solution est claire pour les syndicats rattachés à une centrale bénéficiant de la présomption de représentativité. Cependant, un problème se pose quant au champ d'appréciation de la représentativité à travers les deux critères que sont l'indépendance et l'influence[4]. L'indépendance à l'égard de l'employeur ne peut être constatée qu'entreprise par entreprise en exigeant un cumul, alors que l'influence mérite d'être appréciée au niveau du champ d'application de l'accord en prenant en compte l'influence dans chaque entreprise. Ainsi, un syndicat peut ne pas être influent dans chacune des entreprises, mais l'être dans son ensemble Les règles de validité de l'accord de groupe Le régime retenu est celui applicable aux accords d'entreprise. [...]
[...] Le problème pratique posé dans de tels cas serait celui où certaines conventions de branche applicables autoriseraient le groupe à y déroger et d'autres interdiraient une telle dérogation. La solution aurait pu être, dans de tels cas d'instaurer la règle de l'accessoire et du principal, les entreprises relevant de conventions de branche d'application minoritaire au sein du groupe se voyant appliquer celle du secteur d'activité principal du groupe. Cela conférerait ainsi au groupe une certaine homogénéité et simplifierait ce point qui peut soulever de sérieux problèmes pratiques. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture