La représentativité est l'aptitude reconnue aux syndicats d'être les porte-paroles des salariés dont ils prétendent défendre et promouvoir les intérêts. L'enjeu de la représentativité est fondamental dans le rôle que va jouer le syndicat. En effet, si la loi affirme que les syndicats peuvent se constituer librement dans l'entreprise, la quasi-totalité des droits syndicaux figurant dans le Code du travail concernent les seuls syndicats représentatifs. Attaché au pluralisme syndical, la conception française de la représentativité a conduit à reconnaître la compétence de plusieurs syndicats qui peuvent se prévaloir de la représentativité. Toutefois, deux types de représentativité existent. Après la seconde guerre mondiale, un arrêté du 31 mars 1966 modifiant une décision de 1948, est venu faire bénéficier cinq organisations syndicales nationales de salariés d'une présomption irréfragable de représentativité. D'une part, ces syndicats n'auront plus à prouver leur représentativité aussi bien au niveau national qu'au niveau de l'entreprise, car cette présomption est générale . D'autre part, ces syndicats bénéficient de prérogatives particulières. Les conséquences de cette représentativité sont enviées par les syndicats apparus plus tard et certains se prévalent de leur représentativité pour demander la modification de l'arrêté. Cette situation est celle de l'Union Nationale de Syndicats Autonome (UNSA), créé en 1993, mais le Conseil d'Etat a confirmé la décision du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité de ne pas faire figurer l'UNSA parmi les syndicats représentatifs au niveau national interprofessionnel. Il s'agit la de déterminer les conditions de mise en œuvre des différents critères de la représentativité s'agissant d'un syndicat non affilié à l'une des cinq confédérations reconnues représentatives au niveau national interprofessionnel. Le 16 janvier 2003, l'UNSA demande au ministre de figurer au nombre des organisations syndicales de salariés les plus représentatives au plan national en se fondant sur les articles L133-1, L133-2 et L136-1 du Code du travail. Par une décision implicite née du silence, le ministre refuse de reconnaître l'UNSA comme l'une des organisations syndicales les plus représentatives et, par conséquent, de modifier l'arrêté de 1966 et les articles responsable 136-1 et responsable 136-2 du Code du travail. Le syndicat intente un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat.
L'UNSA est-il un syndicat représentatif au niveau national interprofessionnel suivant les critères d'effectifs et d'audience fixés dans le Code du travail et la jurisprudence ?
Le Conseil d'Etat, en sa composition la plus prestigieuse, rejette la requête du syndicat considérant que ce denier ne peut être regardé comme étant au nombre des organisations syndicales les plus représentatives au niveau national. Le ministre a donc fait une exacte application des critères de la représentativité énoncés aux articles précités. Cette conclusion n'était pas évidente du fait de nouveaux éléments déterminant dans l'application des critères essentiels de la représentativité, à savoir l'effectif et l'audience du syndicat (I). Mais l'action du syndicat est l'expression d'un mouvement contestataire lié au système de la représentativité syndicale en France (II).
[...] D'après Rosanvallon, c'est surtout la notion de représentation syndicale qui s'est transformée. La démocratisation du syndicalisme qu'il qualifie d' inéluctable et problématique se traduit notamment par une étude du paysage syndical pour réétudier le système de représentativité. Enfin, pour certains, le système masque une règle antidémocratique du fait de l'admission des signatures minoritaires. En effet, la signature d'un seul syndicat, même minoritaire, suffit à la mise en place d'un accord dans l'entreprise. Pour certains syndicalistes, c'est une absence de démocratie sociale. Principe pourtant fondamental. [...]
[...] Le scénario de transformation s'appui sur une évolution vers une représentativité établie par le vote. En conséquence, la présomption irréfragable ne jouerait plus qu'au niveau national interprofessionnel. Aux autres niveaux, cette présomption ne serait désormais plus qu'une présomption simple et contestable sur le seul critère de l'audience. Par ailleurs, le monopole de présentation de candidatures au premier tour des élections professionnelles par les seules organisations représentatives est remis en question. Donc la question de la définition d'un seuil chiffré de représentativité, de l'ordre de 5 ou selon que l'on souhaite ou non favoriser le regroupement des organisations syndicales se pose. [...]
[...] Le Conseil d'Etat ne fait aucune allusion à cette possibilité. Deux interprétations sont donc possible, soit il ne le prend pas en compte, soit il se réserve la possibilité de l'invoquer plus tard. La juridiction administrative suprême conserve donc sa marge de liberté dans l'interprétation des critères. Néanmoins, reste à savoir s'il existe une organisation qui cumule ces conditions. Par conséquent, une nouvelle demande formulée d'ici quelques années semble avoir des chances d'aboutir si le syndicat poursuit son ascension, à moins que le Conseil d'Etat expose de nouveaux fondements pour justifier un refus du ministre. [...]
[...] Ces résultats sont l'image fidèle et représentative de l'état des forces syndicales prises dans leur ensemble à un moment donné. Le commissaire du gouvernement et le Conseil d'Etat font donc remarqué que la progression même importante (relativement aux autres syndicats) ne doit pas faire oublier que les critères s'apprécient à un temps donné précis. Envisager cette progression dans le temps revient à faire une prévision, ce qui ne peut être envisageable vu l'ampleur des conséquences. Cependant, le commissaire du gouvernement apporte un tempérament. [...]
[...] En effet, si en 1966 l'établissement de ce système récompensait les syndicats de leurs attitudes patriotiques et pouvaient permettre le développement des syndicats, aujourd'hui il est sujet à de fortes critiques notamment depuis que les organisations syndicales peuvent conclure des accords dérogatoires c'est à dire moins favorables aux salariés que ce que la loi prévoit. C'est ainsi que certains syndicats peuvent négocier au rabais les conditions de travail des salariés. Il y a donc dans cette revendication une particularité tenant à protéger le but des syndicats, à savoir l'amélioration des conditions de travail. Avec cette nouvelle réglementation, les syndicats ont une puissance moindre, c'est une des raisons pour lesquelles le système ne leur convient pas. Par ailleurs, la légitimité des acteurs de la négociation peut être remise en cause. [...]
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