Cour de cassation, chambre sociale, 3 juin 2009 - la définition du contrat de travail lors de la participation à une émission de téléréalité

Extraits

[...] Il n'y voyait qu'un divertissement entre adultes consentants agissant, comme ils s'y étaient expressément engagés, à des fins personnelles et non à des fins professionnelles. Toutefois, même si cette décision a déchainé un fort mouvement doctrinal aux vues de son caractère singulier, on était en droit de s'attendre à un nouveau revirement de la part de la Cour de cassation. Il n'en est rien, du moins pour le moment. Effectivement, le 15 septembre 2009, la Cour suprême a confirmé cet arrêt en qualifiant de contrat de travail, le contrat liant un producteur et un participant à une autre émission de télé-réalité : Koh Lanta. [...]

[...] Même si cette qualification paraît étonnante, la Cour de cassation retient bel et bien qu'il y a eu une prestation de travail de la part des participants à l'île de la Tentation démontrant ainsi son indifférence quant au caractère que doit revêtir l'activité professionnelle. B. L'indifférence du caractère de l'activité comme prestation de travail Etymologiquement, le travail désigne l'effort, dans un contexte de souffrance ou de pénibilité mais cette spécificité ne doit pas marquer définitivement le contrat de travail. Il existe des personnes qui prennent plaisir à effectuer leur travail. [...]

[...] Autrement dit, la référence à la pénibilité que certains voudraient ajouter aux critères classiques du contrat de travail est injustifiée. Dès lors, l'activité, qu'elle soit ludique ou exempte de pénibilité, est une prestation de travail soumise au droit du travail. Tous les intéressés avaient pourtant accepté en le signant le règlement participants avant de revendiquer la qualité de salarié à la fin du tournage, pour certains d'entre eux. Mais si l'existence d'un contrat de travail est identifiée, cela résulte directement des consignes de comportement préparées et exécutées, ce que les juges ont l'obligation légale de rechercher car ils doivent donner aux faits leur véritable qualification selon l'article 12 du Code de procédure civile : Le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables La Cour de cassation indique que la prestation des participants consistait à prendre part à des activités imposées et à exprimer des réactions attendues, à être disponible en permanence, sans communiquer avec l'extérieur ce qui la distinguait du seul enregistrement de la vie quotidienne. [...]

[...] L'apport de cet arrêt réside dans la confirmation que le lien de subordination constitue le critère décisif du contrat de travail sans toutefois faire abstraction des autres critères caractérisant le contrat de travail comme la prestation de travail I. Une modernisation de la prestation de travail On s‘accorde à reconnaitre que le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s'engage moyennant rémunération à accomplir une prestation pour le compte du cocontractant sous la subordination duquel il se place. [...]

[...] Enfin, la société invoquait le fait qu'il n'y avait aucun lien de subordination de sa part à l'égard des candidats puisque ceux-ci étaient libres de refuser de participer aux activités qui n'avaient pas de caractère contraignant. La question qui se posait alors à la Cour de cassation était de savoir si les participants à une émission de télé-réalité étaient des salariés. Autrement dit, est-ce que tous les critères du contrat de travail sont réunis dans le cadre d'une émission de télé-réalité ? Le Code du travail ne donne aucune définition du contrat de travail. [...]