L'article 411-10 du Code du travail issu de la loi de 2 janvier 1973 définit le syndicat comme un groupement doté de la personnalité civile. Ainsi, il a la capacité de contracter mais également d'ester en justice. Trois catégories d'action se distinguent : lorsque le syndicat agit à la place du salarié, lorsqu'il agit en vue de faire respecter une action collective, et lorsqu'il défend l'intérêt collectif de la profession. La démonstration d'un intérêt collectif n'est pas toujours évidente, c'est pourquoi le conflit porte sur la recevabilité de l'action du syndicat. Dans les arrêts du 21 janvier et du 26 mai 2006, la chambre sociale de la Cour de cassation, précise les actes qu'un syndicat peut contester, et donc indirectement les possibilités de défense de l'intérêt collectif de la profession qu'il représente.
Le premier arrêt oppose une société à des syndicats. En effet, deux syndicats d'un établissement intentent une action en justice pour demander l'élaboration d'un plan social organisant la mise en œuvre du projet de transfert d'activités et de personnels entre différents établissements de la société situés en région parisienne. Outre la question relative à la valeur de la mention du lieu de travail dans le contrat de travail, la question de la recevabilité de l'action du syndicat est l'objet de contestation. La Cour d'appel déclare recevable l'action intentée par les syndicats au motif que le projet concernait l'intérêt collectif des salariés du site. Par conséquent les syndicats représentant les salariés de ce site étaient recevables. Contestant cette décision, la société fait valoir en pourvoi, sur les fondements des articles L.411-1 et L.411-11 du Code du travail, que les syndicats n'ont pas la compétence territoriale requise. Il soutient qu'un syndicat ne peut agir qu'au niveau où il est représenté. Ainsi, un syndicat d'un établissement ne pourrait agir afin de remettre en cause une procédure suivie dans le cadre d'un projet d'entreprise.
Dans le second arrêt, la Cour d'appel, confirmant le jugement, a déclaré irrecevable l'action intentée par un syndicat, et rejette la demande en annulation de la fédération et du syndicat. En effet, suite à la conclusion d'un accord de réduction du temps de travail entre une entreprise et une fédération, une seconde fédération et un syndicat assignent les signataires de l'accord devant le tribunal de grande instance afin d'obtenir l'annulation de cet accord. Dans le pourvoi, ils soutiennent tout d'abord que le signataire n'avait pas la qualité pour signer cet accord. Puis ils prétendent que l'accord ne contient pas les mentions requises par la loi et qu'il viole les dispositions légales relatives aux cadres autonomes. Enfin, les demandeurs au pourvoi contestent la décision de la Cour d'appel qui affirme que l'action du syndicat est irrecevable en vertu du principe de hiérarchie relative et de cohérence. Ainsi, le syndicat n'aurait pas la qualité pour demander l'annulation d'un accord discuté au niveau national car il n'a pas participé aux négociations. De plus, la Cour d'appel considère que les effets de la conclusion d'un nouvel accord n'est pas une circonstance conférant au syndicat un intérêt juridiquement protégé de nature à rendre son action recevable.
Un syndicat, quelque soit son assise territoriale, est-il recevable à agir en justice contre tout acte dès lors qu'un intérêt collectif de la profession qu'il représente est démontré ?
La Cour de cassation estime qu'un projet de transfert d'activité et de personnel d'un établissement, quelque soit son amplitude, concerne l'intérêt collectif des salariés du site. Ainsi, les syndicats représentant les salariés d'un seul établissement sont recevables à agir pour la défense des intérêts de la profession lorsque cet établissement est visé par le projet. Egalement au visa de l'article L.411-11 du Code du travail, la Cour de cassation considère qu'un syndicat d'entreprise peut, dans l'intérêt de la profession qu'il représente, joindre son action à celle de la fédération et à laquelle il a adhéré pour demander la nullité d'un accord collectif d'entreprise.
Par la disparition de limites à la recevabilité des actions, ces deux arrêts confirment la tendance à un renforcement de l'action syndicale en justice (I). Cette évolution se justifie par la nature même du syndicat qui s'exprime par sa mission (répétitif ?), à savoir la défense des intérêts collectifs des salariés qu'il représente. Ils jouent donc un rôle spécifique qui semble légitimer leur droit d'agir en justice (II).
[...] On constate donc la complexité du système où le principe de la représentativité est finalement mis à mal par l'ouverture de l'action en justice à tout syndicat et sans limite. Action reconnue dans l'arrêt des chambres réunies le 5 mars 1913, et fut ensuite repris par une loi du 12 mars 1920 intégrée à l'article L.411- 11 du Code du travail. Cass, sect. Sociale février 1949, Bull n°154 p.205 : la Cour de cassation n'exige pas que le syndicat ait le caractère suffisamment représentatif pour contester une élection qui, pour y participer, nécessitait cette qualité. [...]
[...] Si des syndicats ne peuvent défendre leurs intérêts par des négociations, la Cour veut préserver leur droit de se défendre devant la justice. De plus, elle se fonde sur l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ; fondement qui se détache de tous les critères de la représentativité. L'intérêt collectif de la profession est plus vague que l'influence et l'audience, critères principaux de la représentativité. Elle fait donc de leur essence même le fondement de leur droit d'agir et leur permet de conserver une autonomie. Dans le paysage syndical, ce résultat est critiquable. [...]
[...] Mais cette solution est aussi un corollaire au principe de non concordance entre l'assise du syndicat et l'amplitude de l'acte. En effet, la capacité de négocier et de conclure des accords collectifs de travail reste réservée aux seuls représentants des organisations syndicales reconnues représentatives. Par conséquent, un accord collectif peut s'appliquer à un établissement sans que les syndicats formé à ce niveau soient invités à la négociation. Admettre alors la condition de participation aux négociations revient à refuser le droit d'agir à des syndicats professionnels. Or, la Cour de cassation ne va pas dans ce sens. [...]
[...] Elles concernent le rapport entre la dimension territoriale du syndicat et celle de l'opération juridique remise en cause. C'est ainsi qu'elle décida qu'il n'y avait aucune correspondance entre l'assise du syndicat et l'amplitude de l'opération contestée Mais, ne s'arrêtant pas là, elle élargit quelques mois plus tard, le champ des accords pouvant être remis en cause A. L'absence de concordance entre l'assise du syndicat et l'amplitude de l'opération contestée Il est acquis que la représentativité d'un syndicat n'est pas une condition de la recevabilité de l'action en justice d'un syndicat. [...]
[...] C'est pourquoi, cet argument est rejeté par la Cour de cassation qui casse la décision de la Cour d'appel. La Cour de cassation, en renforçant l'action en justice des syndicats, révèle, s'appuie sur une logique tenant à la mission même des syndicats. II. La spécificité de tous les syndicats à agir en justice La Cour de cassation a rejeté tout argument tendant à déclarer irrecevable une action en justice d'un syndicat. L'absence de restrictions tient à l'essence même des syndicats. [...]
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