Cour de cassation n° 16-20 605 du 9 décembre 2016, Cour de cassation n° 16-25 793 du 12 décembre 2016, nationalisme corse, organisation politique et syndicale, STC Syndicat des Travailleurs Corses, propagande électorale, non-respect des valeurs républicaines, activisme politique, volonté supra-syndicale, vocation doctrinale, domination de type colonial, discrimination, article L 2122-10-6 du Code du travail
Caractéristiques de la jurisprudence des relations individuelles au travail en droit social, les présents arrêts mettent en évidence l'impossibilité, pour les syndicats, associations de défense des salariés au nom de leurs intérêts propres, de rendre compte d'un objectif politique affiché - et ce, quel qu'il soit.
De fait, rappelant la «jurisprudence FN» de la Cour de cassation du 10 avril 1998, les arrêts présentement commentés s'inscrivent dans la lignée de cette sanction de l'objectif politique par les syndicats.
Le premier arrêt est rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation du 9 décembre 2016 (n° 16-20.605).
Le second arrêt est pareillement rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation du 12 décembre 2016 (n° 16-25.793).
[...] Si manifestement, le STC prône effectivement une différenciation assumée par des intérêts régionalistes et que ne conteste pas la Cour de cassation les confédérations ont cependant échoué, pour cette dernière, à prouver que le STC entrait effectivement, sur ce point particulier de différenciation, en contradiction avec les valeurs de la République A. La différenciation assumée par le STC entre continentaux et Corses Certainement, la Cour de cassation relève à cet effet, dans le premier arrêt, que le STC fait une différence entre Français du continent et Français de Corse sur le fondement des intérêts régionalistes - intérêts illicites - qu'elle prétend défendre sous couvert d'action syndicale. [...]
[...] L'impossibilité pour une organisation syndicale d'afficher un objectif de nature politique Le premier arrêt est certainement le plus emblématique de la position de la Cour de cassation, constante sur ce point, depuis 1998 : une organisation syndicale, qui a pour but, par conséquent, de défendre les salariés, ses adhérents et ses cotisants, ne peut pas se prévaloir d'un objectif politique - objectif qui n'est pas dans la nature des missions qui lui sont confiées. Si un syndicat représente certainement, dans la mesure du possible, les intérêts circonstanciés des salariés - dans le présent cas, des salariés corses et que le formalisme fut respecté il ne peut servir de plateforme à une volonté clairement politique et « supra-syndicale » touchant à l'organisation de politiques publiques généralistes A. [...]
[...] La nature du STC comme syndicat à vocation doctrinale manifeste C'est, par conséquent, non pas les procédures et la chaîne décisionnelle que met en cause la Cour de cassation, mais le fond : l'objectif de la STC et jusqu'à sa nature ou, tout du moins, sa raison d'être. Se présentant comme un syndicat, le Syndicat des travailleurs corses - dont il prétend donc défendre les intérêts - , la Cour de cassation relève toutefois « que le STC poursuit manifestement un but politique, qui excède les objectifs des organisations syndicales, apparaissant comme l'outil pour diffuser la doctrine de certains courants politiques ; qu'il s'agit d'une organisation régionaliste défendant des intérêts régionalistes ». [...]
[...] Or, la CGT, porte-parole des confédérations dans le présent arrêt des parties qui se présentent comme demandeuses, ne prouve pas par elle-même que le STC ne respecte pas les valeurs de la République, mais que c'est l'inaction de cette dernière qui serait fautive - ou, tout du moins, son insuffisance à proclamer son attachement aux valeurs républicaines : « Qu'en retenant que le STC s'était borné, en prônant la corsification des emplois, à exprimer une opinion contraire au principe de non-discrimination, mais n'avait pas manqué à ce principe ». Il ne suffit donc pas de simplement l'exprimer : le formalisme fort de la Cour est ici une protection contre un débat qui serait, lui, de nature plus politique. Un syndicat peut-il être régionaliste ? B. L'échec des confédérations à assimiler régionalisme et discrimination Au fond, c'est ce qui se joue dans cette contestation par les confédérations syndicales qui souhaitent affirmer que le régionalisme corse, en la présente, est assimilable à une discrimination en fonction de l'origine. [...]
[...] Le syndicat se présente donc en qualité de défendeur à la Cour de cassation le 9 décembre 2016, face aux demandeurs qui sont les confédérations CFDT, CGT, CFTC et FO. Le second arrêt, quant à lui, rendu le 12 décembre 2016 (soit quelques jours après le premier), est très lié au premier : il s'agit toujours du STC face aux confédérations. Mais, contrairement au premier arrêt, il ne s'agit pas de juger de la possibilité d'existence même de ce syndicat et de son activisme au sein des structures professionnelles, mais du contenu, jugé illicite par les confédérations, de la propagande électorale et des tracts que distribue le STC, et qui seraient ainsi contraires aux « valeurs républicaines » dont les syndicats se doivent d'être les relais selon les confédérations ci-nommées. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture