Cour de cassation chambre sociale 10 mars 2010, élection professionnelle, employeur, annulation de l'élection, délégué syndical, organisation du scrutin, déroulement du scrutin, principes généraux du droit électoral, article L.2122-1 du Code du travail, article L.2314-21 du Code du travail, article L.2314-24 du Code du travail, commentaire d'arrêt
Les élections professionnelles ayant pris une importance d'une toute nouvelle dimension depuis la loi du 20 août 2008, la moindre irrégularité de ces dernières peut avoir des incidences considérables pour les organisations syndicales, rendant alors nécessaire de déterminer les causes pouvant justifier leur annulation, comme le montre cet arrêt rendu le 10 mars 2010 par la chambre sociale de la Cour de cassation, au visa des articles L.2122-1 et L.2314-21 à L.2314-24 du Code du travail.
[...] Dans son jugement rendu le 14 mai 2009, le tribunal d'instance de Metz a débouté le syndicat de ses demandes, relevant que le matériel de vote par correspondance avait été envoyé dans le délai prévu par le protocole préélectoral, et suffisamment tôt pour permettre aux salariés d'exprimer régulièrement leur vote. A de plus, été relevé que l'employeur s'était personnellement assuré auprès du bureau de Poste, que tous les bulletins lui avaient été remis avant la clôture du scrutin. De ce fait, aucune défaillance provenant de l'employeur dans l'organisation des élections ne pouvait être à déplorer. L'irrégularité commise dans l'organisation et le déroulement d'une élection professionnelle, qui ne provient pas de l'employeur, peut-elle justifier l'annulation de l'élection ? [...]
[...] De ce fait, semble être nécessaire, corrélativement à la prise d'importance de ces élections, un assouplissement des possibilités de les annuler (ou une appréciation plus rigoureuse de leur régularité), avec en unique ligne de mire la finalité de ces élections. La nullité doit être appréciée dans une optique finaliste : elle doit être prononcée du fait des conséquences de l'irrégularité pour le syndicat, notamment sa représentativité, et doit être la seule issue envisageable à partir du moment où ces conséquences sont bel et bien présentes. [...]
[...] La réponse donnée est en fait le revirement d'une jurisprudence sur laquelle le tribunal avait jugé bon de s'aligner, qui admettait exactement le contraire, la chambre sociale ayant cassé, dans un arrêt rendu le 30 janvier 2008, le jugement rendu par un tribunal d'instance, là encore en matière de vote par correspondance et de bulletins acheminés en retard, qui n'avait pas relevé de défaillance de l'employeur, mais seulement une défaillance du bureau de Poste. La Cour revient donc sur cette ligne, selon laquelle la défaillance provenant d'une cause extérieure à l'entreprise ne pouvait justifier d'annulation des élections, pour désormais balayer toute recherche d'imputabilité de l'irrégularité à l'employeur. L'innovation apportée semble louable, en ce qu'il importe peu pour le syndicat lésé par l'irrégularité que celle-ci provienne ou non de l'employeur : le préjudice est le même, et il est peut-être passé à côté de la représentativité du fait de cette défaillance. [...]
[...] On était donc très proche du seuil de qui aurait effectivement pu être franchi, si le syndicat avait recueilli au moins 22 voix dans les 34 manquantes. La défaillance dans l'acheminement des bulletins a donc bien eu une incidence, en étant déterminante de la qualité représentative d'une organisation syndicale dans l'entreprise, justifiant alors l'annulation de l'élection. La Cour rend d'ailleurs son arrêt au visa de l'article L.2122-1 du Code du travail, celui-ci prévoyant que les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise sont celles qui satisfont aux critères posés par l'article L.2121-1 du Code du travail, et qui ont recueilli au moins des suffrages exprimés lors du premier tour des élections professionnelles. [...]
[...] Est donc rappelé le caractère restrictif de cette ligne jurisprudentielle : les irrégularités en elles-mêmes ne permettent pas forcément d'annuler une élection professionnelle, à partir du moment où celles-ci sont minimes et sans incidence. Mais en plus de rappeler des causes devenues classiques d'annulation des élections professionnelles, la chambre sociale rappelle aussi l'existence d'une nouvelle cause, dégagée seulement deux mois avant sa décision, justifiant la nullité de l'élection : le caractère déterminant de l'irrégularité quant à l'obtention ou non de la représentativité du syndicat. [...]
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