cour de cassation, chambre sociale, 26 janvier 2022, médecin du travail, arrêt Costedoat, arrêt maladie, article 1242 alinéa 5 du Code civil, principe d'indépendance, immunité du préposé, principe d'immunité, arrêt Cousin
En l'espèce, un salarié a été placé en arrêt maladie fin janvier 2002, a été reconnu invalide à partir de début janvier 2005 et a finalement été mis à la retraite en 2010. Il a alors saisi le tribunal de grande instance d'une demande d'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du médecin du travail salarié ainsi que de son employeur. La cour d'appel déclare que les demandes de l'ancien salarié à l'encontre du médecin du travail sont irrecevables, dans le fait qu'elles ne portent pas sur du harcèlement moral ou sur une atteinte au secret professionnel. L'ancien salarié fait alors grief aux conclusions de la cour d'appel. Son moyen au pourvoi repose sur deux branches.
[...] Par ailleurs, avec cette immunité du préposé, il va pouvoir commettre des fautes, mais ne pas engager sa responsabilité pour autant. Il existe alors une possibilité selon laquelle le recours contre le préposé ne pourrait être réalisable qu'en cas de faute personnelle du préposé détachable de sa fonction, et le commettant n'arait pas pu s'attendre. Dans un arrêt du 14 décembre 2001 (Cousin) notamment, l'Assemblée plénière de la haute juridiction a admis une limite à l'arrêt Costedoat, en accordant la possibilité d'une condamnation pénale du préposé pour infraction intentionnelle. [...]
[...] Cette immunité, comme vu plus haut, pose des difficultés concernant une appréciation trop laxiste de la faute du préposé. Réduire le domaine de cette immunité permet alors de responsabiliser chacun dans l'exercice de sa profession, et cela semble d'autant plus important dans le cas du domaine médical, tel qu'illustré dans l'arrêt commenté. Cependant, la réduction du domaine de ce principe d'immunité porte également des inconvénients. En effet, cela conduit à ériger une jurisprudence assez illisible, incertaine, concernant ce point, et les tempéraments à la solution de principe posée dans Costedoat connaît aujourd'hui de nombreuses variations. [...]
[...] La confirmation de ces arrêts pourrait alors potentiellement modifier les limites établies de l'immunité personnelle du préposé. En effet, cela pourrait écarter cette immunité dans divers scénarios d'actions non intentionnelles, se basant uniquement sur des faits dommageables ou sur une délégation de pouvoir. Les projets de réformes, du 13 mars 2017, et celui du 29 juillet 2020 tentent alors de clarifier cette question. Par son article 1245 alinéa le premier exclue le principe général, en énonçant que « On est responsable du dommage causé par autrui dans les cas et aux conditions posés par les articles 1246 à 1249 », et consacre une liste limitative de cas de responsabilités du fait d'autrui. [...]
[...] En effet, dans cet arrêt, la Cour d'appel, confirmée par la Cour de cassation, a relevé que rien ne démontrait une faute pénale ou une certaine intention de nuire de la part du médecin, donc du préposé, et ainsi la victime ne pouvait pas se prévaloir du fait que l'immunité n'était pas applicable. Il faudrait alors prouver que le préposé a exercé un abus de fonction, ce qui pourrait lui permettre d'engager une action à son égard. Mais cela reste, en effet, relativement compliqué, et pose des difficultés, en premier lieu par le fait que le commettant est souvent assuré, donc l'indemnisation de la victime est assez compliquée, et qu'il n'est pas possible d'agir contre le préposé. [...]
[...] Par ailleurs, par la proposition sénatoriale du 29 juillet 2020, par son article 1148, on obtiendrait une définition du commettant et du lien de préposition, avec à nouveau une consécration de la jurisprudence, avec cependant un léger assouplissement du côté du commettant. La jurisprudence est alors consacrée, mais une deuxième fois limitée. Par cet arrêt, publié au bulletin, on semble finalement trouver la réponse tant attendue à ces nombreux débats et questions, écartant le flou qui entoure les exceptions à l'immunité. [...]
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