Comme l'atteste une récente manifestation des stagiaires, leur situation se trouve très précaire. C'est le cas des agents publics stagiaires lorsqu'ils font face à un refus de titularisation à la fin de leur stage. L'arrêt du Conseil d'Etat d 3 décembre 2003 ne semble pas aller vers une amélioration de leurs droits.
En l'espèce, un agent public stagiaire était auditeur de justice de l'école nationale de la magistrature. En fin de stage, le jury de classement des auditeurs de justice à refuser sa titularisation dans une décision du 16 février 2001 et l'a donc licencié en raison de son inaptitude professionnelle à exercer les fonction de magistrat.
L'agent public stagiaire exerce un recours en excès de pouvoir contre cette décision en évoquant différents moyens de légalité externe et interne. Elle fait grief à la décision du jury d'avoir suivit une procédure irrégulière en raison de la non communication préalable de son dossier. La requérante reproche ensuite au jury de ne pas avoir mentionné le nombre de points total qu'elle avait obtenu de sa décision. En ce qui concerne les moyens de légalité interne, la stagiaire évoque un détournement de pouvoir constitué par la prise d'une mesure pour un motif disciplinaire par le jury. Enfin, elle met en cause une erreur manifeste d'appréciation du jury.
Il ne s'agira pas ici de commenter l'absence d'apparition des points acquis par la requérante dans la décision jury. La question de la communication préalable du dossier de la stagiaire retiendra principalement notre attention Le moyen du détournement de pouvoir par la décision prise pour un motif disciplinaire ainsi que l'erreur manifeste d'appréciation du jury seront aussi l'objet de développement.
Il s'agit donc de savoir si la décision de non titularisation d'un agent public stagiaire à la fin de son stage doit être précédée de la communication de son dossier ? Il sera nécessaire de s'interroger également sur le caractère disciplinaire ou non de la décision du jury ? Il faudra aussi déterminer si dans son appréciation du comportement professionnel de la stagiaire le jury a commis une erreur manifeste d'appréciation.
Le Conseil d'Etat rejette l'ensemble des moyens développer par la requérante. En effet, il a jugé que la décision n'était pas irrégulière alors même que la stagiaire ne s'est pas vue communiquer son dossier antérieurement à la décision du jury. Il estime que la décision ne revêt pas le caractère d'une décision disciplinaire et écarte donc la possibilité d'un détournement de pouvoir. Le non report des points de la stagiaire dans la décision n'est pas une condition de la légalité de la décision du jury et enfin, le Conseil d'Etat ne décèle pas d'erreur manifeste dans l'appréciation du comportement professionnel de la requérante dans la décision du jury.
Cet arrêt est intéressant dans le sens où le Conseil d'Etat vient par cet arrêt mettre fin à une tentative de revirement jurisprudentielle opérée par les juges du fond. En effet, elle met fin à la volonté notamment des Cours d'appel de Nancy et de Bordeaux d'adoucir la situation précaire que subissent les stagiaires. Lorsqu'un stagiaire est licencié au cours de son stage ou lorsqu'il est soumis à une mesure disciplinaire, les droits de la défense reconnu à tout agent public lors d'une décision prise en considération de la personne et d'une certaine gravité s'appliquent. Ce n'est pas le cas en revanche d'une décision de prorogation de stage au-delà de sa durée initiale d'un an ou du licenciement de l'agent public stagiaire. Il faut dès lors se pencher sur la position du Conseil d'Etat quant à la condition des stagiaires. Doit on ou non conserver cette situation qui paraît au demeurant inégalitaire en ce qui concerne l'application des droits de la défense ?
Il faut alors se demander si le Conseil d'Etat entend conserver sa position, comment va-t-il faire face aux tentatives des juges du fond de renverser sa jurisprudence ? Cette interrogation guidera notre démarche. Le Conseil s'efforce dans cet arrêt de préciser le statut des agents publics stagiaires, tant leur situation que la nature de la décision qui refuse leur titularisation (I). Il n'hésite pas à réaffirmer sa position traditionnelle mais néanmoins critiquable de ne pas autoriser l'application des droits de la défense et notamment la communication du dossier de l'intéressé avant une décision de non titularisation. (II)
[...] Commentaire de l'arrêt du Conseil d'Etat du 3 décembre 2003 Comme l'atteste une récente manifestation des stagiaires, leur situation se trouve très précaire. C'est le cas des agents publics stagiaires lorsqu'ils font face à un refus de titularisation à la fin de leur stage. L'arrêt du Conseil d'Etat d 3 décembre 2003 ne semble pas aller vers une amélioration de leurs droits. En l'espèce, un agent public stagiaire était auditeur de justice de l'école nationale de la magistrature. En fin de stage, le jury de classement des auditeurs de justice a refusé sa titularisation dans une décision du 16 février 2001 et l'a donc licencié en raison de son inaptitude professionnelle à exercer les fonctions de magistrat. [...]
[...] Le refus de la communication de son dossier à l'agent public stagiaire sujet d'une décision de non-titularisation Le Conseil d'Etat rétablit une unité jurisprudentielle en réaffirmant le principe dégagé dans l'arrêt Stéphan. Si le licenciement intervient à la fin du stage pour inaptitude professionnelle, n'a pas à être fait avec la communication du dossier car le licenciement est alors un simple refus de titularisation, une mesure tout à fait normale à l'issu du stage. Le conseil d'Etat a donc refusé d'appliquer les droits de la défense dans ce cas depuis l'arrêt de la section du Conseil d'Etat du 16 mars 1979, Ministre du Travail contre M. Stephan. [...]
[...] Cela est dégagé par le Conseil d'Etat dans deux arrêts du 20 janvier 1956 et du 23 octobre 1964. Le licenciement d'un stagiaire en cours de stage doit alors être précédé de la communication du dossier s'il est prononcé pour insuffisance professionnelle, c'est à dire en considération de la personne. Le conseil d'Etat considère en effet qu'il est mis fin aux droits du stagiaire de faire ses preuves pendant toute la durée du stage dans un arrêt du 19 mars 1965, Ville de Bordeaux contre Rivière. [...]
[...] Bien qu'aujourd'hui le Conseil d'Etat ait reconnu que non titularisation mesure prise en considération de la personne, il refuse encore la communication préalable du dossier à l'intéressé. Cela s'attache sans doute au fait que le stagiaire n'a aucun droit à titularisation et que donc il ne peut réclamer application des droits de la défense. La fin du stage met fin aux relations entre l'agent public stagiaire et l'administration. Dans cet arrêt du 3 décembre 2003, le juge administratif pose tout de même une limite. En effet, les décisions de non-titularisation qui seraient disciplinaires devront être précédée la communication à l'intéressé de son dossier. [...]
[...] Il s'agit donc de savoir si la décision de non-titularisation d'un agent public stagiaire à la fin de son stage doit être précédée de la communication de son dossier . Il sera nécessaire de s'interroger également sur le caractère disciplinaire ou non de la décision du jury ? Il faudra aussi déterminer si dans son appréciation du comportement professionnel de la stagiaire le jury a commis une erreur manifeste d'appréciation. Le Conseil d'Etat rejette l'ensemble des moyens développés par la requérante. [...]
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